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Les naturalisations ne doivent pas passer par les urnes

Naturaliser, oui, mais comment? Le Parlement est divisé. Keystone

Les procédures de naturalisations ne doivent pas être décidées au suffrage universel, mais tout au plus par une assemblée communale, a estimé mardi la Chambre basse du parlement.

Les députés se démarquent ainsi des sénateurs, qui acceptent le vote populaire accompagné de conditions, pour contrer l’initiative populaire de la droite nationaliste.

La révision de la loi sur la nationalité initiée par le Conseil des Etats (Chambre haute) servira de contre-projet à l’initiative de l’Union démocratique du centre (UDC / droite nationaliste) «pour des naturalisations démocratiques».

Mardi, elle a failli passer à la trappe. Au vote d’ensemble, elle n’a été adoptée que par 77 voix contre 72 et 17 abstentions.

Le projet focalise contre lui le mécontentement de l’UDC et d’une frange des démocrates-chrétiens (PDC / centre droit) et des radicaux (PRD / droite). Ceux-ci veulent maintenir à tout prix les naturalisations par les urnes. A gauche, une partie du camp rose-vert tient à faire de la naturalisation un acte purement administratif.

Alors que la Chambre haute a admis la tenue de votations populaires, à certaines conditions, la Chambre basse les a expressément exclues, par 111 voix contre 78. Pour la majorité, le risque d’arbitraire est trop grand en cas de scrutin. Le Tribunal fédéral (cour suprême) a d’ailleurs jugé les naturalisations par les urnes anticonstitutionnelles en 2003.

Il s’agit néanmoins d’éviter que l’octroi de la nationalité suisse devienne un acte purement administratif, a déclaré la démocrate-chrétienne Thérèse Meyer au nom de la commission. Les assemblées communales devraient donc être autorisées à se prononcer.

Forte de cet avis, la majorité a rejeté une proposition du camp rose-vert tendant à obliger les cantons à déterminer des procédures respectant les garanties constitutionnelles, sans autres précisions.

Motiver le refus

Le bras de fer a porté également sur la motivation d’un éventuel refus de naturalisation. Par 102 voix contre 86, la majorité a décidé que tout rejet devrait être explicité par écrit.

L’UDC a fustigé ce procédé selon la devise martelée par Jasmin Hutter: «Les décisions du peuple doivent primer dans une démocratie directe». L’appel du ministre de justice et police Christoph Blocher, qui a lui aussi défendu le droit à une motivation orale lors des assemblées communales, n’a pas convaincu les députés.

Le Conseil national est allé plus loin que le Conseil des Etats en matière de publication des informations concernant les candidats à la naturalisation. Par 112 voix contre 75, il a décidé que les cantons devront publier certaines données et ne pourront pas se contenter de le faire que s’ils le souhaitent.

La confession de l’aspirant helvète devrait faire partie des informations publiques. La gauche s’est insurgée en vain contre le risque de dérive digne de l’Inquisition, selon les termes de la popiste (gauche de la gauche) Marianne Huguenin.

Un recours possible

La droite dure n’a cependant pas réussi à étendre le catalogue à des données plus détaillées telles que la perception de l’aide sociale, le paiement d’impôts, les poursuites pour dettes ou l’invalidité. Ce genre d’informations peuvent être délivrées oralement en cas de besoin, a assuré le radical Kurt Fluri.

En cas de refus, le candidat malheureux à la nationalité suisse pourra déposer un recours auprès des autorités judiciaires cantonales. L’UDC a échoué en proposant d’instituer également un droit de recours contre les naturalisations accordées.

Le recours à l’échelon fédéral restera garantit pour violation des droits constitutionnels uniquement. Le Conseil des Etats devra se prononcer à nouveau.

swissinfo et les agences

Dans quelques communes suisses alémaniques – en particulier à Emmen dans le canton de Lucerne – les citoyens se sont déjà exprimés sur les naturalisations.

Cette procédure a suscité des nombreuses critique, en particulier du fait que la plupart des candidats à la naturalisation portant un nom d’origine balkanique se voyaient systématiquement refuser la demande.

En 2003, le Tribunal fédéral a déclaré que le refus d’accorder la nationalité à des candidats devait être motivé. Ce jugement de la Cour suprême rend en fait illégale la procédure de naturalisation par un vote populaire.

En opposition à cette décision, l’Union démocratique du centre a lancé une initiative qui demande de laisser le choix de la procédure aux communes.

Une demande de naturalisation peut être déposée en Suisse après douze ans de résidence. Les années passées en Suisse entre l’âge de 10 et celui de 20 ans comptent double.

La Suisse accorde la naturalisation aux candidats qui sont bien intégrés et qui connaissent le système juridique helvétique.

La naturalisation passe par les cantons et les communes. La procédure peut varier fortement d’un endroit à l’autre.

En 2004, le peuple suisse a refusé la naturalisation simplifiée aux étrangers de deuxième et troisième génération.

En 2006, 47’607 naturalisations ont été enregistrées en Suisse.

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