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Les anti-européens en fête à Interlaken

Christoph Blocher, co-fondateur de l'ASIN devenu ministre, a été très applaudi. Keystone

L'Action pour une suisse indépendante et neutre (ASIN) fête ses vingt ans dans l'Oberland bernois, en réaffirmant haut et fort son credo.

Sans elle, la Suisse serait aujourd’hui membre de l’Union européenne et aurait perdu son indépendance, a martelé Christoph Blocher, co-fondateur de l’ASIN devenu ministre de la justice.

Sans la «troupe de choc» de l’ASIN, le peuple suisse aurait «perdu beaucoup» de droits liés à la démocratie directe et aurait été «mis sous tutelle», a clamé Christoph Blocher devant quelque 2000 membres de l’ASIN qui l’avaient accueilli par une «standing ovation».

Et de rappeler «vingt ans de résistance obstinée à toutes les tentatives de pressions des médias, des partis, des autorités, des organisations de l’économie, des syndicats et des professeurs d’université».

Quatorze ans après le refus de l’adhésion de la Suisse à l’Espace économique européen (EEE), Christoph Blocher constate que «les prédictions apocalyptiques sur l’avenir de la Suisse étaient profondément erronées».

Le tribun en veut pour preuve la dernière enquête du World Economic forum, qui classe la Suisse en tête du classement des pays les plus compétitifs de la planète.

Pour Christoph Blocher, une participation à l’EEE ou une adhésion à l’UE «détruiraient les bases sur lesquelles la Suisse a bâti sa réussite». Le ministre juge par conséquent «réjouissant» que le gouvernement ne considère plus l’adhésion comme un «objectif stratégique».

Christoph Blocher n’en invite pas moins l’ASIN à poursuivre sa mission. Pour lui, «ces vingt ans ne sont qu’un début».

Retour à Ankara

Le ministre de la justice a également fait allusion à la polémique déclenchée par les propos qu’il a tenus au début du mois lors de sa visite officielle en Turquie. Christoph Blocher y avait vertement critiqué la loi anti-raciste suisse, regrettant qu’elle ait permis l’ouverture d’une enquête contre l’historien turc Yusuf Halacoglu pour négation du génocide arménien.

A Interlaken, le tribun a fustigé la tendance, de plus en plus fréquente selon lui à «interdir, réprimer, voire falsifier des opinions contraires» au lieu d’en tolérer l’existence.

Il ne s’est en revanche pas exprimé sur le milliard de cohésion pour les nouveaux pays de l’UE, soumis au peuple le 26 novembre. Interrogé sur ce silence par les journalistes, Christoph Blocher a répondu que pour lui, «ce projet ne revêt pas une importance fondamentale pour l’indépendance du pays».

Le président de l’ASIN et député UDC (droite nationaliste) Pirmin Schwander n’en a pas moins recommandé de glisser un non dans l’urne à ce sujet.

«Les fondateurs de l’ASIN ont compris très tôt qu’on évite de discuter ouvertement de l’impasse constituée par l’UE et l’OTAN et que l’on cherche à y adhérer en catimini sans consultation du peuple», a-t-il déclaré.

«Porte-drapeau de la liberté et de l’indépendance», l’ASIN veut introduire dans la constitution la neutralité intégrale, permanente et armée, a rappelé Pirmin Schwander.

L’organisation prépare également une initiative populaire pour le développement des droits populaires et contre la reprise «sournoise» du droit étranger en cas d’adhésion à des traités internationaux.

On rejoue le Grütli

Les participants de la fête ont aussi pu assister à des démonstrations de folklore suisse: agitation de cloches, lancer de drapeaux, jodel, mais aussi un passage de la pièce “Guillaume Tell” relatant le serment du Grütli, l’acte fondateur de la suisse primitive.

La partie officielle s’est achevée, comme il se doit, par un chant en commun de l’hymne national.

swissinfo et les agences

L’ASIN a été fondée le 19 juin 1986 par deux députés du parlement fédéral: Christoph Blocher (UDC, droite nationaliste) et Otto Fischer (radical, droite). Elle est une émanation du comité qui s’était opposé à l’époque à l’entrée de la Suisse aux Nations Unies. Christoph Blocher en a été le président depuis le début, et jusqu’à son élection au gouvernement en 2003.

Son but: s’opposer à l’entrée de la Suisse dans les structures politiques supranationales comme l’ONU ou l’Union européenne (UE).

Son premier grand combat a été une victoire: le 6 décembre 1992, les Suisses refusent l’entrée du pays dans l’Espace économique européen (EEE).

La campagne menée à cette occasion a permis à l’ASIN d’étoffer ses rangs. De 2000 membres au départ, elle est passée en 1992 à 16’000. Aujourd’hui, elle en annonce 46’000.

Après la victoire contre l’EEE, l’ASIN s’est opposée avec succès à l’initiative populaire qui demandait l’adhésion de la Suisse à l’UE. Mais depuis, elle cumule les défaites: que ce soit sur l’espace Schengen, sur l’extension de la libre circulation des personnes aux nouveaux pays de l’UE, sur l’envoi de soldats armés à l’étranger ou sur l’adhésion à l’ONU, le peuple a refusé de suivre ses mots d’ordre.

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