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Le SMI paie encore les excès de la bulle Internet

Mardi, la Bourse suisse a continué sa chute. Keystone

Pièces maîtresses du système financier international, les bourses traversent l'une des plus graves périodes de leur existence.

L’effondrement de l’indice SMI donne l’occasion de se pencher sur les liens qui existent entre la finance et l’économie réelle.

Les marchés financiers traversent une crise sans précédent. A laquelle le marché suisse n’échappe pas. Depuis ses plus hauts de 2000, l’indice SMI des valeurs principales a perdu près de 60%. Et la tendance ne semble pas près de s’inverser.

Sur fond de nouveau conflit en Irak, l’opinion publique a été ébranlée par les annonces successives de licenciements massifs au sein d’entreprises qui ont écrit les lettres de noblesse de l’industrie helvétique.

Malgré cela l’indice SMI poursuit sa descente aux enfers. Mercredi, il a une nouvelle fois clôturé en baisse, de 1,17% à 3675,4 points, des niveaux qu’il n’avait pas atteints depuis 1996. L’occasion d’analyser les relations qui existent entre les marchés financiers et l’économie réelle. En six questions.

Quel rôle joue la bourse dans le circuit international des capitaux? Quelle est son utilité?

La Bourse offre aux sociétés qui sont cotées un accès au marché international des capitaux. En y accédant, les entreprises ont un moyen d’augmenter leurs fonds propres.

Elles peuvent vendre des actions, ce qui correspond à une partie de leur capital. Ou émettre des obligations, ce qui correspond à un accroissement de leur endettement. Les fonds ainsi récoltés permettront aux entreprises cotées de financer leur croissance, interne ou externe.

C’est une alternative aux crédits, traditionnellement octroyés par les banques, mais elle n’est pas exempte de contraintes. Comme la publication des comptes à échéances déterminées, l’application de standards comptables, un devoir d’information aux actionnaires, etc.

A quels problèmes les entreprises sont-elles confrontées suite à la débâcle des marchés financiers?

La baisse des marchés limite l’accès des entreprises aux marchés de capitaux. Elles éprouvent des difficultés croissantes à lever de l’argent frais tandis que leurs lignes de crédit bancaire, généralement corrélées à un portefeuille de titres, sont réduites.

«Elles ont donc davantage de difficultés à investir dans leur outil de production, à financer leur croissance interne et leurs acquisitions», explique Philippe Rezzonico, responsable de la recherche actions de la banque Ferrier Lullin à Genève.

Avec les perspectives économiques qui se réduisent, les bénéfices qui diminuent, les entreprises sont également dans l’obligation de réduire leurs coûts.

L’indice SMI a perdu près de 60% par rapport à ses sommets de 2000. Comment l’expliquer puisque la croissance de l’économie n’a pas connu de récession marquée?

La fin de la dernière décennie a été marquée par l’émergence d’une forte bulle spéculative sur les marchés financiers. En milieu d’année 2000, les actions américaines ont commencé à corriger, entraînant le reste des places financières du globe dans leur sillage.

«On est encore dans les effets de la bulle spéculative. Le niveau d’endettement des entreprises est encore trop élevé et l’économie réelle en fait maintenant les frais», estime le responsable de la banque genevoise.

Peut-on savoir quand ce processus d’ajustement arrivera à son terme?

Il n’y a pas de référence historique disponible qui permette de tirer des parallèles. La crise de 1929 était plus marquée, mais elle n’a pas duré aussi longtemps. Et la tendance baissière qui a animé les marchés ces dernières semaines n’est pas rassurante.

«On ne peut exclure la découverte de nouveaux cadavres dans les bilans de certaines entreprises. Mais la faillite de sociétés financières ferait encore plus mal que les récents scandales financiers. Un scénario qu’on ne peut exclure au vu des signes fournis par le marché», redoute Philippe Rezzonico.

La crise irakienne ne serait-elle qu’un paravent?

Sensibles à la psychologie des acteurs, les marchés financiers n’aiment pas les incertitudes. A cet égard, la crise irakienne ne favorise pas leur évolution. On ne peut toutefois lui imputer la seule responsabilité de la crise actuelle.

Pour Philippe Rezzonico, «les problèmes d’endettement des entreprises, comme les déficits publics datent de la bulle spéculative de la fin des années 1990. D’importants problèmes structurels doivent encore être résolus avant que les marchés puissent repartir à la hausse».

De quelle nature sont ces problèmes?

«Des surcapacités importantes existent au niveau des outils de production, ce qui signifie que les entreprises ne sont pas prêtes d’investir en la matière. Ensuite, l’endettement important, des entreprises comme des ménages, doit être assaini», poursuit l’analyste.

Et cet assainissement passera essentiellement par une réduction des dettes et des coûts des entreprises. Ce qui implique une nouvelle dégradation du climat social, en raison du lot de restructurations qu’une telle démarche implique.

«Il faudra encore laisser passer 2003 pour que la situation retourne à la normale», conclut Philippe Rezzonico.

swissinfo, Jean-Didier Revoin

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