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Grande rétrospective Luginbühl à Bâle et Berne

Bernhard Luginbühl: «Rossaltar», 1993-1995. (Photo Brutus Luginbühl) swissinfo.ch

Le Musée Tinguely de Bâle et le Musée des Beaux-Arts de Berne se sont alliés pour organiser «Luginbühl total».

La rétrospective est une des plus importantes jamais consacrées à Luginbühl, qui, à 74 ans, affiche une énergie et un humour intacts.

Bernhard Luginbühl, 74 ans, est manifestement une terreur pour les muséologues, muséographes et historiens de l’art – une terreur qui est en même temps l’objet de toutes les séductions, à en croire l’enthousiasme des musées.

Le scultpeur bernois a en tout cas donné du fil à retordre aux organisateurs de la grande rétrospective qui lui est consacrée à Bâle et à Berne. Choix des œuvres provisoire jusqu’à la dernière minute, installations monumentales, transport: exposer Luginbühl est apparemment une aventure pleine de rebondissements.

«Hier, cette salle était un véritable chaos, a raconté le directeur du Musée Jean Tinguely, Guido Magnaguagno, jeudi, lors d’une conférence de presse. Aujourd’hui, ça a l’air rangé! Mais tout n’est pas encore prêt, puisque l’exposition ouvre officiellement dimanche.»

Long travail de persuasion



Quelques minutes auparavant, deux des trois fils du sculpteur, habillés comme à l’accoutumée de leur «bleu de travail» – bleu pour l’un, rouge pour l’autre – procédaient aux derniers réglages.

«Nous avons laissé Bernhard Luginbühl composer lui-même l’exposition, explique le conservateur du Musée Tinguely Andres Pardey. Il nous a continuellement surpris en nous amenant de nouvelles œuvres.»

L’idée même de l’exposition n’a pas été facile à imposer: longtemps farouchement opposé au Musée Tinguely, Bernhard Luginbühl avait finalement accepté l’invitation de Daniel Spoerri, autre ami de Jean Tinguely (1925-1991) à un «buffet pour les amis» du sculpteur décédé.

«Cela a été le début du projet, rappelle Guido Magnaguagno. Ensuite, il a encore fallu une année pour qu’il accepte.» Avant de conclure, le directeur laisse passer un silence ému: «Et s’il a dit oui, ce n’est pas pour nous, mais pour Jeannot.»

Jeannot, ou Jean Tinguely, que Bernhard Luginbühl avait rencontré en 1957. Les deux hommes ont travaillé ensemble, voyagé ensemble, cherché ensemble des éléments pour leurs sculptures, tout autour du monde.


Tingely et Luginbühl, une amitié forte documentée par les carnets de Bernhard Luginbühl, intitulés «jeantinguelytagebuchnotitzen», réédités à l’occasion de la rétrospective. Illustrés de photos des deux sculpteurs et de leur correspondance, le livre renseigne sur près d’un demi-siècle de création artistique.

«Sculpteur et transporteur»

Présent en famille jeudi à Bâle (avec son épouse Ursi et ses fils Brutus, Basil et Iwan), Bernhard Luginbühl a déclaré que l’exposition était pour lui «unique et très importante, même si faire des expositions est la chose la plus stupide au monde».

«Il faut d’abord créer la sculpture, donc la monter, puis la démonter, la transporter, la remonter. C’est pour cela que je dis que je suis sculpteur et transporteur!»

Tandis que le Musée des Beaux-Arts de Berne accueille les premières œuvres du Bernois, des sculptures en métal et bois réalisées jusque dans les années 70, le Musée Tinguely a été réaménagé pour faire de la place aux installations monumentales de Luginbühl.

A l’entrée, une paroi a été installée pour présenter 60 petites sculptures dans des niches.

Frères ou jumeaux?

La parenté avec les œuvres de Tinguely, dont la «Grosse Méta Maxi-Maxi Utopia» notamment est restée dans la grande salle, est manifeste. Proches dans la vie, les deux hommes ont aussi des parcours artistiques parallèles.

Le Fribourgeois est d’ailleurs omniprésent: dans la série des «Atlas», l’un des plus récents est baptisé «Zwilling» (jumeau et Gémeaux). Or Tinguely était astrologiquement du signe des Gémeaux. Un clin d’œil qui renvoie à leur complicité.

Sur la «Tour à canons», réalisée spécialement pour l’exposition, trône un pistolet-mitrailleur, au-dessus de plusieurs canons. «Je l’ai retrouvé par hasard, explique Bernhard Luginbühl. Tinguely, qui était mitrailleur, a protégé la frontière suisse avec cette arme.»

Bon et mauvais métal



La mitraillette, comme les canons, sont ce que le sculpteur appelle le «mauvais fer» ou «fer méchant», en opposition au «bon fer». Les sculptures sont faites des deux, mais aussi de crânes d’animaux, de chalutiers miniatures, de parties d’avions démembrés.

«Tous les éléments, petits ou grands, ont une signification pour moi, poursuit le sculpteur. Cette mitraillette, ça me rappelle le 4 décembre 1972, jour de Ste-Barbe, où nous avions terrorisé Berne avec Tinguely en tirant des coups de canon.»

Le titre de l’exposition, «Luginbühl total» renvoie aux différentes facettes de l’artiste puisque ses dessins, ses carnets, et ses films aussi sont présentés.

Mais il fait aussi allusion aux sculptures des trois fils Luginbühl qui sont disposées parmi celles de leur père.

swissinfo, Ariane Gigon Bormann à Bâle

«Luginbühl total»: du 21 septembre au 25 janvier 2004 au Kunstmuseum de Berne, du 21 septembre au 14 mars 2004 au Musée Jean Tinguely de Bâle.
Un premier catalogue raisonné des oeuvres de Bernhard Luginbühl paraîtra fin octobre aux éditions Scheidegger & Spiess, Zurich, en collaboration avec l’Institut suisse d’histoire de l’art de Zurich.
Il présente pour la première fois 1316 oeuvres du sculpteur, soit toutes celles recensées jusqu’au bouclage éditorial, sauf sept.
Mais l’auteur du catalogue Jochen Hesse a précisé que la moitié des oeuvres exposées à Bâle ont été créées récemment et ne figurent pas dans son ouvrage.
Les carnets de Bernhard Luginbühl «jeantinguelytagebuchnotitzen» ont été réédités à l’occasion de la rétrospective.
Une sculpture monumentale en bois sera brûlée à Bâle dans le courant du mois de janvier.
Né en 1929 à Berne, Bernhard Luginbühl s’est installé en 1966 à Mötschwil, où il a créé un parc d’exposition ouvert au public et une fondation à son nom.

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