Les liens controversés du mouvement anti-IVG
Derrière le comité «pour la mère et l'enfant» se profile une mission intégriste d'Afrique du Sud. Ce que dément l'association anti-avortement.
«La mission Kwasizabantu est la force la plus importante derrière l’initiative pour la mère et l’enfant. Mais ce lien reste inconnu.» Cette affirmation est de Jürg Frischknecht.
Ce journaliste alémanique a rédigé en 1998 un ouvrage sur les mouvements de droite. Il y parle notamment de l’association «pour la mère et l’enfant», auteur de l’initiative du même nom. Celle-ci préconise une interdiction quasi-totale de l’avortement.
A l’époque, déjà, Jürg Frischknecht mentionnait le fait qu’«un tiers du comité d’initiative a un passé connu». Aujourd’hui, toujours selon lui, rien n’a changé.
Une association indépendante
Plus en détails, le comité d’initiative de ce mouvement opposé à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) compte 27 personnes. Elles «travaillent, en majorité, dans les milieux médico-sociaux», précise Magali Wittwer-Boyer, présidente de l’association.
Le mouvement a toujours été catégorique: les membres de son comité directeur se sont engagés à titre personnel. Et officiellement, l’association est indépendante de tout autre mouvement, religieux ou politique.
Mais Jürg Frischknecht présente les choses un peu différemment. Selon lui, plusieurs de ces 27 personnes ont des liens étroits avec Kwasizabantu.
Cette mission a été créée en 1966 en Afrique du Sud, par un pasteur sud-africain d’origine allemande, Erlo Stegen. Son siège helvétique est à Kaltbrunn, dans le canton de Saint-Gall, où une école privée a été fondée.
Ce mouvement chrétien fondamentaliste prêche une morale très stricte – notamment en matière sexuelle. Il est également relié avec d’autres associations satellitaires, parmi lesquelles «Christians for Truth».
L’ombre de l’Opus Dei
D’autres membres seraient actifs dans différentes organisations. L’un d’eux ferait ainsi partie de l’Opus Dei.
Ces révélations ont aussi été publiées dans plusieurs journaux alémaniques. Et en particulier la NZZ am Sonntag, qui, en citant l’un de ses anciens membres, précise que la mission Kwasizabantu «possèderait de l’argent en suffisance».
L’association a confirmé dans le quotidien 24 Heures la présence de quatre «sympathisants» de la Mission Kwazisabantu dans son comité d’initiative.
Le porte-parole du mouvement s’empresse d’ajouter que la mission n’est pas à l’origine du mouvement. Auquel elle n’a, souligne encore Christoph Keel, pas versé un seul centime.
Une campagne de dénigrement?
La présidente de l’Association surrenchérit: «après vérification, je peux vous confirmer qu’il n’y a aucun membre de cette association dans notre comité. Nous agissons en tant que personnes indépendantes.» Bref, il ne faut pas confondre membre et sympathisant.
«Les médias ne sont pas favorables à notre initiative et cherchent à nous dénigrer», poursuit la présidente. Dans un droit de réponse publié dans la NZZ am Sonntag, l’association insiste finalement sur le fait que la mission Kwasizabantu n’est pas la force importante du mouvement.
L’association n’a cependant pas l’intention de porter plainte. «Cela n’en vaut pas la peine, je dédie le temps qu’il me reste à faire connaître notre initiative et ses enjeux, plutôt qu’à des procédures juridiques», conclut Magali Wittwer-Boyer.
swissinfo/Caroline Zuercher

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