Une combattante infatigable s'en va
Partisans et adversaire de Ruth Dreifuss regrettent son départ. Ils saluent une femme engagée qui n'a jamais cessé son combat en faveur des plus démunis
La droite a cependant un regard critique sur le bilan politique de la conseillère fédérale.
Ruth Dreifuss s'en va avec un concert de louanges et de remerciements, particulièrement de la part des syndicats qui saluent son engagement en faveur d'une société solidaire.
Personne au Conseil fédéral ne se sera autant engagé pour les salariés et les plus démunis, estime par exemple la Confédération des syndicats chrétiens de Suisse.
Au cours de ses dix ans passés au gouvernement, Ruth Dreifuss a repoussé les attaques du néolibéralisme, juge pour sa part l'Union syndicale suisse, organisation faîtière dont Ruth Dreifuss avait été secrétaire générale pendant douze ans.
Outre les plus démunis, Ruth Dreifuss a également été la représentante de toutes les minorités au sein du gouvernement: en tant que femme, en tant que juive et en tant que célibataire sans enfant, comme que l'avaient souligné les journaux lors de sa présidence de 1999.
Des adversaires respectueux
Les adversaires politiques de Ruth Dreifuss reconnaisse que celle-ci gardera une place de choix dans l'histoire suisse. «Je pense qu'elle travaillait d'une manière très claire», estime Philipp Stähelin.
«Son opiniâtreté l'a parfois éloignée des solutions pragmatiques, notamment dans le domaine de l'assurance maladie, poursuit le président du Parti démocrate-chrétien (centre). De plus, elle laisse de nombreux dossiers en souffrance. Mais, d'une manière générale, elle a œuvré pour le bien de notre pays.»
Le Parti radical-démocratique (droite) voit pour sa part en Ruth Dreifuss «une combattante engagée en faveur de la social-démocratie au sein du gouvernement». Durant son mandat, elle a œuvré pour la promotion des femmes et pour le développement de l'Etat social.
«Malgré des points de vue différents, notre confrontation a toujours été empreinte de respect mutuel et d'équité», souligne encore le Parti radical-démocratique.
Une voix discordante
En fait, seule l'Union démocratique du centre (droite dure) salue le retrait de Ruth Dreifuss. «J''ai estimé Ruth Dreifuss pour son opiniâtreté», déclare Ueli Maurer. Pourtant, pour le président de l'UDC, les critiques l'emportent sur les compliments.
«Elle a suivi une fausse politique, poursuit-il. Et elle lègue de nombreux problèmes irrésolus dans le domaine des assurances sociales. Dans ces conditions, il faut se féliciter de son départ.»
Des hauts et des bas
Comme n'importe quelle personnalité politique, Ruth Dreifuss a connu des hauts et des bas. Et dans certains dossiers, son bilan est en demi-teinte.
La conseillère fédérale restera certainement connue pour son travail dans le cadre de Loi fédéral sur l'assurance maladie (LAMal). Cette loi est un succès, dans la mesure où elle oblige chaque habitant de ce pays d'être assuré contre les risques de la maladie, indépendamment de ses revenus.
Mais le mauvais côté de la LAMal, c'est la hausse constante des coûts de la santé et des primes pour les assurés. Or, cette hausse, jamais Ruth Dreifuss ne semble avoir été en mesure de la maîtriser.
La révision de l'assurance vieillesse a également représenté un dossier pénible pour Ruth Dreifuss. Les économies dans cette assurance ont été faites sur le dos des femmes qui ont vu l'âge de la retraite augmenter.
Dans ce dossier, les observateurs ont eu tout loisir de voir une Ruth Dreifuss déchirée entre d'une part ses convictions profondes et d'autre part le diktat de la politique et les contraintes liées à sa fonction.
Autre «couleuvre» difficile à avaler: le refus par le peuple de l'assurance maternité défendue corps et âme par Ruth Dreifuss. Mais le fait que le Parlement soit sur le point de trouver une solution pour créer cette assurance peut être réconfortant pour la ministre démissionnaire.
Ruth Dreifuss a en revanche connu le succès dans le domaine de la politique de la drogue. En 1999, elle avait réussi à faire accepter par le peuple la prescription médicale d'héroïne aux drogués dépendants. Par ailleurs, la consommation de cannabis devrait bientôt être décriminalisée.
swissinfo/Christian Raaflaub
Faits
Biographie de Ruth Dreifuss
09.01.1940: Naissance à St-Gall.
1945-1970: Scolarité et université à Genève.
1981-1993: Secrétaire centrale de l'Union syndicale suisse.
10.03.1993: Election au Conseil fédéral.
01.04.1993: Reprise du Département fédéral de l'Intérieur.
1999: Première présidente de la Confédération.
30.09.2002: Annonce de sa démission du Conseil fédéral.
31.12.2002: Dernier jour au Conseil fédéral.

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