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Le vide de la jeunesse «hype» de Zurich

Une ligne de coke dans les toilettes du club Boris. snowwhite.ch

Seul film suisse en compétition, «Snow White» du réalisateur zurichois Samir a été projeté dimanche au Festival international du film de Locarno.

Une fable qui raconte la liaison entre une jeune fille de la Goldküste de Zurich et un rappeur genevois – Carlos Leal, le chanteur de Sens Unik.

Zurich. Villa avec vue sur le lac, grandes baies vitrées donnant sur la piscine. La côte dorée zurichoise. C’est là que vit Nico, jeune fille à papa de 21 ans. Branchée, sexy, super fringues. Un père riche, très riche. Et une mère dépressive, très dépressive. Quand elle n’est pas sous calmants, elle joue au golf avec ses petits gants en cuir rose fuchsia.

Nico passe son temps à faire la fête ou à essayer la dernière robe signée Prada avec sa meilleure amie Wanda. Wanda, elle, ne vient pas de la Goldküste. Mais elle vit pareil. Grâce à ceux qu’elle appelle «ses sponsors». Parce qu’elle n’a pas envie de travailler cinquante ans pour se retrouver avec de l’arthrite et sans fric comme ses parents.

Le soir, les deux filles sortent dans les clubs zurichois. En particulier chez Boris, le «sponsor» de Nico. Musique électro, coke et sexe. Pas pour le plaisir mais juste pour tuer le temps en attendant de trouver un vrai sens à sa vie.

La rencontre

Genève. Deux pièces et demi. Vue sur l’immeuble voisin. Meyrin, la banlieue genevoise. C’est là que vit Paco. Fils d’immigrés espagnols, il a un groupe de hip-hop qui marche plutôt bien. Une mère douce, un père aigri qui méprise sa musique.

Paco est interprété par Carlos Leal – surprenant de vérité, même sur des dialogues qui ne sont pas exceptionnels. Le chanteur du groupe de hip-hop suisse Sens Unik avait déjà joué dans le documentaire de Samir Babylon 2. L’histoire de Paco est d’ailleurs inspirée de sa biographie.

Lui, c’est un rebelle. Il joue avec son groupe dans le club que fréquente Nico. Fascinée par l’esprit libre de Paco, elle tombe immédiatement amoureuse. La caméra nous le dit dans une métaphore artificielle, la jeune fille riche se détachant du public pour s’envoler vers le rappeur.

Distant, Paco observe Nico, ses fringues de marque. Elle représente tout ce qu’il méprise. Et puis… L’instant d’après ou presque, les voilà amoureux. Un clip nous le fait comprendre, mais on ne sait pas très bien comment c’est arrivé.

Une fable moderne

Un sentiment qui va rester jusqu’à la fin du film. Cette histoire d’amour sonne faux. Pas parce qu’elle réunit l’impossible – un rappeur de la banlieue genevoise et une jeune fille riche de la riviera zurichoise. Mais parce que ni les mots, ni les images, ni les transitions sonores, n’évoquent l’amour.

En revanche, le milieu hype de Zurich avec sa jeunesse, riche mais perdue, à la recherche d’un sens à sa vie, est plutôt bien dépeint. Peut-être de façon un peu caricaturale et superficielle. On peut regretter que Samir n’ait pas choisi une forme se rapprochant plus du documentaire pour traiter ce thème d’actualité.

Mais c’était son objectif. Réaliser un film entre fable et réalité. Parler d’une Blanche Neige (Snow White) contemporaine. «Notre vie crée les histoires pour les films. Mais les films sont en fait des contes modernes», ajoute Samir.

Le réalisateur de Forget Bagdad – prix de la Semaine de la critique en 2002 à Locarno – a aussi clairement affiché sa volonté de faire cette fois-ci un film populaire.

D’ailleurs, Snow White pourrait bien rencontrer le succès dans les salles… Tout est fait pour. Le choix de Carlos Leal – qui a décidé de se consacrer entièrement à son nouveau métier d’acteur – pour interpréter Paco. Et pour le scénario, le choix de Michael Sauter qui a écrit les dialogues de A vos marques, prêts, Charlie.

swissinfo, Alexandra Richard à Locarno

Snow White (2005).
Réalisation: Samir.
Scénario: Michael Sauter.
Interprétation: Julie Fournier, Carlos Leal.
Sélectionné en compétition internationale à Locarno.
Sortie dans les salles suisses: 1er septembre 2005.

– Samir (littéralement: le conteur) est né en 1955 à Bagdad.

– En 1961, il s’installe en Suisse où il étudie à la Schule für Gestaltung de Zurich.

– Typographe et caméraman, il réalise ses premiers films dès 1983.

– Il est l’auteur de plus de 40 films vidéo dont Babylon 2 (1993), un essai documentaire, et Forget Bagdad (récompensé en 2002 à Locarno).

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