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Un civil à la tête des renseignements: le Conseil fédéral devra trancher

La délégation des commissions de gestion du Parlement a rendu son rapport. Tirant les conclusions des affaires Bellasi et Regli, elle souligne le manque de contrôle politique et elle propose au gouvernement de procéder à une réforme en profondeur.

La délégation des commissions de gestion du Parlement a rendu mercredi son rapport. Tirant les conclusions des affaires Bellasi et Regli, elle souligne le manque de contrôle politique et les dysfonctionnements des services de renseignements. Elle propose au gouvernement de procéder à une réforme en profondeur.

En exigeant la création d’un Coordinateur des services de renseignements, ayant rang de secrétaire d’Etat avec la possibilité d’accès direct au gouvernement «sans filtre ni censure», la délégation des commissions de gestion du Parlement fait plus que de placer le Conseil fédéral devant ses responsabilités. Il met le doigt sur un principe inexistant dans les systèmes totalitaires et complexe à mettre en pratique dans les Etats de droit comme la Suisse: la primauté du politique sur le militaire en matière de renseignements stratégiques. Même si les affaires Bellasi et Regli sont distinctes à plus d’un titre, elles ont le mérite de souligner l’urgence d’une restructuration et d’un renforcement des services de renseignements. Et il revient au Conseil fédéral, trop laxiste jusqu’à maintenant, de définir une mission politique claire et prévoir un contrôle régulier des services de renseignements. Et de leurs employés.

Justement, pour les enquêteurs, l’affaire Bellasi, du nom de cet ancien comptable qui a détourné plus de huit millions de francs au sein du Groupe des renseignements (Grrens), fait partie des dossiers qui ont contribué à ternir l’image de la Suisse. Une affaire d’escroquerie «relativement banale» qui, aux yeux des enquêteurs, a révélé l’«extrême fragilité» et le malaise profond que traverse le Grrens. Une situation attribuée à une culture militaire qui met mal à l’aise les employés civils, provoquant de nombreuses démissions dans leur rang.

L’autre dossier chaud disséqué par les enquêteurs concerne la Suisse et ses relations avec l’Afrique du Sud du temps de l’apartheid. La délégation des commissions de gestion du Parlement estime que l’ex-chef des services secrets, Peter Regli, et le laboratoire AC de Spiez n’ont pas participé à l’élaboration du programme d’armement chimique et biologique du régime de l’apartheid dirigé par Wouter Basson, le Dr Mengele sud-africain. Elle relève que les relations entre les deux services secrets étaient opportunes, malgré le régime de l’apartheid. Car, la guerre froide aidant, elles permettaient notamment à la Suisse d’obtenir des informations sur l’armement russe utilisé en Angola. Un regret des enquêteurs: les procès-verbaux des rencontres avec les services secrets sud-africains ont été détruits, sans que le département de la Défense en soit avisé. Une situation qui illustre à merveille les lacunes en matière de directives politiques claires.

Le rôle d’un informateur, nommé Juerg Jacomet, (décédé en 1998), bénéficiant d’une autorisation de vendre du matériel de guerre, pose problème. Il a organisé une rencontre entre Wouter Basson et Peter Regli dans le bureau de ce dernier à Berne. La délégation reproche à Peter Regli d’avoir accordé peu d’importance à la surveillance des personnes collaborant de manière informelle.

Tirant les conclusions de ces deux affaires, Peter Tschopp, vice-président de la délégation, a affirmé que le Grrens «devait cesser de fonctionner comme un îlot qui définit son rôle et ses propres tâches». Il a prié le Conseil fédéral de tirer les conséquences des recommandations de la délégation en réorganisant sans délai les services de renseignements. Une réorganisation qui passe par la démilitarisation des services, en plaçant à leur tête un civil.

Jugurtha Aït-Ahmed

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