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L’ambroisie essaime en Suisse romande

L'ambroisie progresse rapidement sur les terres helvétiques. ambroisie.info

Une plante fortement allergénique commence à envahir la Suisse. Pour l’heure, Genève reste le canton le plus touché.

Mais l’ambroisie s’implante vite, souvent au détriment des espèces indigènes. Et la lutte contre cette intruse peine à s’organiser.

L’Ambrosia artemisiifolia, plus communément appelée ambroisie, ressemble à n’importe quelle mauvaise herbe. On la retrouve sur le bord des routes autant que dans les prairies, les chantiers ou les jardins privés.

Mais à la différence de la majorité de ses congénères, l’ambroisie se distingue par son comportement envahissant. Sur-adaptée, elle résiste au froid autant qu’à la sécheresse et s’implante rapidement au détriment des espèces indigènes.

Un problème de santé publique



Mais cette plante, importée d’Amérique du Nord il y a seulement un siècle, ne se contente pas de menacer la biodiversité. Elle pose aussi un problème de santé publique.

Le pollen qui accompagne sa floraison, du mois d’août à début octobre, déclenche en effet des réactions allergènes plus ou moins importantes chez les personnes sensibles.

Selon les spécialistes, cinq grains de pollen par mètre cube d’air suffisent à provoquer ces allergies.

Et l’on comprend mieux l’ampleur du risque sanitaire lorsque l’on sait qu’un pied d’ambroisie peut libérer plusieurs millions de particules de pollen en une saison.

12% de la population concernés

Dans la région Rhône-Alpes – le territoire français la plus touché par le phénomène – 12% de la population est déjà frappé d’asthme, rhinite, eczéma ainsi que d’autres réactions allergiques imputables à l’ambroisie.

Le phénomène est d’autant plus inquiétant que la zone colonisée par cet envahisseur est en constante extension. Non contente de s’étendre dans l’Hexagone, l’ambroisie a également migré en terre genevoise.

Répertoriée comme plante rare il y a seulement dix ans, depuis 2001, l’ambroisie est considérée comme un véritable fléau dans la région du bout du lac.

Concentration de pollen limité



Pour l’heure, la plante ne pose pas encore de problème de santé publique. «Les concentrations de pollen critiques n’ont été mesurées que durant deux semaines par an», précise Catherine Lambelet, du Conservatoire et jardin botanique de la Ville de Genève.

Et la conservatrice d’ajouter, «toutefois, on a pu constater que les personnes préalablement sensibilisées à l’ambroisie présentaient déjà des réactions allergiques.»

La situation devient même critique car l’ambroisie élargit son territoire avec une indéniable rapidité. Après Genève, des foyers ont déjà été identifiés dans le canton de Vaud.

Jachères en cause

«La plante aime particulièrement les zones chaudes, sèches et riches en nitrates», explique Maurice Thomet, chef de culture au Conservatoire et jardin botanique de Genève.

«Elle se développe particulièrement dans les terrains laissés en friche, poursuit l’intéressé. On constate qu’elle progresse notamment au bord des autoroutes, dans les zones de chantier et les terrains agricoles laissés momentanément en jachère.»

Mais l’ambroisie a d’autres modes d’expansion. On trouve même des semences dans les graines utilisées pour la nourriture des oiseaux. Et certains horticulteurs continuent de commercialiser la plante.

Les lacunes de la législation

«Pour l’heure, aucune législation n’interdit la culture de l’ambroisie, précise Catherine Lambelet. Et l’information concernant la plante reste des plus lacunaires».

Un groupe de botanistes, agronomes, météorologues et médecins s’est d’ailleurs constitué à titre privé pour palier ce manque.

Les experts ont finalement été chargés par le Conseil d’Etat de Genève (gouvernement cantonal) de fournir d’ici à la fin de l’année un état des lieux et des pistes pour lutter contre ce nouveau fléau.

Les autorités se refusent pour l’instant à lancer une véritable campagne d’information, par crainte d’alarmer la population.

Une guerre qui coûte cher



Seuls les agriculteurs ont été sensibilisés au problème. Il faut dire que l’ambroisie engendre de sérieuses baisses de rendement dans certaines cultures.

Mais les paysans n’ont pas l’obligation de lutter contre l’envahisseur. Et ceux qui s’y attaquent ne reçoivent aucun dédommagement.

«Une situation d’autant plus regrettable que la lutte contre l’ambroisie peut coûter cher», souligne Catherine Lambelet.

Car, lorsque la plante est bien implantée, «il ne reste plus qu’à recourir à des désherbants. Et ils brûlent tout sur leur passage.»

Du trèfle ou de la luzerne

Comme souvent, la meilleure arme reste la prévention. Dans ce cas, cela passe par l’arrachage systématique des plants d’ambroisie et la protection des écosystèmes fragilisés.

«Il faudrait notamment recouvrir les sols en semant du trèfle ou de la luzerne pour éviter l’implantation de l’ambroisie», souligne Maurice Thomet.

Selon ce spécialiste, «les graines ont une durée de vie comprise entre 30 et 40 ans. Si l’on n’agit pas rapidement, elles vont s’accumuler dans le sol et il sera très difficile de s’en débarrasser.»

Un avis partagé par Catherine Lambelet. «Aujourd’hui, il est encore possible de contenir l’espèce pour autant que l’on mette en œuvre les mesures adaptées. »

En clair, il faut surveiller et traiter systématiquement les zones infestées et mais aussi informer la population pour lui permettre de participer activement à la lutte contre l’envahisseur.

swissinfo, Vanda Janka

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