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Le plan Sarkozy pour libérer Ingrid Betancourt

En Colombie aussi, la foule manifeste pour la libération d'Ingrid Betancourt. Keystone

La mission pour sauver l'otage franco-colombienne détenue par les FARC est partie avec une proposition en trois temps: la libération d'Ingrid Betancourt, l'accueil par la France d'une poignée de cadres rebelles détenus par Bogota et l'appui de la France pour faire retirer les FARC de la liste européenne des organisations terroristes.

Soutenue par la Suisse et l’Espagne, la « mission humanitaire » française dépêchée mercredi dernier par la France doit récupérer la franco-colombienne Ingrid Betancourt, otage depuis six ans des FARC et «en danger de mort imminente», selon le dernier message radiotélévisé de Nicolas Sarkozy destiné aux ravisseurs.

Selon des sources proches de la médiation franco-hispano-suisse, le plan du président français comporte trois étapes, dont les termes peuvent naturellement évoluer au cours des négociations actuelles.

Le scénario français prévoit d’abord l’échange d’Ingrid Betancourt contre une grâce signée par le président colombien en faveur d’une poignée de guérilleros condamnés à de lourdes peines de prisons, connus comme les «colonels» des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC).

Ensuite, ces hauts-gradés seraient accueillis en tant que «réfugiés politiques» par la France, qui s’engage à rester «mobilisée pour un accord humanitaire» afin d’obtenir la libération des 38 otages restants et des 500 détenus reconnus par les deux parties.

Finalement, les FARC pourraient bénéficier en contrepartie de l’appui de la France au sein de l’Union européenne – qu’elle va présider à partir du 1er juillet prochain – pour être retirés de la liste des organisations terroristes.

Cette offre est la traduction concrète du message lancé aux FARC par Nicolas Sarkozy le 1er avril dernier: «Par cet acte déclencheur, vous répondrez à l’insupportable attente des familles et à la clameur de la communauté internationale unanime. Vous rendrez compréhensible votre discours. Vous dessinerez enfin des voies d’avenir. Vous ouvrirez des perspectives pour la paix.»

Une mission menée par un Suisse

Comme l’a révélé la presse colombienne, c’est l’universitaire suisse Jean-Pierre Gontard (professeur à l’Institut de hautes études internationales et du développement), accompagné par l’ancien consul français à Bogota Nöel Saez qui est chargé de faire aboutir sur place ce marché.

Rappelons également que la France, l’Espagne et la Suisse sont reconnus comme facilitateur par le gouvernement du président Álvaro Uribe et par les FARC. Et ce dans le conflit armé qui les opposent.

Les médiateurs Gontard et Saez sont en Colombie pour s’entretenir avec l’un des sept chefs du «secrétariat» qui commande la guérilla la plus ancienne de l’Amérique latine, fondée en 1964. Une réunion qui a reçu le feu vert d’Álvaro Uribe que les deux médiateurs ont déjà rencontré.

Cette réunion doit aussi être autorisée par les FARC. Le président Uribe, lui, devra en connaître le lieu et les modalités avant d’éloigner ses troupes. Elle pourrait se dérouler avec ou sans la participation du Comité international de la Croix Rouge (CICR) et toujours en informant préalablement le gouvernement colombien.

Perspective politique

Négocier directement et sur ces bases avec la France obligerait les FARC à plusieurs sacrifices. Les FARC seront appelés à digérer l’absence du président vénézuélien Hugo Chavez, comme médiateur.

Les rebelles devront ensuite établir la liste des prisonniers susceptibles d’être libérés par Álvaro Uribe. Elles devront choisir une minorité parmi les 1700 membres qui sont actuellement détenus, la plupart inculpés mais pas encore condamnés, une condition pour être gracié.

Enfin les FARC devront se contenter des promesses des trois pays médiateurs et faire le premier pas: libérer Ingrid Betancourt qui est, rappelons-le, dans un état critique.

Sous pression internationale, les FARC ont avec ce marché la perspective d’un processus politique semblable à celui qu’a connu l’OLP dans les années 70. Et ce, en abandonnant les pratiques contraires au droit international humanitaire, qui interdit les attaques contre les populations civiles, les blessés et les personnes non combattantes.

Avec cette conversion, les FARC pourraient devenir un interlocuteur pour une solution pacifique du confit en Colombie.

swissinfo: Juan Gasparini / Tribune des droits humains

Ce vendredi, des dizaines de milliers de Colombiens ont manifesté pour la libération de tous les otages, au lendemain de l’arrivée d’une mission humanitaire menée par la France pour tenter d’entrer en contact avec la Franco-Colombienne dont l’état de santé est critique.

Les Colombiens ont défilé dans les rues des grandes villes du pays pour exiger la libération de quelque 2800 otages que compte le pays, selon les estimations officielles.

Ce dimanche, une «marche blanche» pour la libération d’Ingrid Betancourt est organisée à Paris et dans plusieurs villes de France. Et ce à l’appel de ses enfants qui espèrent que la mission d’urgence envoyée par Paris en Colombie pourra la «sauver de la mort».

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