Aujourd’hui en Suisse
Chers expatriés,
Si la Suisse adoptait une législation sur la responsabilité civile des multinationales, telle que l’imagine l’initiative en votation le 29 novembre, elle serait certainement avant-gardiste, mais pas le seul pays engagé sur cette voie. On vous en dit plus sur ce sujet, ainsi que sur les investissements suisses dans l’armement, l’autre objet soumis au vote à la fin du mois.
Dans cette newsletter, on se demande aussi si le fédéralisme suisse est mis à mal par la crise du coronavirus, et on vous offre un coup d’œil sur une pierre de luxe vendue à Genève.
Très bonne lecture,
L’initiative populaire sur la responsabilité des entreprises propose-t-elle une législation plus stricte que celle des autres pays? C’est ce que soutient le gouvernement suisse, opposé au texte qui sera soumis au vote le 29 novembre. Selon la ministre de la Justice, Karin Keller-Sutter, l’initiative introduirait des règles «uniques au monde» en matière de responsabilité civile des entreprises.
Mon collègue Andrea Tognina s’est penché sur les législations en vigueur dans d’autres pays, afin de savoir où se situerait la Suisse à l’international. Il est un peu ardu de comparer des normes d’un pays à un autre, puisqu’elles reposent sur des systèmes différents.
Cependant, on voit que l’initiative suisse ne s’aventure pas en territoire inconnu. Un exemple souvent cité est celui de la loi française, qui oblige ses grandes multinationales à élaborer un plan de vigilance pour éviter les violations des droits humains et de l’environnement par leurs filiales, sous-traitants et fournisseurs.
Plusieurs pays disposent de lois portant sur des droits humains ou des secteurs spécifiques. L’Union européenne prépare quant à elle un renforcement de sa législation sur la responsabilité sociale des entreprises. En résumé, si la Suisse se dotait d’une telle législation, elle serait à l’avant-garde des efforts internationaux en la matière, mais n’aurait rien d’une curiosité.
- Responsabilité des entreprises: la Suisse et les autres
- La responsabilité de l’économie suisse à l’étranger se joue dans les urnes – notre dossier pour tout comprendre des enjeux de la votation du 29 novembre
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La deuxième initiative sur laquelle les Suisses voteront à la fin du mois vise à interdire les investissements dans l’armement. Le texte concernerait directement la Banque nationale suisse (BNS), les fondations ainsi que les caisses de pension. La Confédération devrait aussi s’engager pour que des conditions similaires s’appliquent aux banques.
Combien représentent ces investissements? Faute de transparence, on ne peut que se contenter d’estimations. Une chose est sûre: on parle de plusieurs milliards de francs. Nous nous sommes plongés dans le portefeuille d’actions américaines de la BNS et avons constaté que, rien qu’aux États-Unis, ses investissements dans les plus grands groupes d’armement excèdent les 2 milliards.
Au niveau mondial, la NZZ parle de 20 milliards de francs d’actions. Sachant que la BNS s’est retirée ces dernières années de certaines entreprises particulièrement controversées comme Lockheed-Martin, Northrop Grumman ou Textron, comme le relève la RTS. Les plus de 1500 caisses de pension suisses visées par l’initiative, elles, détiendraient des investissements dans l’armement pour plus de 16 milliards de francs.
Les géants bancaires helvétiques UBS et Credit Suisse investissent eux aussi massivement dans ce secteur. Le dernier rapport de l’ONG PAX, qui se limite aux 18 plus grands groupes mondiaux, et uniquement actifs dans l’armement nucléaire, fait état de prises de participation et de prêts pour plus de 6 milliards de francs chez UBS, et 1,3 milliard chez Credit Suisse.
- La BNS, Credit Suisse et UBS investissent plusieurs milliards dans l’armement
- Combien la BNS et les caisses de pension placent-elles dans le commerce de guerre? L’article de RTSinfo.chLien externe
- Bei Annahme der Kriegsmaterial-Initiative müsste die Nationalbank Aktien für gegen 20 Milliarden Franken verkaufen – l’article en allemand de la NZZLien externe
- Faut-il interdire les investissements dans l’industrie de l’armement?
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La deuxième vague de Covid-19 fait figure de «crash test» pour le fédéralisme suisse. Depuis la fin de la première vague, les gouvernements cantonaux décident seuls des mesures sanitaires à adopter, donnant lieu à des différences de traitement qui déconcertent, voire fâchent, une partie de l’opinion.
Certains cantons ont par exemple décidé de fermer les commerces non essentiels, d’autres non. On a ainsi pu observer ces derniers jours dans l’Arc lémanique la transhumance de résidents genevois vers les magasins du canton de Vaud. Même différence d’ambiance entre le canton du Jura, où les bars et restaurants sont fermés, et son voisin bernois qui n’a pas pris ce type de mesure.
Contrairement à d’autres pays comme la France, aucun organe indépendant n’a jusqu’à présent été chargé d’évaluer l’action des autorités suisses. Certaines voix dans le monde politique réclament qu’un bilan soit tiré de la gestion fédérale et cantonale de la crise.
Dans l’ensemble, le politologue Andreas Ladner, spécialiste du fonctionnement des administrations publiques, estime pour sa part que le fédéralisme a bien tenu le choc. Malgré quelques approximations notoires, «les niveaux d’interactions ont plutôt bien fonctionné entre la Confédération, les cantons et les communes», juge-t-il.
- Les confinements à géométrie variable des cantons suisses
- Coronavirus: la situation en Suisse
- Le suivi de la pandémieLien externe sur le site de la RTS
- Genève devient la région la plus touchée par le Covid en Europe – l’article de RTSinfo.chLien externe
- Privés de magasins, les Genevois vont faire leurs courses côté vaudois – le sujet de la RTSLien externe
Et pour finir, une incursion dans une autre réalité avec cette nouvelle transaction hors du commun, opérée par la maison de vente Sotheby’s à Genève: un diamant rose qualifié d’exceptionnel a été vendu mercredi soir pour la coquette somme de 26,6 millions dollars –on est toutefois loin du record absolu, établi à 71,2 millions de dollars. L’acheteur est resté anonyme.
Baptisé «Le Spectre de la rose», ce diamant de 14,83 carats, de la taille d’une bille, est le plus grand de sa catégorie à avoir jamais été mis aux enchères. Selon les termes du commissaire-priseur, ce diamant «entièrement pur» est exceptionnel de par sa taille et sa couleur. Il a été taillé dans le plus gros diamant brut rose jamais découvert en Russie (27,85 carats).
Les diamants roses sont les diamants les plus rares et les plus convoités sur le marché mondial. Ils le seront désormais encore plus, puisque la plus grande mine au monde de diamants roses, située en Australie, a annoncé sa fermeture il y a quelques jours, le gisement étant épuisé. Elle assurait jusqu’à récemment plus de 90% de l’approvisionnement mondial en diamants roses.
- Un exceptionnel diamant rose russe vendu pour 26,6 millions dollars à Genève – la dépêche de l’AFPLien externe
- À Genève, un diamant vendu à un prix record (2010)
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