Les Suisses de l’étranger, des citoyens de seconde zone?
Comment la Suisse peut-elle s’assurer que ses citoyennes et citoyens à l’étranger ne soient pas moins bien traités que ceux qui vivent au pays? On pense ici aux élections et votations, mais pas uniquement. Les expatriés sont aussi défavorisés quand ils traitent avec les banques suisses.
Lorsqu'il s'agit de leurs droits politiques, l’Organisation des Suisses de l’étranger (OSE) n’hésite pas à parler de «citoyens de seconde classe» et de «discrimination». Car le problème n’est toujours pas résolu: dans de nombreux endroits du monde, il n’est tout simplement pas possible de recevoir et de renvoyer le matériel de vote par la poste dans les délais. Nous révélons ici combien de citoyennes et citoyens de l'étranger sont concernés et à quoi pourrait ressembler une solution sans vote électronique.
L’ancien espoir de nombreux expatriés de voir la révolution numérique se traduire également par une numérisation de la démocratie s’est désormais envolé. Cet espoir avait germé dès 2003, avec les premiers essais – encore limités – de vote électronique. Mais, en raison de lacunes au niveau de la sécurité, tout s’effondre en 2018. Le monde politique réagit alors, la résistance donne de la voix: «Notre démocratie n’est pas un sujet d’expériences».
En 2019, le vote électronique se trouvait donc de nouveau à la case départ. Mais une question reste à ce jour sans réponse: le droit de vote des Suisses de l'étranger implique-t-il une obligation pour l'État de le rendre possible dans la pratique ?
En 2020, la pandémie de coronavirus est arrivée. Dans les coulisses, loin des gros titres de la presse, les progrès réalisés témoignent du travail tranquille et régulier de l'OSE.
Il est une autre particularité que la Cinquième Suisse ressent certainement comme une discrimination: au contraire de la France par exemple, la Suisse n’a pas de représentation permanente, ou garantie, des expatriés aux Chambres fédérales. Étonnant au vu de la taille de l’électorat que représentent les Suisses de l’étranger. Avec près de 205'000 inscrits sur les listes, ils ont la force d’un canton suisse de taille moyenne.
Jusqu’ici, les tentatives pour faire avancer les choses en termes de représentation ont été plutôt timides. Et cela se comprend quand on sait que même les demandes les plus modérées de la Cinquième Suisse se sont régulièrement heurtées à des vents contraires ces dernières années, comme nous avons pu le démontrer dans une analyse approfondie de la dernière législature (2015-2019):
Une tout autre discrimination que subissent les Suisses de l’étranger – et pour des raisons totalement différentes – concerne leurs rapports avec les banques suisses. Pour y avoir un compte, ils sont astreints à des dépôts minimums élevés et des frais exorbitants. Parfois même, ils se voient carrément refusés. Avec l’échange automatique d’informations – introduit sous pression américaine -, les banques suisses ont commencé après 2008 à rompre leurs relations avec leurs clients établis à l’étranger. Ou bien ils les ont fâchés en augmentant les frais.
Une politique qui touche particulièrement les expatriés. Via leur organisation, l’OSE, ils ont lancé plusieurs propositions au Parlement pour obliger les établissements bancaires à faire des concessions. Mais dans le monde politique, la position majoritaire est de ne pas trop laisser l’État se mêler des affaires des entreprises privées.
L'OSE elle-même est également confrontée à des défis importants. La légitimité démocratique du Conseil des Suisses de l'étranger est de plus en plus remise en question. On l'appelle souvent le Parlement de la Cinquième Suisse. Il s'agit en grande partie d'un organe composé de délégués des différentes associations de Suisses de l'étranger. Aujourd'hui, il a besoin d'un système électoral qui permette une élection plus représentative et démocratique.
Cette question risque d'occuper l'OSE pendant les prochaines années. Le changement est nécessaire, et il ne peut être simplement apporté de manière centralisée ou imposé d'en haut.
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