Le CICR tient un plaidoyer contre la torture
Pour le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), l’interdiction de la torture est absolue. Son président l’a rappelé dans un discours très ferme.
Jakob Kellenberger estime qu’il n’existe aucune justification à la torture, même pour des raisons de sécurité.
Dans un discours très ferme prononcé mercredi à Genève en session plénière de la Commission des droits de l’homme, et consacré exclusivement au traitement des prisonniers, Jakob Kellenberger a appelé solennellement tous les Etats à respecter les principes fondamentaux d’humanité et de dignité de tous les individus.
«L’interdiction de la torture et des autres formes de mauvais traitements cruels et inhumains, physiques et mentaux, en toutes circonstances, est absolu», a affirmé le président du CICR.
Jamais justifiées
Les pratiques de mauvais traitements à l’encontre des détenus sont non seulement illégales en droit humanitaire et dans le droit international, mais elles violent les principes de base d’humanité. «Elles ne sont jamais moralement justifiées», a insisté le président du CICR.
«Nous continuons d’entendre certaines voix selon lesquelles des individus ne méritent pas d’être traités avec humanité, à cause des actes horribles dont ils sont suspectés ou des crimes dont ils sont accusés. Un tel raisonnement doit être rejeté», a affirmé Jakob Kellenberger.
«Personne n’est au-dessus des lois», a-t-il dit. Il a constaté une détérioration dans le traitement des prisonniers ces dernières années et des «conditions de détention souvent inacceptables».
Prolifération dangereuse
«Même la plus légère acceptation de mauvais traitements» à l’encontre des détenus risque d’engendrer une prolifération de ce type de pratiques, a fait remarquer Jakob Kellenberger. Selon l’expérience du CICR, «très souvent, ils aliènent la sympathie de la population dont font partie les détenus, créant un potentiel pour une escalade de la violence».
«Quand une partie au conflit recourt à des mauvais traitements, l’autre partie en tire prétexte pour faire de même. Cette pratique a ainsi tendance à se répandre», a souligné le président du CICR.
«La menace d’une propagation de la torture et d’autres formes de mauvais traitements l’emporte sur n’importe quelle justification de son utilisation», a-t-il ajouté.
Il a insisté également sur le principe du respect de non-refoulement. Des détenus ne doivent pas être transférés dans un pays où ils risquent de subir des mauvais traitements, a-t-il dit.
Il a également souligné qu’il est essentiel que le personnel pénitentiaire ait la formation suffisante pour traiter les détenus avec humanité.
Tous les prisonniers doivent par ailleurs être enregistrés, «pour qu’ils ne deviennent pas des disparus». Ils doivent aussi être emprisonnés dans des lieux officiels de détention, être informés des raisons de leur détention et faire l’objet de procédures légales et indépendantes, a rappelé Jakob Kellenberger. I
Enfin, Jakob Kellenberger a indiqué que le CICR n’a pas l’intention de changer sa pratique de confidentialité qui consiste à faire directement des recommandations aux autorités responsables.
Visites à 570’000 détenus
«Seulement dans certaines circonstances exceptionnelles, quand toutes les autres possibilités de dialogue sont épuisées, quand la situation humanitaire demeure très grave, le CICR peut rendre publiques ses observations», a toutefois ajouté le président.
En 2004, les délégués de l’institution ont visité plus de 570’000 détenus dans 2400 places de détention de 80 pays. Jakob Kellenberger s’était rendu en février à Washington où il avait rencontré le président George W. Bush et les responsables américains.
Plusieurs rapports du CICR publiés par la presse américaine ont fait état l’an dernier d’actes de tortures et de mauvais traitements par les autorités pénitentiaires américaines à l’encontre de détenus suspectés d’actes terroristes à Guantanamo et en Irak, notamment dans la prison d’Abou Ghraib.
swissinfo et les agences
Le CICR a visité plus de 570’000 détenus en 2004
Les inspections ont eu lieu dans 2400 places de détentions de 80 pays
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