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Le CERN réalise la mesure directe la plus précise de l’antimatière

L’expérience ALPHA au CERN avait démontré pour la première fois en 2012 la possibilité technique d’agir sur la structure interne d’atomes d’antimatière. Maximilien Brice/CERN sda-ats

(Keystone-ATS) Le CERN a rapporté mercredi dans la revue Nature avoir effectué la mesure directe la plus précise jamais réalisée sur l’antimatière. Une prouesse qualifiée de “changement de paradigme”.

Les chercheurs de l’expérience ALPHA ont ainsi révélé la structure spectrale d’un atome d’antihydrogène avec une précision sans précédent. Ce résultat, aboutissement de trois décennies de recherches, ouvre une ère entièrement nouvelle de mesures des différences entre matière et antimatière, a indiqué l’Organisation européenne pour la recherche nucléaire (CERN) dans un communiqué.

Le modeste atome d’hydrogène, comprenant un seul électron en orbite autour d’un seul proton, occupe une place centrale dans la physique fondamentale. Il est à la base de la représentation atomique moderne.

Son spectre de dispersion des couleurs est caractérisé par des raies bien connues à certaines longueurs d’ondes, correspondant à l’émission de photons d’une fréquence ou d’une couleur donnée au moment où les électrons passent d’une orbite à une autre.

Symétrie fondamentale

Les mesures du spectre de l’hydrogène concordent avec les prédictions théoriques à un niveau de l’ordre de quelques parties par million de milliards, un résultat exceptionnel que les chercheurs sur l’antimatière cherchent depuis longtemps à obtenir pour son pendant dans l’antimatière, l’antihydrogène.

Comparer ces mesures avec celles effectuées sur les atomes d’antihydrogène, lesquels comprennent un antiproton autour duquel tourne un positon, permet de vérifier la validité d’une symétrie fondamentale appelée invariance CPT (charge-parité-temps).

Trouver la moindre différence entre les deux ensembles de mesures permettrait de consolider les fondations du Modèle standard de la physique des particules, note le CERN. Et éventuellement de mieux comprendre pourquoi l’Univers est constitué presque intégralement de matière, alors que matière et antimatière auraient été produites en quantités égales lors du Big Bang.

Très délicats

Toutefois, jusqu’à présent, il était pratiquement impossible de produire et piéger des quantités suffisantes d’atomes d’antihydrogène, qui sont très délicats, et de disposer des outils nécessaires afin de pouvoir procéder à des mesures spectroscopiques complexes sur l’antihydrogène.

En 2012, l’expérience ALPHA avait démontré pour la première fois la possibilité technique d’agir sur la structure interne d’atomes d’antimatière. En 2016, l’équipe a rapporté la première observation de transitions optiques de l’antihydrogène, avec une précision de l’ordre de quelques parties pour dix milliards, trouvant une bonne concordance avec la transition équivalente dans l’hydrogène.

A portée de main

Le nouveau résultat présenté mercredi est désormais d’une précision de quelques parties pour mille milliards, un résultat 100 fois plus précis que la mesure de 2016.

Bien que cette précision soit encore inférieure à celle obtenue pour l’hydrogène, les progrès rapides de la collaboration ALPHA laissent penser qu’un résultat identique pour l’antihydrogène et l’hydrogène est à portée de main, conclut le CERN.

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