Les antiglobalisations assiègent Davos

De Porto Alegre à Davos, en passant par Zurich, les opposants à la «mondialisation néolibérale» comptent bien voler la vedette au Forum économique mondial (WEF). Les plus radicaux veulent même, à terme, «l'anéantir».
«L’objectif à moyen terme est de ne plus permettre la tenue du WEF, un meeting arrogant et patriarcal». Le tract de la coordination anti-OMC ne laisse planer aucun doute quant à son but suprême.
Se présentant comme une coalition de mouvements autonomes, zapatistes et féministes, la coordination ne fait pas dans la nuance. «C’est parce que nous luttons au quotidien contre le capitalisme, le racisme, le patriarcat, l’autoritarisme, le nationalisme et l’antisémitisme que nous nous mobilisons contre le WEF, proclame leur tract. En raison de l’importance stratégique du WEF dans le redéploiement du capitalisme néolibéral sur tous les espaces géographiques, politiques et sociaux du globe, notre but est de l’anéantir».
Proches du courant anarchiste, ces activistes entendent perturber la tenue du Forum de Davos durant toute sa durée. Une campagne d’agitation qui devrait culminer avec une manifestation sauvage le samedi 27 janvier.
Parmi les manifestants, on trouvera des participants de «L’autre Davos», une conférence organisée la veille à Zurich par ATTAC (Association pour une taxation des transactions financières) et par diverses organisations tiers-mondistes ou de gauche.
«Nous ne sommes pas contre la mondialisation. Nous sommes contre une mondialisation contrôlée par 250 multinationales qui configurent l’économie mondiale», précise le suisse Charles-André Udry, militant trotskiste de longue date et membre du comité d’organisation de la conférence.
Le meeting zurichois veut montrer qu’un autre monde est possible et qu’il se manifeste déjà à travers une série d’actions de résistance aux quatre coins de la planète. Parmi les centaines de participants attendus sur les bords de la Limmat, figurent notamment l’ancien patron des socialistes suisses Peter Bodenman, le sociologue français Pierre Bourdieu, et le linguiste américain Noam Chomsky.
Le Forum social mondial – qui se tient au même moment à Porto Alegre au Brésil – témoigne de la même sensibilité que le meeting zurichois. Organisé par la gauche brésilienne et le mouvement ATTAC, il veut dépasser la simple critique de la globalisation. Il veut lancer des propositions alternatives.
Ce processus devrait s’affiner au fil du temps puisque le Forum social mondial devrait avoir lieu chaque année au même moment que le Forum économique de Davos.
Cette année, 10 000 invités sont attendus dans la capitale de l’Etat de Rio Grande do Sul, administrée depuis seize ans par le Parti des Travailleurs. Une délégation de parlementaires helvétiques et des responsables de la Ville de Genève participeront aux débats. Au même titre que le syndicaliste paysan français José Bové, l’ancien président de l’Afrique du Sud Nelson Mandela et la présidente de l’Association des mères de la Place de Mai Nora de Cortiñas.
Enfin, une troisième conférence aura lieu à Davos même. Organisée une toute première fois l’année dernière, cette réunion cherche également à contester le rôle et la légitimité de Davos. Portée par la Déclaration de Berne, Pro Natura et six autres ONG, elle entend poser un regard public sur le Forum. Plus largement, ses organisateurs préconisent des règles du jeu commercial plus transparentes, démocratiques, et respectueuses de l’environnement et des droits des travailleurs.
En dépit de leur diversité, les ONG présentes à Porto Alegre, Zurich et Davos ont une attitude de défiance vis-à-vis du WEF, symbole d’un ultralibéralisme au service des entreprises transnationales. Mais plusieurs dizaines d’entre elles – dont Greenpeace et Amnesty international – ont tout de même accepté la main tendue par les organisateurs du Forum de Davos.
Il est cependant trop tôt pour savoir si cette participation est le signe d’une fracture au sein de ce mouvement de contestation apparu au grand jour à Seattle en novembre 1999.
Frédéric Burnand

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