Gare aux effets des ‘Space cookies’
Crises d'angoisses, hypertension et inaptitude à conduire. L'effet psychotrope des biscuits au cannabis ressemble à une bombe à retardement.
Même si la consommation orale de cannabis est peu répandue, elle incite une prévention à l’approche des fêtes.
Entre une fournée d’étoiles de Noël et de bruns de Bâle, d’aucuns seront tentés de concocter une série spéciale de ‘spaces cookies’. Et, pris par l’euphorie des fêtes, ils ajouteront une pincée de chanvre dans leur préparation.
Cette consommation, nettement moins fréquente que la ‘fumette’, augmente traditionnellement à l’approche des fêtes de fin d’année. Qu’elle accompagne le café après un bon repas ou, plus original, qu’elle soit offerte en cadeau de Noël.
L’effet-retard du ‘space cookie’ est pourtant imprévisible. Si bien que l’Institut suisse de prévention de l’alcoolisme et des autres toxicomanies (ISPA) prend la peine de mettre en garde les consommateurs.
Parano et crises d’angoisse
«C’est physiologique, explique Corinne Follonier, collaboratrice de l’ISPA. La totalité du THC (la substance active du cannabis) passe dans l’organisme quand on l’absorbe par voie orale. Ce qui n’est pas le cas quand on le fume.»
«On ne peut pas contrôler la quantité de cannabis ingérée, surenchérit Christophe Polese. L’effet ne se fait sentir qu’après 45 minutes ou une heure. Et il dure plus longtemps.»
«La tentation est grande, ajoute le secrétaire genevois de la Coordination suisse du chanvre, d’en reprendre. Ce qui démultiplie les effets.»
Des crises d’angoisse ou de paranoïa graves sont alors susceptibles de se déclencher. «Elles peuvent être si fortes qu’une hospitalisation est parfois nécessaire», constate l’ISPA.
A noter également que des cas d’hypertension et des problèmes cardiaques s’accroissent avec l’absorption orale de chanvre.
Enfin, les réflexes diminuent sensiblement et, par conséquent, l’aptitude à conduire aussi. Concrètement, la tenue de route devient problématique tout comme l’évaluation des distances.
Ne sentant pas l’effet du cannabis se manifester tout de suite, le consommateur peut aussi être tenté de boire de l’alcool entre-temps. «C’est, selon Christophe Polese, le mélange le plus explosif chimiquement.»
Pratique sporadique
«Cette pratique demeure tout de même minoritaire et expérimentale, poursuit Christophe Polese. Cela demande plus de travail de cuisiner un cookie que de rouler un simple joint.»
Et de conclure: «L’accoutumance est presque immédiate. Contrairement aux joints, l’effet psychotrope des ‘space cakes’ est dégressif. Au bout de trois ou quatre jours de consommation, on ne sent plus rien».
Il existe néanmoins un type de consommateurs réguliers de biscuits au cannabis. Ce sont des anciens fumeurs qui ont arrêté le joint pour protéger leurs poumons.
Friandises attrape-gourmands
Des témoignages de noctambules relatent la présence de ‘space cookies’ vendus ou offerts dans des lieux publics. A Zurich notamment, dans certains clubs alternatifs.
«J’avais faim et je me suis ruée sur les gâteaux. Mais rien n’indiquait qu’ils contenaient du cannabis, raconte une jeune Romande non-fumeuse. Je n’ai pas compris ce qui m’arrivait. Carrément malade, j’ai dû attendre le petit jour pour pouvoir reprendre le volant.»
Christophe Polese n’a constaté rien de pareil de ce côté-ci de la Sarine, où la consommation est peut-être moins ouvertement tolérée.
«Une vente de cookies devrait toujours s’accompagner d’un étiquetage détaillé, précise-t-il. La Coordination défend d’ailleurs systématiquement cette politique de prévention. La composition et les effets secondaires doivent être clairement décrits.»
swissinfo/Anne Rubin
– L’ISPA a accru ses campagnes de prévention depuis l’automne 1999, après que le Conseil fédéral a émis un message allant dans le sens de la dépénalisation de la consommation du cannabis.
– L’institut a publié des guides à l’usage des enseignants et des parents «Cannabis en parler aux ados». Début 2003, une vidéo va renforcer l’arsenal préventif.
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