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Les anti-minarets veulent encore serrer la vis

Tombes chrétienne et musulmane voisinant dans un cimetière suisse. Keystone

Après avoir réussi à imposer l'interdiction des minarets, l'Union démocratique du centre (UDC / droite conservatrice) veut aller plus loin encore pour empêcher l'«expansion» de l'islam en Suisse. Diverses interdictions sont à l'étude.

Au lendemain de sa victoire contre tous les autres partis, l’UDC ne lâche pas «le morceau». «Les citoyens ont montré clairement qu’il veulent stopper le pouvoir pris par l’islam politique en Suisse au prix de nos lois et de nos valeurs, déclare Adrian Amstutz, conseiller national UDC bernois. Les musulmans doivent être encouragés à s’intégrer à notre société.»

La lutte contre les mariages forcés et les mutilations sexuelles des femmes, l’interdiction du port de la burka en public et des dispenses de cours de natation pour les enfants musulmans doivent, selon l’UDC, désormais être mis en bonne place de l’agenda politique.

Adrian Amstutz indique que son parti va lancer différentes propositions dans ce sens au Parlement. Il s’agit toujours de lutter contre «l’islamisation rampante de la société suisse».

L’UDC envisage même de supprimer l’autorisation de carrés musulmans existant dans les cimetières de certaines villes, comme Zurich. Le président du parti, Toni Brunner, a insisté: les musulmanes de Suisse ne peuvent pas aller au travail avec un foulard sur les cheveux.

Pas de sociétés parallèles

Les Suisses ne veulent pas de sociétés parallèles, c’est l’enseignement du scrutin de dimanche, a encore dit Toni Brunner.

Le parti en profite aussi pour promouvoir une autre de ses initiatives, qui réclame le renvoi du pays d’immigrés qui enfreignent les lois suisses ou qui abusent de l’aide sociale. La date du vote n’est pas encore connue.

D’autres partis se préoccupent aussi des droits des femmes. Le Conseil fédéral lui-même veut lutter contre les mariages forcés. Les démocrates-chrétiens ne veulent pas des burkas.

L’UDC jubile. «Jusqu’ici, nos propositions ont été refusées ou affaiblies, note Adrian Amstutz. Le gouvernement et les autres partis comprennent peut-être enfin qu’ils doivent faire quelque chose.»

Le parti a aussi d’ores et déjà averti qu’il ne tolérerait pas de report dans la mise en vigueur de l’initiative anti-minarets.

«Ceux qui se demandent si elle peut entrer en vigueur ou non révèlent de graves lacunes dans la compréhension des droits populaires.»

Poursuivre malgré tout

Si la Cour européenne des droits de l’homme décide que l’interdiction des minarets est illégale, l’UDC est d’avis que la Suisse devrait suspendre son adhésion. Mais cette possibilité a d’ores et déjà été exclue par Micheline Calmy-Rey, ministre des affaires étrangères.

A Langenthal (canton de Berne), où un projet de minaret est en cours, les musulmans ont décidé de poursuivre malgré tout. Ils sont prêts à aller en justice pour cela.

De nombreux experts, cités lundi par l’Agence télégraphique suisse, sont en outre d’avis que les juges européens basés à Strasbourg démontreront que l’initiative est non conforme aux droits de l’homme.

La Suisse compte actuellement quatre minarets et environ 200 lieux de prières musulmans.

Urs Geiser, swissinfo.ch
(Traduction et adaptation Ariane Gigon)

Irritation. La ministre de la justice suisse Eveline Widmer-Schlumpf a rencontré lundi de nombreux ministres de l’Union européenne. Selon l’Agence télégraphique suisse, elle rencontré «une certaine irritation».

Venue expliquer que le résultat des urnes n’attaquait pas les musulmans ou la liberté religieuse en Suisse, la ministre a ajouté avoir été interrogée sur les difficultés qu’implique la mise en oeuvre juridique de l’interdiction des minarets.

Négatif. Malgré les tentatives d’explication de Berne, les réactions sont uniformément négatives dans l’Union européenne.

Conseil de l’Europe. Préoccupation aussi à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, présidé ce semestre par la Suisse, face à un vote qui risque «d’encourager des sentiments d’exclusion» dans nos sociétés.

Téléphone. La cheffe de la diplomatie suisse Micheline Calmy-Rey et ses ambassadeurs tentent aussi de calmer les esprits. S’exprimant à la radio alémanique DRS, Mme Calmy-Rey a précisé être en permanence au téléphone depuis l’annonce du résultat du vote.

Ambassadeurs. Elle a aussi rencontré lundi après-midi plusieurs ambassadeurs des pays arabes. Les réactions sont à la surprise parce qu’ils ne s’attendaient pas à ce résultat de la part de la Suisse, a-t-elle dit.

ONU. Du côté des Nations Unies, l’experte pour la liberté de religion et de croyance Asma Jahangir a condamné «une claire discrimination». L’ONU étudie par ailleurs la conformité de l’interdiction des minarets avec le droit international.

Source: ATS

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