Aujourd’hui en Suisse
Helvètes du monde, bonjour,
Que vous ayez ou non fait du latin, vous avez forcément entendu parler de la «Lex Netflix», soumise en votations le 15 mai. Nos deux interviews pour et contre vous aideront à faire le point pour qu’alea jacta est.
Je vous propose également de vous pencher sur une nouvelle initiative dont le but sera d’introduire un service civil pour toutes et tous – et peut-être un peu aussi renflouer les rangs de l’armée. Elle est lancée alors que la guerre fait rage et que la Suisse refuse que l’Allemagne livre à l’Ukraine des munitions fabriquées ici.
Bonne lecture,
Les Suisses se prononcent le 15 mai prochain sur une modification de la loi sur le cinéma. Dans deux interviews, des représentantes du camp du oui et du non livrent leurs arguments.
Le projet surnommé «Lex Netflix» veut contraindre les plateformes de streaming comme Netflix, Amazon ou Disney à financer la création de films et de séries suisses à hauteur de 4% de leur chiffre d’affaires réalisé dans le pays.
Pour la députée verte et secrétaire générale de la Fédération romande des consommateurs (FRC) Sophie Michaud Gigon, l’argument selon lequel les prix des abonnements augmenteraient si la loi était acceptée est infondé: «Il n’y a pas de corrélation entre l’introduction d’obligations d’investissement et les prix pratiqués par les plateformes.»
Elle imagine également mal l’une de ces plateformes restreindre son offre afin de devoir moins investir, car cela reviendrait à laisser des parts de marché aux autres plateformes. En outre, elle regrette que les importants profits que réalisent ces plateformes en Suisse partent à l’étranger. «Grâce à la nouvelle législation, une partie de leurs recettes sera investie chez nous», assure-t-elle.
Un avis que ne partage pas la coprésidente des Jeunes Vert’libéraux Virginie Cavalli, pour qui le cinéma suisse ne doit pas chercher son salut dans la Lex Netflix. Elle pense qu’il est «déjà largement subventionné par les pouvoirs publics» mais qu’il «peine à trouver son public».
Virginie Cavalli considère également qu’une obligation de diffuser 30% de contenus produits en Suisse ou en Europe pénaliserait les services de vidéo à la demande qui offrent du contenu spécifique: «On peut penser à des plateformes spécialisées dans les mangas, dans les films indiens ou même dans les films pornographiques. Elles seront aussi soumises à cette loi et auront des difficultés à la respecter».
- Contre: «Le cinéma suisse n’a pas besoin d’argent supplémentaire pour avoir du succès»
- Pour: «La Lex Netflix pourrait donner une visibilité internationale à des séries suisses»
- Le financement du cinéma suisse par les géants du streaming se joue dans les urnes
Plus
Un comité a lancé mardi une initiative populaire pour introduire un service citoyen pour toutes et tous. Il souhaite que chaque personne en Suisse effectue au moins une fois dans sa vie un engagement pour la collectivité.
Pour le comité interpartis, «l’initiative franchit une double étape historique. Elle concrétise l’égalité entre les genres dans le service à la collectivité et reconnaît les formes civiles d’engagement comme équivalentes au service militaire». Il précise que l’engagement des étranger-es serait également réglé dans la loi.
Si l’initiative «Pour une Suisse engagée», dite initiative service citoyen, remporte un large soutien politique, il n’en va pas forcément de même pour la population. Selon une enquête du Département de la défense (DDPS), celle-ci est plutôt réticente à l’obligation de servir pour les femmes, tant que l’égalité n’est pas atteinte dans d’autres domaines.
Le DDPS examine pourtant diverses pistes allant dans cette direction, dans le but d’assurer des effectifs suffisants dans l’armée et dans la protection civile. L’une des options envisagées serait d’obliger les femmes à participer à la journée d’information, afin de les motiver à s’engager.
- Une initiative souhaite un service citoyenLien externe pour toutes et tous (RTS)
- Le service militaire a la cote auprès des jeunes expatrié-es
- Est-il légal d’astreindre tout le monde à un service citoyen?
- Peut-on refuser d’accomplir son service militaire en Suisse?
Le Secrétariat d’État à l’économie (Seco) a interdit à l’Allemagne de fournir à l’Ukraine des munitions de fabrication suisse. Le président du Centre Gerhard Pfister accuse le gouvernement de «non-assistance à l’Ukraine».
En 2014, l’Allemagne a livré aux Kurdes des munitions pour fusil d’assaut fabriquées par l’entreprise suisse Ruag. Aujourd’hui la Suisse a rejeté deux demandes de ce même pays de livrer à l’Ukraine des munitions achetées en Suisse. Alors, deux poids, deux mesures?
Eh bien non. Car les munitions de 2014 avaient été fabriquées par Ruag en Allemagne. Le Seco n’était alors pas compétent. Cette fois, les munitions ont été produites en Suisse et livrées directement au gouvernement allemand. Le Seco invoque donc la loi sur le matériel de guerre et la neutralité suisse.
Pour le Centre, la Suisse ne peut pas constamment se cacher derrière sa neutralité. Pour le chef du groupe parlementaire Philipp Matthias Bregy, «l’Occident est actuellement défendu en Ukraine, la Suisse y compris». Il s’agit dès lors d’une décision politique que le parti enjoint le Conseil fédéral de prendre, sous peine de «non-assistance» à l’Ukraine, selon Gerhard Pfister.
- Munitions suisses: Les KurdesLien externe en ont reçu et les Ukrainiens, pourquoi? (Watson)
- Une partie du CentreLien externe exige que la Suisse envoie des armes en Ukraine (Blick)
- SchweizLien externe verhindert deutsch Waffenlieferung in die Ukraine (Sonntagszeitung, en allemand)
- Tous nos articles de fond sur la guerre en Ukraine
Les cas de xénophobie à l’école sont en forte hausse. C’est un rapport de la Commission fédérale contre le racisme (CFR) de l’organisation Humanrights.ch qui le dit.
Outre la xénophobie générale, le racisme lié à la couleur de peau reste la forme de discrimination la plus fréquente en Suisse. Les centres de consultation de la CFR et de Humanrights.ch ont enregistré 630 cas, le chiffre le plus haut jamais constaté jusqu’ici. La population noire en est la première victime.
Parmi ces cas, la hausse est particulièrement forte au sein des établissements scolaires. Pour Gina Vega, responsable du service Discrimination et racisme chez Humanrights.ch, «le comportement des enfants est le reflet de ce qui leur est transmis.» Les parents et les enseignant-es doivent prendre conscience de leur rôle de modèle et de l’influence qu’ils ont sur les plus jeunes.
Martine Brunschwig Graf, présidente de la Commission contre le racisme, critique quant à elle une minimisation presque systématique du problème: «Souvent, la discrimination est classée comme un problème relationnel.» Elle déplore le manque de moyen des écoles, celles-ci ne disposant ni de concepts ni de personnel enseignant formé pour y faire face.
- RacismeLien externe à l’école (Blick)
- Profilage racial, discriminations: en Suisse, un racisme structurel existe aussi
- Le racisme vu sous l’angle historique
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