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Les assureurs déboussolés par l’hyperterrorisme

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2001 aura été l'annus horribilis du secteur des assurances. C'est vrai, en autres, pour Swiss Re, qui a publié mercredi ses résultats annuels.

Une perte de 165 millions de francs: c’est ce qu’a annoncé, à Zurich, Swiss Re, la Compagnie suisse de Réassurance, l’un des géants mondiaux. Il faut se rendre à l’évidence. 2001, avec les attentats du 11 septembre, aura un effet durable sur le secteur de l’assurance.

Les attaques terroristes contre les Etats-Unis ont constitué le sinistre des sinistres. «Le plus grand jamais enregistré dans l’histoire de l’assurance», relevait il y a quelques mois déjà Swiss Re, en évaluant la facture totale des attentats à quelques 90 milliards de dollars.

Toute la donne a changé

Conséquence: les assureurs ont relevé leurs primes, parfois de manière drastique, comme par exemple dans le domaine du trafic aérien. Pour Swiss Re, qui joue le rôle d’assureur des assureurs, les tarifs ont globalement augmenté au 1er janvier de plus de 15%.

Les conditions d’assurance ont également changé. Il est tout simplement devenu difficile de s’assurer contre ce genre d’événements. «D’une manière générale, on peut dire qu’après le 11 septembre la couverture contre les risques terroristes est très limitée», confirme un porte-parole de Swiss Re.

Mais l’impact du 11 septembre est encore plus fondamental. L’hyperterrorisme déboussole les assureurs. «Ce type de risque est devenu virtuellement impossible à mesurer, à la fois en termes d’intensité et de fréquence», explique Swiss Re dans une étude consacrée au «nouveau spectre» du terrorisme.

L’union fait la force

Face à ce défi, certains assureurs ont décidé d’unir leurs forces. Six sociétés européennes, dont les Suisses Zurich Financial Services et Swiss Re, ont ainsi annoncé la semaine passée la création d’une compagnie commune, Special Risk Insurance and Reinsurance, basée au Luxembourg.

Son but: offrir une couverture contre le terrorisme sur le continent européen. Mais les limites restent strictes. Les dommages ne sont couverts, par exemple, que dans un rayon de 600 mètres autour de l’objet assuré, pour un montant plafonné à 275 millions d’euros.

Autant dire que ce genre d’initiative est loin de régler le problème. L’autre piste, c’est de faire appel à l’Etat, pour endosser le rôle d’assureur de dernier recours. Ainsi, la Confédération avait, à la fin de l’année passée, offert sa garantie aux compagnies aériennes suisse. Mais le Conseil fédéral avait décidé d’y mettre un terme en décembre.

S’associer avec l’Etat dans certains domaines

L’Etat-réassureur, même temporairement? C’est l’idée lancée après le 11 septembre aux Etats-Unis, mais qui doit encore passer le cap du Sénat. En Europe, trois pays – la Grande-Bretagne, l’Espagne et la France – disposent déjà de mécanismes de ce genre: couverture des risques terroristes, avec participation de l’Etat.

Et en Suisse? Va t-on également vers ce type de partenariat public-privé? Les acteurs du dossier restent discrets. Mais les choses bougent. L’Association suisse d’assurances (ASA) a mis sur pied un groupe de travail qui réunit les principaux assureurs concernés.

L’objectif est de faire en sorte que le marché puisse proposer une solution aux clients suisses face au risque terroriste. «La branche de l’assurance souhaite une solution sans l’Etat, autant que possible, déclare Mathias Berger, de l’ASA. Mais il y a des domaines où l’Etat joue déjà un rôle, comme dans le cas des centrales nucléaires.»

Le sujet est d’actualité à Berne également. Là aussi, un groupe de travail planche sur la question de la couverture de ce type de risques. L’Office fédéral de l’aviation civile, ainsi que celui des assurances privées y participent, sous la coordination du Département fédéral des finances. Une position de la Confédération devrait ainsi se dégager. A suivre, donc.

swissinfo/Pierre Gobet, Zurich

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