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Ces envahisseurs qui menacent la biodiversité

Le Solidage du Canada est sur la liste noire des plantes invasives. www.unige.ch

La journée internationale des Nations Unies pour la biodiversité a mis l'accent jeudi sur la gestion des plantes invasives.

La Suisse répertorie onze espèces envahissantes. Mais la situation semble être sous contrôle.

Les espèces envahissantes sont des plantes – ou des animaux – exotiques capables de coloniser rapidement les lieux où ils ont été introduits.

Leur point fort: une grande capacité d’adaptation. Au point que ces envahisseurs parviennent à supplanter les espèces locales. Et c’est justement à ce titre, qu’ils sont considérés comme un danger pour la biodiversité de la planète.

Ce problème devient préoccupant en Europe. Et cela même s’il ne se pose pas de façon aussi dramatique qu’en Afrique où la jacinthe et la laitue d’eau asphyxient déjà les lacs, tuent les poissons et menacent les ressources hydriques.

Inquiétudes helvétiques

La Suisse, qui compte quelque 300 espèces non indigènes, est aussi concernée dans une moindre mesure. Une liste des espèces envahissantes, ou susceptibles de le devenir, répertorie au moins onze plantes invasives. Seize autres y sont cataloguées comme des espèces en expansion.

«Globalement, les plantes invasives ne représentent pas un vrai problème, souligne Erich Kohli, chef de la section Protection des espèces et des biotopes à Office fédéral de l’environnement des forêts et du paysage(OFEFP).

«Mais, elles perturbent déjà l’écosystème de certaines zones protégées où elles représentent une menace pour des espèces fragilisées, note Erich Kohli. C’est le cas du Solidage du Canada qui devient particulièrement envahissant dans les zones de bas marais du canton de Zurich.»

«En fait, explique-t-il, on ne peut pas dire que les plantes invasives portent directement atteinte à la biodiversité. Mais, associées à la pression de l’activité humaine, qui reste de loin le principale danger, elles contribuent à menacer l’équilibre naturel de certaines régions.»

Le règne de l’inconnu

La situation est d’autant plus difficile à gérer que, malgré leurs efforts, les scientifiques ne sont pas parvenus à trouver un dénominateur commun qui expliquerait leur capacité expansionniste.

«Les plantes invasives apparaissent le plus souvent dans des zones perturbées par l’homme, explique Erich Kohli. Mais elles peuvent également profiter d’un déséquilibre occasionné par des catastrophes naturelles comme les crues qui modifient la nature du sol.»

L’absence de prédateurs

Les scientifiques s’accordent à dire que leur expansion est en outre favorisée par l’absence de prédateurs ou de parasites spécifiques dans leur pays d’adoption.

Ils estiment également que les changements climatiques – le réchauffement planétaire en particulier – favorisent probablement l’acclimatation des espèces tropicales.

«On constate que certaines espèces exogènes ont cohabité avec la végétation locale durant de nombreuses années sans poser de problèmes», précise Erich Kohli.

Subitement, «sans que l’on puisse vraiment savoir pourquoi, elles rentrent dans une phase d’extension quasi incontrôlable.»

Et Erich Kohli de citer un cas exemplaire: celui du Robinier, une espèce d’Acacia implanté en Suisse depuis plus de 250 ans. Et qui connaît actuellement une prolifération particulièrement importante dans les Alpes méridionales et au Tessin.

Le principe d’autorégulation

Inversement, certains envahisseurs se voient subitement détrônés après des années de forte prolifération. Sans que l’on en comprenne les raisons.

«C’est le cas de l’Elodea Canadensis, affirme Erich Kohli. Après avoir colonisé les zones humides, notamment au Nord-est de la Suisse mais aussi sur le plateau et au Tessin, celle que l’on appelle encore la Peste d’eau a largement perdu du terrain.» Au point d’être rayée de la liste noire des plantes invasives.

Cette situation illustre les limites du savoir scientifique en la matière. «Les scientifiques ne peuvent que constater que l’autorégulation de la nature se fait parfois en faveur des espèces locales.»

La nature possède des pouvoirs d’assimilation ou d’autogestion qui supplantent bien souvent le savoir-faire humain.

Au point que certains s’interrogent déjà sur le bien fondé de la lutte contre les espèces invasives. D’autant plus que cette bataille est difficile et coûteuse.

Un combat difficile

En effet, pour intervenir efficacement sans nuire à l’écologie, il faut définir un plan d’action propre à chaque site. «Dans certains cas nous pouvons utiliser des herbicides. Dans d’autres, il faut procéder par arrachage mécanique ou manuel des plantes et veiller à les brûler pour éviter toute contamination», explique Erich Kohli.

Pour l’heure, la Confédération n’a ni budget ni plan spécifique de lutte contre ces végétaux, lance Erich Kohli.

«Nous nous contentons d’intervenir dans les zones protégées afin de préserver les espèces rares susceptibles d’être supplantés par les espèces tropicales. Nous remplissons ainsi nos engagements internationaux en matière de préservation de la biodiversité», conclut Erich Kohli.

swissinfo, Vanda Janka

La Suisse compte quelque 300 espèces non indigènes.
Elle dénombre 11 plantes envahissantes et 16 espèces en expansion.
Elle n’a pas de base légale visant à limiter l’introduction et le commerce de ses espèces.

Les espèces invasives peuvent représenter un véritable danger pour l’environnement, l’économie mais également la santé humaine.

A ce titre, l’ambroisie à feuilles d’armoise constitue un cas particulier. Son pollen provoque d’importantes allergies.

Cette espèce semble en extension dans le canton de Genève. Mais elle est également présente un peu partout en Suisse.

Elle cause déjà de gros problèmes de santé publique en France voisine (vallée du Rhône, région lyonnaise).

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