
Nouvelles violences en Guadeloupe et en Martinique

(Keystone-ATS) Le gouvernement français se voulait ferme mardi face aux violences qui se poursuivent en Guadeloupe malgré les renforts de forces de l’ordre. Il surveille désormais une possible contagion à la Martinique.
« La situation est toujours très difficile » en Guadeloupe, a déclaré sur France Inter mardi le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin. « Ce qui est certain, c’est que le rétablissement de l’ordre public est le préalable à toute discussion évidemment », a-t-il tonné, indiquant que des gendarmes avaient été la cible de tirs à balles réelles.
En Martinique, où une grève générale a débuté lundi, une semaine après celle lancée en Guadeloupe, des forces de l’ordre et des pompiers ont à leur tour et à plusieurs reprises été pris pour cible par des tirs d’arme à feu dans la nuit de lundi à mardi à Fort-de-France, a-t-on appris de sources policières.
« Nous sommes intervenus sur des feux de poubelles à Sainte-Thérèse vers 23h30 en appui des pompiers. Nous avons reçu des projectiles. D’autres feux de poubelles et de véhicules ont été allumés vers 01h45, c’est à ce moment que les patrouilles ont essuyé des tirs de 9 mm à plusieurs reprises. Des impacts ont été relevés sur les véhicules », a précisé le commandant Joël Larcher, responsable de la communication de la direction départementale de la sécurité publique de Fort-de-France.
Aucun blessé n’est à déplorer. Mais d’importants barrages bloquent les principaux axes routiers de Martinique. Des camions, des taxis mais aussi des palettes et des pneus ont été disposés à des points stratégiques du réseau routier.
La Guadeloupe, où un tiers de la population vit sous le seuil de pauvreté (Insee) avec un fort taux de chômage (19%), est secouée depuis plusieurs jours par un mouvement ayant pour origine la contestation de l’obligation vaccinale des soignants, qui a dégénéré en crise sociale émaillée de nombreuses violences avec barricades, pillages et incendies.
« Ils nous prennent pour des illettrés »
Une réunion par visioconférence lundi à Matignon autour de Jean Castex, à l’isolement après avoir été testé positif au Covid-19, a débouché sur la création d’une « instance de dialogue » afin, selon le Premier ministre, de « convaincre et d’accompagner individuellement, humainement », les professionnels concernés par l’obligation vaccinale. Une décision qui n’a pas convaincu en Guadeloupe où les syndicats à l’origine de la mobilisation ont déploré ne pas être associés à l’initiative.
« Bien sûr qu’on continue la mobilisation. On n’attendait pas grand chose de Castex et du gouvernement Macron, donc on n’est pas déçus » du résultat de la réunion d’hier, indique Hilaire Luce, membre du collectif qui a appelé à la grève générale, sur un barrage fait d’arbres et de pneus brûlés près du Gosier.
« Ils font preuve d’un mépris caractérisé: ils créent une instance d’écoute, ça veut dire qu’ils nous prennent pour des illettrés ? », s’indigne-t-il.
Pour sortir de l’impasse, Sébastien Lecornu, ministre des Outre-mers, a indiqué sur France 2 que le gouvernement « s’est engagé à trouver d’autres types de vaccins » pour les personnes qui refusent ceux à ARN messager. Selon lui, 87% des soignants et 43% des pompiers sont vaccinés sur l’île.
En attendant, le feu couve toujours. Outre les tirs, les gendarmes ont également été « pris pour cible par des cocktails Molotov à Rivière des Pères », sur la côte ouest de Basse-Terre durant la nuit, selon le procureur de la République Xavier Sicot.
« Provocation »
« Plus de 90 interpellations » et « plus de 60 gardes à vue » ont eu lieu depuis le début de la crise, a précisé le ministre de l’Intérieur, alors que 250 policiers et gendarmes, dont 50 du GIGN et du Raid, ont été envoyés en renfort durant le week-end et qu’un couvre-feu a été mis en place de 23h00 à 05h00.
Sur les 30 personnes passées lundi en comparution immédiate, 26 ont été condamnées à des peines allant de la simple amende, à 2 ans de prison ferme pour « participation active au pillage d’un commerce », a indiqué le parquet de Pointe-à-Pitre dans un communiqué.
Le candidat LFI à la présidentielle Jean-Luc Mélenchon a critiqué l’envoi du GIGN et du RAID sur place, « une provocation absolument inutile ».
Selon Sébastien Lecornu les violences sont le fait de personnes « déjà défavorablement connues des services de police ou de la justice », et « qui se servent de cette crise pour s’exprimer dans la violence ».
« On voit bien qu’on n’est pas sur une question sanitaire et sociale », a-t-il assuré.
La veille, le président Emmanuel Macron avait dénoncé ceux qui utilisent « la santé des Françaises et des Français pour mener des combats politiques ».
Comme d’autres élus de droite, le président du Sénat, Gérard Larcher a demandé que M. Lecornu se rende sur place « parce-qu’il est celui qui représente l’exécutif dans les Outre-mer ».
M. Lecornu a cependant indiqué qu’il ne comptait pas s’y rendre tout de suite pour ne pas « présenter une surcharge particulièrement importante pour les forces de l’ordre » qui sont déjà toutes sur le terrain.