
Celui qui contraint une femme à porter le niqab sera puni

(Keystone-ATS) Contraindre une femme à porter le voile intégral sera puni. La sanction pourra aller jusqu’à trois ans de prison ou 3000 francs. Le Conseil fédéral a mis mercredi en consultation ce projet, qui prévoit aussi de renforcer l’obligation de se montrer à visage découvert.
Le gouvernement a préféré miser sur cette approche plutôt que de décréter une interdiction du port du niqab ou de la burqa, comme le demande l’initiative de la droite. Selon le gouvernement, ce texte va beaucoup trop loin, monte en épingle un phénomène marginal et restreint l’autonomie des cantons.
Le Conseil fédéral estime néanmoins qu’il est inacceptable que des femmes soient obligées de porter le voile intégral. Il mise sur une réponse « plus ciblée » avec un contre-projet indirect, qui ne sera appliqué que si l’initiative est retirée ou rejetée. Les cantons qui souhaitent aller plus loin et interdire la dissimulation du visage dans l’espace public pourront le faire.
Punir les proches
Le code pénal devrait être renforcé pour pouvoir punir celui qui contraint une personne à se dissimuler le visage, en usant de violence envers elle, en la menaçant d’un dommage sérieux ou en l’entravant de quelque autre manière dans sa liberté d’action.
La mention explicite de cette infraction, qui sera poursuivie d’office, doit montrer qu’un tel comportement n’est pas toléré. L’interdiction de contrainte vaudra pour le domaine public et le domaine privé. La proposition du Conseil fédéral vise en particulier la burqa et le niqab mais aussi toute autre tenue ayant pour effet de couvrir presque intégralement le visage.
Complices aussi punis
La tentative, l’instigation et la complicité seront aussi punissables. Cela permettrait par exemple de sanctionner un membre ou un ami de la famille qui influencerait le mari ou les parents de façon à ce qu’ils contraignent l’épouse ou la fille à se voiler.
L’usage de la violence devra être compris comme l’emploi d’une force physique d’une certaine intensité à l’encontre de la victime. La menace d’un dommage sérieux vise la plupart du temps des biens juridiques de la victime.
C’est le cas notamment de l’exclusion du clan familial, du déshonneur et de l’opprobre social, de l’expulsion de l’appartement ou encore de la menace par le mari de ne plus fournir d’argent à son épouse sans profession. La sanction pourrait également tomber si l’auteur menace de faire du mal aux enfants ou à d’autres personnes proches de la victime ou quand il menace de se suicider.
D’autres comportements pourraient être pris en compte: ne pas adresser la parole à la victime, l’ignorer jusqu’à ce qu’elle se plie à la volonté de l’auteur, lui ôter toute liberté de mouvement en lui retirant ses habits, l’empêcher de communiquer en lui enlevant son téléphone portable.
Obligation de se découvrir renforcée
En renforçant l’obligation de montrer son visage dans certaines situations, le Conseil fédéral veut aussi introduire des règles claires pour éviter l’apparition de tensions. Le visage devra être découvert du front au menton lorsqu’une identification visuelle est nécessaire.
Le voile devra être provisoirement enlevé lorsqu’un représentant d’une autorité doit vérifier, en vertu du droit fédéral, l’identité d’une personne. Ce sera notamment le cas dans les domaines de la sécurité, des migrations et des assurances sociales.
Mais cela concernera d’autres situations où l’identidification visuelle est le seul moyen d’accomplir un tâche sans efforts disproportionnés. Par exemple dans les transports.
Un voyageur qui ne peut présenter un titre de transport valable doit attester de son identité et payer le prix de sa course ainsi qu’un supplément. Dans ces cas, un contrôleur doit pouvoir voir le visage de la personne afin de contrôler que le document d’identité présenté est bien le sien.
Refus amendé
L’injonction de se découvrir le visage devra être donnée au moins deux fois. Si la personne concernée refuse d’y donner suite, elle sera punie d’une amende allant jusqu’à 10’000 francs. Mais dans la grande majorité des cas, la douloureuse ne devrait pas dépasser quelques centaines de francs.
Le refus d’obtempérer ne sera pas punissable lorsque l’identification visuelle sert exclusivement les intérêts de la personne qui refuse de montrer son visage. Le plus souvent, la personne concernée se verra refuser la prestation demandée.