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«Typique de l’antinomie du fédéralisme»

Nicolas Schmitt, de l'Institut du fédéralisme de Fribourg, replace la discussion sur l'aide entre régions dans le débat plus général du fédéralisme.

Dans une interview à swissinfo, il explique que ces petites guerres entre cantons, états ou Länder sont le pain quotidien des pays fédéraux.

swissinfo: Comment interprétez-vous la mesure de rétorsion des villes alémaniques par rapport aux nouveaux systèmes fiscaux de certains cantons?

Nicolas Schmitt: Je ne m’exprime pas sur le système d’aide intérieure qui est en cause dans le cas précis, mais, de manière générale, sur les questions de péréquations financières. Dans les pays fédéraux, on constate que ces questions sont toujours âprement débattues.

Les Länder allemands ont traîné le gouvernement devant la Cour constitutionnelle. Le Canada a aussi vécu des discussions très polémiques à propos de transferts péréquatifs. La mesure de rétorsion de ces quatre villes me paraît être un épiphénomène de la guerre inhérente au fédéralisme.

swissinfo: Une guerre? C’est-à-dire?

N.S.: Le fédéralisme est par nature déchiré entre deux tendances: le fédéralisme compétitif, qui veut que les Etats-membres se fassent la plus grande concurrence possible car c’est de là que naît le succès, et le fédéralisme coopératif selon lequel il faut coopérer le plus possible pour que tout aille au mieux.

Mais trop de compétition créée des paralysies et trop de coopération amène une dilution des responsabilités. A la suite d’autres, je préconise donc un peu des deux, la recherche du juste milieu.

swissinfo: La concurrence est donc néfaste si elle s’applique à l’extrême?

N.S.: Si vous baissez sans cesse les impôts, il n’y a plus d’impôts ! D’un autre côté, il est bon qu’une certaine concurrence fasse pression sur les barèmes exagérément hauts. Mais l’inquiétude face à la tendance actuelle de concurrence fiscale me paraît justifiée.

swissinfo: Outre ce système d’aide volontaire, le soutien institutionnel aux régions périphériques est d’ailleurs aussi remis en question. Y voyez-vous une tendance de fond?

N.S.: L’esprit du temps veut en effet davantage de compétition économique. Personnellement, je crois qu’il est dangereux d’abandonner les régions périphériques, de créer des déserts intérieurs, comme ce fut le cas avec la province de l’Alberta au Canada. Laisser s’installer des zones de détresse n’est jamais bon pour l’ensemble.

Interview swissinfo, Ariane Gigon Bormann

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