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Secoué par le gros temps, Logitech réduit la voilure

Il n'y a pas si longtemps, Guerrino De Luca présentait des chiffres en hausse pour le groupe dont il est aujourd'hui président du conseil d'administration. C'était avant la crise... Keystone

Le leader mondial des périphériques informatiques annonce la réduction d'environ 15% de ses effectifs et abandonne ses objectifs de résultats pour 2008/09. La faute à la crise économique, confirment, guère surpris, deux analystes.

Logitech a émis mardi un court communiqué destiné à préparer la communauté financière sans la brusquer, tout en l’invitant, le cas échéant, à adapter ses ratios d’évaluation.

Cette première notification sera suivie de davantage de détails le 20 janvier prochain. Logitech devrait alors préciser la réduction des coûts envisagés et le montant de la charge de restructuration, estime Amy Ils, analyste chez Lombard Odier Darier Hentsch et Cie.

«Ils attendent de mieux connaître les niveaux de ventes et les modifications réelles sur les marchés avant de chiffrer leurs mesures», envisage-t-elle. Des mesures que la firme avait pu s’épargner au moment de l’éclatement de la bulle technologique de 2000/01.

Depuis mardi, on sait deux choses. D’abord, Logitech fait table rase de ses prévisions de résultats pour l’exercice 2008/09, sans communiquer de nouvelles cibles.

L’automne dernier, la firme avait déjà réduit ses objectifs – croissance du chiffre d’affaires de 6 à 8% et de 3 à 5% du bénéfice opérationnel, contre 15% initialement.

Ensuite, Logitech annonce une baisse de coûts par le biais d’une réduction de ses effectifs d’environ 15%. Officiellement, cette baisse s’appliquera sur les seuls 3500 employés directs de la firme. Selon l’agence ATS, les 5500 employés du site de production chinois détenu pour moitié par Logitech ne seraient pas concernés.

Dans les comptes de l’entreprise, la charge liée à cette restructuration apparaîtra au quatrième trimestre et des économies sont annoncées dès le premier trimestre 2009/10, qui commence en avril.

Dégradation en vue

Logitech assortit son annonce d’une déclaration de Gerald P. Quindlen, président de la direction du groupe. Il constate une détérioration significative du climat de consommation pour les produits grand public lors du dernier trimestre.

Le boss prévoit un «environnement économique qui se dégradera ces prochains mois», d’où la volonté «d’aligner la structure de coûts» de Logitech sur une récession qui promet d’être relativement longue.

Gerald P. Quindlen se veut toutefois rassurant. Il considère Logitech comme étant «bien positionné» pour faire face à cette récession et continue à parier – à long terme – sur une croissance à deux chiffres de la firme.

«Nous prenons des mesures très proactives pour nous assurer de passer sainement à travers cette crise et d’en sortir, idéalement, renforcés», indique Antoine Preisig, vice-président vente et marketing en Europe pour Logitech.

Largement anticipé

«Ces mauvaises nouvelles étaient attendues par le marché», constate Amy Ils. Et si le titre Logitech a joué au yo-yo sur le marché boursier suisse mardi, l’explication serait avant tout technique, liée à la couverture de positions de certains intervenants du marché.

Analyste de la banque Bordier, Daniel Pellet n’est guère plus surpris par l’annonce du jour. Logitech avait déjà donné un «avis de tempête» en automne. Ce nouvel avis «fait penser que le niveau des ventes autour de Noël s’est avéré pire que prévu».

Entreprise globalisée qui produit ou fait produire dans des pays surtout qui lui offre des coûts bas, Logitech tire la moitié de ses revenus de l’Europe et 30% des Etats-Unis. «Ce sont les deux grands pôles en terme d’équipement technologique des ménages. Et les deux zones touchées par la récession actuelle.»

Du reste, Nokia, Ericsson, Motorola, Samsung, Apple et les autres producteurs d’électronique de consommation hardware (par opposition au software et aux IT, moins dépendants de la consommation finale) devraient aussi ressentir le vent du boulet.

Début du chantier

Daniel Pellet, toutefois, admet qu’il ne voyait pas Logitech être à ce point touché par la crise, vu le niveau assez faible du prix de ses produits.

Réductions de postes – «15%, c’est beaucoup», observe-t-il – processus de restructuration et de réduction de coûts probables: 2009 puis 2010 seront sans doute des années de transition pour Logitech. Le groupe «prend les mesures qui s’imposent», estime l’analyste. Un avis partagé par Amy Ils.

La structure du bilan de la firme rassure, pour sa part. «Ils ont 500 millions de cash, ils n’ont pas de dettes. De plus, Logitech vient de recevoir sept récompenses au Consumer electronic show de Las Vegas, ce qui signifie que le design mais aussi les qualités technologiques des produits sont toujours reconnues.»

Au jeu des forces et faiblesses, Daniel Pellet souligne la capacité de développement, le design et la qualité des produits de Logitech. Autre point fort: la distribution, «très efficace», et le renom de la marque qui lui est lié.

Largement diversifié

Moins réjouissant apparaît l’âge avancé du segment des souris, qui devront un jour ou l’autre tomber dans les oubliettes de l’histoire. Mais Amy Ils rappelle que Logitech est passé d’une dépendance à la souris pour 50 à 60% de son chiffre d’affaires à une diversification où aucune famille de produits ne dépasse 10% des ventes.

Pour Daniel Pellet, Logitech est resté trop en retrait du marché des jeux (Xbox-360, Wii). Mais les opportunités sont là aussi : domotique, plateformes audio autonomes, voix sur IP, etc…

«Logitech n’a pas de problème interne, le groupe est bien positionné en termes de produits et de parts de marchés, et reste au top de la technologie, assure Amy Ils. Le seul problème, c’est l’économie. Il faut attendre qu’elle se retourne.»

swissinfo, Pierre-François Besson

Naissance. La firme Logitech a été fondée en 1981 à Apples (canton de Vaud) avec la souris informatique comme produit initial.

Sites. Ses sièges principaux sont à Fremont, en Californie et à Romanel-sur-Morges, dans le canton de Vaud. Elle a des bureaux à Suzhou (Chine), Hsinchu (Taïwan), Tokyo (Japon) et Hong Kong, (Chine).

Leader. Longtemps fournisseurs des grands fabricants d’ordinateurs, Logitech est devenu le leader mondial des périphériques personnels.

Produits. Ses produits – souris, claviers, trackballs, solutions d’écriture numérique, webcams, haut-parleurs, etc – sont utilisés au bureau comme à la maison, dans le domaine des jeux, des systèmes de home-entertainment et domotique, du PC, des MP3 et iPod, de la téléphonie mobile.

Emploi. Logitech emploie quelque 9400 collaborateurs dans le monde, dont 250 en Suisse.

Résultats 2007/2008 de Logitech:

Chiffre d’affaires: 2,4 milliards de dollars (+15%)
Bénéfice net: 231 millions de dollars contre 230
Résultat d’exploitation (EBIT): 287 millions de dollars (+24%)

En conformité avec les normes du JTI

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