La Suisse ne veut pas que le kurde Abdullah Öcalan soit pendu
La Cour de cassation turque a confirmé jeudi la sentence de mort prononcée en juin contre Öcalan. La Suisse demande à Ankara de renoncer à l’exécution du chef rebelle. Les Kurdes de Suisse, eux, manifesteront samedi à Berne sous haute surveillance.
La Cour de cassation turque a confirmé jeudi la sentence de mort prononcée en juin dernier contre Abdullah Öcalan. La Suisse demande à Ankara de renoncer à l’exécution du chef rebelle. Les Kurdes de Suisse, eux, manifesteront samedi à Berne sous haute surveillance.
Pas de surprise donc. La justice turque a confirmé la condamnation d’Abdullah Öcalan pour séparatisme et insurrection, comme prononcé fin juin à l’issue du procès du chef du PKK sur l’île pénitencier d’Imrali. La Suisse, où séjourne une importante communauté kurde, a immédiatement réagi. Elle s’est dit inquiète et demande à Ankara de renoncer à l’exécution du chef indépendantiste kurde. Il devrait être pendu. C’est que même du fond de sa prison, Öcalan reste populaire. En tout cas auprès de la base militante de Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), encore très imprégnée par la culture du «chef unique».
Il semble que les choses soient moins claires au niveau des cadres de ce mouvement de guérilla qui tente une reconversion tardive en tant que parti politique. Des failles apparaissent ça et là. Ainsi, selon une source bien informée, Murad Karaïlan, l’un des principaux généraux du PKK aurait demandé l’asile politique aux Pays-Bas. Une demande confirmée jeudi par le Ministère de la justice hollandaise.
L’indignation dans les milieux kurdes est, bien entendu, à son comble. Samedi, des manifestations sont prévues dans les grandes villes européennes. A Berne, un rassemblement pacifique se déroulera sous haute surveillance policière. Depuis que des militants kurdes avaient fait une intrusion à l’ONU, à Genève, en février dernier, après l’arrestation d’Öcalan, des soldats de milices ont été engagés pour renforcer la surveillance des missions diplomatiques étrangères. Si leur nombre a été réduit – leur retrait définitif devrait s’achever début décembre, ils vont encore faire partie du dispositif.
Sans compter les mesures particulières prises autour d’endroits «sensibles», à Genève comme à Berne. Et ce, même si à l’Office fédéral de la Police, on affichait jeudi une certaine sérénité. Rolf Schatzmann, chef du service du sécurité de l’administration fédérale, indiquait récemment qu’il comptait sur «le sang-froid des militants du PKK».
Le sort d’Öcalan est désormais dans les mains de la communauté internationale. Elle peut encore faire pression sur un pays qui aspire à entrer dans l’Europe. Il dépend également de la décision du parlement turc. Comme du rôle décisif que peut jouer le premier ministre. Bulent Ecevit affiche clairement son opposition à la peine capitale. Pour l’heure, les avocats d’Öcalan vont faire appel à la Cour européenne des droits de l’Homme. Ils demandent un nouveau procès en soulignant les entraves mises dans leurs contacts avec leur client et le fait que sa capture et son arrestation au Kenya étaient illégales.
Sera-ce suffisant pour stopper le compte à rebours macabre? Personne n’ose, pour l’heure, un pronostic. Si ce n’est que l’exécution d’Öcalan ne servira pas à résoudre politiquement le problème kurde. Avec ce constat amer: «Malgré le cessez-le-feu décrété par le PKK et le retrait de ses troupes, une guerre à huis clos continue», souligne Mme Werdi, de l’Institut kurde à Paris. Avec chaque jour son lot de morts. Comme jeudi à Diyarbakir, où plusieurs personnes ont été tuées au cours d’affrontements.
Jugurtha Aït-Ahmed

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