
Environnement: un bilan alarmant

En Suisse, l'air et le sol sont plus pollués que jamais. Après dix ans d'étude, le Fonds national de la recherche scientifique tire la sonnette d'alarme.
Le bilan du programme prioritaire (PP) du Fonds national suisse de recherche scientifique (FNS) consacré à l’environnement est sans appel. Les ressources vitales que sont l’air et le sol sont très fortement polluées.
Le climat, première source d’inquiétude
Bien évidemment, les sources de pollution de l’air ainsi que leurs conséquences sont multiples. Et pour Rudolf Haeberli, directeur du programme prioritaire (PP), il n’est pas question de donner plus d’importance à un facteur qu’à un autre.
Toutefois, les chercheurs ont classifié les inquiétudes liées à la pollution, et il y en à trois principales: le climat, le sol et la biodiversité.
Les bouleversements climatiques «sont dus à l’effet de serre. Et c’est ce qui inquiète le plus», explique Rudolf Haeberli. Et ceci pour des raisons liées à de nombreux paramètres encore inconnus.
«Preuve est faite que l’atmosphère largement polluée a des conséquences sur le climat. Cependant, il est difficile, actuellement, de les mesurer entièrement», souligne encore le directeur du PP.
Le sol suisse en mauvais état
L’autre grande inquiétude concerne l’état des sols. «Les agressions sur le sol sont parfois fortes et nombreuses», relève le chercheur. Pour Rudolf Haebeli, «un tiers des sols biologiquement actifs est menacé par la densification et la concentration de substances nocives comme les métaux lourds, ainsi que par l’érosion».
En effet, l’érosion a connu une accélération importante liée aux catastrophes naturelles dues aux changements climatiques. Il faut encore ajouter à cela le fait que, depuis le début de ces études, un mètre carré de sol disparaît chaque seconde sous une construction nouvelle.
La biodiversité en danger
Le sort de la biodiversité n’est pas moins inquiétant. «Le nombre des espèces florales et animales indigènes menacées ne cesse d’augmenter», précise le directeur du programme.
Ainsi, déjà près de 95 % des amphibiens, mais aussi 80 % des reptiles, 45 % des oiseaux nicheurs et un tiers des plantes sauvages ont disparu ou sont menacées depuis le début de l’étude.
Conséquences de la pollution sur la santé
Cela dit, qu’en est-il des conséquences de toutes ces pollutions sur les êtres humains? Des études menées sur dix ans permettent d’en préciser la gravité.
Cela explique la détermination des chercheurs lorsqu’ils s’en prennent au trafic routier, grande source de pollution. Ainsi, chaque année, près de 1800 personnes meurent des conséquences de la pollution de l’air due aux véhicules à moteur, soit trois fois plus que dans les accidents.
Enfin, la pollution sonore inquiète également les scientifiques. Un quart au moins de la population est exposée à un niveau de bruit qui dépasse les normes pour les quartiers d’habitation. «Et là encore, précise Rudolpf Haeberli, si l’on sait que le bruit stresse ou rend sourd, il est extrêmement difficile de faire des prévisions à long terme sur les réelles conséquences de cette pollution sur les gens».
Selon le rapport final, les engagements pris par la Suisse, lors de la conférence de Kyoto sur le climat, pour la réduction des gaz à effet de serre ne pourront pas être tenus.
Développement durable oublié
Pire encore, la Suisse n’est pas sur le bon chemin du développement durable. Et il s’agit de l’y ramener vite. «C’est en quelque sorte notre message principal», explique Rudolf Haeberli. Qui appelle notamment à une meilleure application de la loi sur le CO2 et à une véritable réforme fiscale «écologique».
Mais, pour y parvenir, il faut franchir deux obstacles: la mauvaise cote de cette réforme fiscale écologique auprès de la population mais également des politiques. «C’est pourquoi nos messages ne s’adressent pas uniquement aux politiciens, répond Rudolf Haeberli, mais à tous les citoyens et acteurs de ce pays».
Dans ces conditions, Rudolf Haeberli propose de multiplier à tous les niveaux des actions de conscientisation pour enrayer le mal.
Créer des agences de l’énergie
Concrètement, les scientifiques proposent la création d’agences de l’énergie. Elles serviraient à promouvoir et discuter des arrangements dans le secteur privé. Objectif: diminuer le taux de CO2.
Approuvé en 1991 par le parlement avec cinq autres programmes prioritaires, le programme «Environnement» a démarré en 1992. En dix ans, le programme prioritaire du FNS a investi 99,8 millions de francs pour effectuer toutes ces recherches.
Prévu à l’origine pour mettre au point des procédés techniques, le programme a été réorienté en 1996 vers le développement durable. Négligé entre-temps.
Au total, près de 250 travaux ont été menés et 11 brevets ont été déposés. Ces recherches ont permis la rédaction de 444 travaux de diplômes et 303 thèses de doctorats universitaires, sur le thème de l’environnement.
swissinfo/Jean-Louis Thomas

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