Le chèque Reka, l’argent des vacances
Malgré la morosité de la branche du tourisme, la Caisse suisse de voyage Reka parvient à tirer son épingle du jeu en proposant des vacances des prix avantageux.
En 2003, la Reka a vendu ses chèques à deux millions de Suisses, pour une valeur de plus de 500 millions de francs. Un record.
La Reka est unique au monde et illustre le pragmatisme des Suisses lorsqu’il s’agit de combiner finances et divertissements.
La Caisse suisse de voyage (Reka) a été fondée en 1939 sous la forme d’une coopérative.
L’idée était alors de «favoriser et de faciliter l’organisation des congés, spécialement les vacances et les déplacements d’une population disposant de moyens financiers limités», comme l’indique la publication commémorative de ses 50 ans.
Une idée, deux stratégies
En fait, les Suisses ont pris au sérieux une convention internationale signée en 1936. Celle-ci prévoyait pour la première fois des congés payés en faveur des travailleurs – un instrument politique dans une période troublée.
C’est pourquoi, dès le départ, la Reka a fait l’objet d’un partenariat social entre le patronat, la branche touristique et les syndicats.
Elle est donc différente d’Hotelplan, coopérative également créée dans les années 30 par le fondateur de la Migros, Gottlieb Duttweiler.
Les deux coopératives avaient pour but de rendre les voyages moins chers, une nécessité dans ces années 30 marquées par une terrible crise économique. Mais si le but était le même, les moyens ont divergé.
Hotelplan a misé sur des séjours hôteliers avantageux. La Reka a de son côté choisi de diffuser des chèques servant à constituer une épargne pour les vacances.
Un «sucre» salarial
L’aspect de partenariat social établi entre la Reka et les différents acteurs du monde du travail se manifeste d’une façon évidente: 65% des chèques vendus sont en fait distribués – sous forme de bonus salarial – par des dirigeants d’entreprises à leurs propres employés.
Les employés peuvent également acheter des chèques à prix réduit, la différence étant payée par l’employeur.
En moyenne, les chèques permettent une réduction de 16%. Ainsi, en employant ces chèques, un voyageur ne paie par exemple que 84 francs pour une prestation qui en vaut en fait 100.
Ces chèques offrent par ailleurs un avantage fiscal. Distribués sous cette forme, les bonus salariaux ne sont en effet pas taxés.
Deux millions d’utilisateurs
A lui seul, le grand distributeur Coop écoule un quart des chèques Reka. «Mais au total, ce sont 2700 entreprises qui écoulent nos chèques et, parmi elles, sept des dix plus grandes entreprises suisses», précise Roland Lymann, vice-directeur de la Reka.
Environ 2 millions de personnes en Suisse utilisent chaque année ces chèques très semblables à des billets de banques.
Ceux-ci sont acceptés par plus de 6500 prestataires de services dans la branche du tourisme: cela va des gares CFF aux remontées mécaniques en passant par les hôtels et les restaurants.
Mais la Reka s’adapte également à son époque. Dès 2006 au plus tôt, les paiements pourront se faire également au moyen d’une carte électronique Reka.
Une œuvre sociale
En 2003, les entreprises qui participent au réseau de la Reka ont accordé des réductions pour une valeur de 73 millions de francs. A ce montant s’ajoutent 11 autres millions fournis par la Reka elle-même.
La caisse dispose en effet de réserves financières. De nombreuses personnes qui achètent des chèques ne les utilisent pas tout de suite, mais les conservent pour des vacances ultérieures.
La Reka a donc encaissé la valeur des ces chèques auprès des acheteurs, mais n’a pas encore eu à les rembourser aux divers prestataires de services.
Cet argent est placé et produit des intérêts, d’où la constitution d’une réserve qui, en 2003, atteignait environ 270 millions de francs.
La Reka utilise une partie de cet argent dans un but social. Ainsi, cette année, 2,5 millions de francs ont été prévus pour aider quelque 1000 familles à bas revenus et familles monoparentales à prendre des vacances.
Une formule qui marche
La Reka finance également des infrastructures destinées à accueillir les familles. Les premières constructions ont débuté en 1954, à une époque où les infrastructures touristiques n’étaient pas suffisantes, et n’ont cessé de prendre de l’importance depuis.
Les villages et les maisons de vacances Reka sont spécialement conçus pour les familles. En plus d’un rapport qualité-prix très favorable, ces logements offrent aussi toute une série de prestations gratuites.
Grâce à cette stratégie, la Reka a obtenu de très bons résultats. Les appartements situés dans ses villages de vacances présentent un taux d’occupation annuel situé entre 70 et 90%.
Aujourd’hui, la caisse possède au total 18 villages de vacances en Suisse et à l’étranger. En Suisse, la coopérative dispose de 500 appartements dans ses propres villages, de 713 autres appartements loués à des tiers et de 240 fermes.
En 2003, la location de ces appartements a rapporté plus de 36 millions de francs. A elles seules, les locations en Suisse ont rapporté 23 millions.
40% de réservation via Internet
Ses résultats peuvent faire des envieux dans un secteur touristique en plein marasme. Le Secrétariat d’Etat à l’économie (seco) a donc décidé de soutenir, via son programme «innotour», l’initiative de la Reka pour relancer le secteur.
Le but est de rechercher de nouvelles offres et de nouveaux débouchés commerciaux, notamment via le réseau Internet. Et les perspectives sont alléchantes. «Désormais, 40% des réservations sont faites via Internet», affirme Roland Lymann.
swissinfo, Alexander Künzle
(traduction: Olivier Pauchard)
En 2003, la Reka a vendu des chèques pour un total de 493,1 millions de francs.
Plus de 2 millions de personnes les ont utilisés.
Ils sont acceptés par 6500 entreprises du tourisme.
La Reka propose 500 appartements en location, 713 en sous-location et 240 gîtes ruraux.
– La Reka est la plus importante organisation suisse pour l’aide aux vacances.
– Elle tire ses ressources des ses activités (chèques et vacances Reka) ainsi que de donations privées.
– Les membres de la coopérative – employeurs, syndicats, branche du tourisme et des transports – renoncent à une rémunération du capital social.
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