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Plaidoyer pour l’accueil des Ouïgours de Guantanamo

Les actions en faveur des deux frères ouïgours détenus à Guantanamo que le canton du Jura se propose d’accueillir se multiplient. Leur avocate américaine est en Suisse pour défendre leur cause.

«Après avoir passé près de deux ans en cellule d’isolement total et avoir subi un régime de détention très dur, il est normal d’avoir besoin avant toute chose d’être libéré, et ensuite de calme et d’un soutien psychologique», explique Elizabeth Gilson dans un communiqué diffusé par la section suisse d’Amnesty International.

«La Suisse, qui a une grande expérience dans le traitement des victimes de torture, est donc un lieu approprié et les deux frères seraient placés ici entre de très bonnes mains», ajoute l’avocate.

«La Chine cherche apparemment à empêcher par tous les moyens la venue en Suisse de Bahtiyar et d’Arkin, souligne Elizabeth Gilson. Les autorités américaines ont pourtant déjà reconnu depuis 2003 qu’elles avaient commis une grosse erreur en arrêtant les Ouïgours de manière tout à fait arbitraire. Ils attendent depuis des années la libération promise.»

Dans un courrier électronique adressé il y a peu au quotidien Le Matin, l’ambassade de Chine à Berne a déclaré: «Nous espérons que la Suisse pourra refuser de façon claire et nette la réception des personnes susmentionnées.»

Au nom des «excellentes relations de coopération» entretenues par deux «pays amis», l’ambassade espère «que la Suisse pourra, en partant de l’intérêt général des relations d’amitié sino-suisses et de la sécurité des peuples de nos deux pays, comprendre et prendre très au sérieux les préoccupations chinoises». Une position confirmée ce jour à swissinfo.ch par l’ambassade chinoise.

Fort d’une opinion publique qui vibre volontiers aux arguments nationalistes, Pékin est très sensible à tout ce qui touche l’intégrité territoriale de la Chine, à commencer par les expressions séparatistes ou indépendantistes de minorités telles que les Ouigours ou les Tibétains.

Mais telle n’est pas l’unique raison à la réaction du gouvernement chinois. Pour l’expliquer, Nicolas Zufferey souligne en premier lieu les ambiguïtés occidentales que mesure parfaitement bien Pékin : «Les Occidentaux se montrent tiraillés entre leurs intérêts économiques et la défense des droits de l’homme.» Une perche pour des autorités chinoises conscientes du poids croissant de leur économie dans le monde.

Le professeur de langue et de civilisation chinoises à l’université de Genève estime également qu’une démarche plus discrète en Suisse aurait peut-être évité une réaction de l’ambassade de Chine à Berne. «Plus le sujet occupe la une des médias, moins la Chine cédera», estime le chercheur.

Frédéric Burnand, swissinfo.ch

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