Des perspectives suisses en 10 langues

Kolossal zpectakle!

Chaud, les guitares. rammstein.com

Des tonnes de métal et des hectolitres de propane. Après l’Europe et les Etats-Unis, Rammstein a conquis le Paléo. Enorme!

Mais il y avait aussi du rap, du rock et de la chanson ce soir-là sur la plaine de l’Asse. Entre autres.

Déferlante de métal sur le Paléo. Le noir, les chaînes et les clous dominent dans la foule. Rarement, jamais peut-être, on y aura vu autant de t-shirts frappés du nom d’un groupe. Avant d’être sur la grande scène, Rammstein est partout dans le public.

Un public d’ailleurs plutôt bon enfant. Leurs dégaines ne doivent pas y tromper, les métalleux, en principe, ne sont pas méchants. Mais ils boivent. Et ils fument.

Dire que leur groupe fétiche – qui carbure au gaz de ville et à la poudre noire – a mis le feu à la plaine de l’Asse, ça fait cliché ? Mais tout est cliché dans ce spectacle aussi grandguignolesque qu’il est redoutablement efficace.

Ça commence par un tomber de rideau (noir évidemment) sur une scène à deux étages, post-industrielle et métallique (évidemment) et l’apparition de six musiciens sérieux comme des terminators, intégralement vêtus de… noir. Evidemment.

La musique? Du lourd de chez lourd. Les tempos sont souvent mi-lents, mais ça balance. Gros riffs de guitares, déluge de batterie, une petite phrase aux claviers par-ci par-là pour détendre un peu l’atmosphère et la voix rauque de Till Lindemann, qui hurle et scande plus qu’il ne chante, dans une tessiture finalement assez limitée.

L’essentiel, de toute façon est ailleurs. Dans ce feu et ces étincelles qui jaillissent de partout et dans la maîtrise que les joyeux Teutons affichent à manier le lance-flammes. Il en tombe aussi des cintres sur la scène et une salve part même en direction du public. Mais pas de crainte: c’est du spectacle, et du spectacle sécurisé.

Le bassiste prend son bain de foule… dans un zodiac gonflable et Till l’espiègle, brandissant un couteau et affublé d’un tablier maculé de sang synthétique fait rôtir un de ses comparses à la marmite. A y regarder de plus près, on voit que celui-ci porte une version cuir noir de la culotte de peau bavaroise…

Comment on dit «fun» en allemand? «Spass»? Le public, en tous cas, ne boude pas le sien. Et si les Rammstein – que l’on a été jusqu’à traiter de nazis à leurs débuts – étaient simplement de formidables amuseurs?

Encore plus lourd

Avec les Romands de Samael, par contre, les choses semblent nettement plus sérieuses. Bien coté en Allemagne ou en Hollande, ce groupe est pratiquement inconnu dans son propre pays et ce soir-là, il a eu l’honneur d’ouvrir la grande scène pour Rammstein.

Ici, on est dans une forme encore plus radicale de métal. Du genre de celle qui vous donne l’impression d’assister à un tremblement de terre. Bizarrement, le groupe n’a pas de vrai batteur. C’est le clavier qui frappe le rythme et saisit parfois les baguettes. A vrai dire on n’a pas tellement fait la différence…

Pour le reste, on aura surtout vu des crinières de guitaristes voler au vent et une belle débauche d’énergie à faire pogoter un terrain entier. A moins que ce n’ait vraiment été un tremblement de terre…

«Yo man, yo!»

Mais les métallos n’étaient pas la seule tribu à la fête ce soir-là. Les amateurs de rap avaient aussi de quoi s’en mettre plein les oreilles.

Notamment avec Goldie Lookin Chain, sous le chapiteau. Ces huit Britanniques complètement déjantés se démènent tellement sur la scène qu’ils l’occupent en entier. DJ ou sampleur? Peu importe, celui ou ce qui produit la musique est caché pour ne laisser la place qu’aux seuls chanteurs.

Vêtus comme des ploucs (c’est voulu), dotés d’un humour féroce, ils se moquent ouvertement des rappeurs tout en maîtrisant parfaitement leurs tics, leurs tricks et leurs techniques. Y compris le nombre réglementaire de «f…» à la ligne. «Understand, we’ve smoked a lot of weed…» On comprend. Et on pardonne, parce que c’est jubilatoire à souhait.

En fin de soirée, le chapiteau a vibré une nouvelle fois avec Stress, que l’on présente comme l’enfant terrible du rap romand. Ambiance différente, avec des textes très noirs, qui parlent de zone, de drogues, de filles-mères, de vies brisées, de sexe triste ou qui invitent à «fuck Blocher».

Le groupe n’en est pas moins chaleureux. Car Stress, au contraire de nombreux chanteurs hip-hop, s’entoure d’une bande complète de musiciens, qui lorgnent parfois vers le reggae, voire la pop.

Il a aussi une bande complète d’inconditionnels, bondissants, joyeux et finalement assez bon enfant. Leurs dégaines ne doivent pas y tromper, les yos, en principe, ne sont pas (trop) méchants. Mais ils fument. Et ils boivent.

«Ne laisse pas passer ta chance»

Et puis, pour mettre les tribus d’accord, il y avait aussi d’autres musiques ce soir-là au Paléo.

Par exemple Tafta, le groupe romand qui monte, qui monte. Des titres qui passent en radio, un album vendu à la FNAC, pas mal de concerts… L’an dernier, les cinq Veveysans avaient conquis la scène FMR du camping. Cette fois, ils sont au club tent.

Leur rock francophone est entraînant, les solos de guitare à la pédale wah-wah touchent dans le mille, leurs compositions ne pâlissent pas face à la reprise de «L’aventurier» d’Indochine. Et surtout, ils ont déjà un joli noyau de fans.

Tafta tire son nom du mot turc qui signifie «tisser». Pas un hasard. Le groupe sait à merveille tisser les liens avec le public, à qui il fait reprendre en chœur «Ne laisse pas passer ta chance». Un titre-programme, assurément.

Pique-nique en 3D


Sur la grande scène, il y avait aussi Mickey 3D. Du statut de révélation, le groupe de Saint-Etienne est rapidement passé à celui d’institution. Sur scène pourtant, Mickaël Furnon et sa bande ne payent pas de mine.

Les t-shirts de foot et l’abominable nappe de table rose qui recouvre les claviers de Najah El-Mahmoud font plus penser à un pique-nique du dimanche qu’à la célébration d’une chanson française parmi les plus originales de ce début de siècle.

La musique sert parfaitement le propos. Jamais envahissante, elle met avant tout en valeur des textes à l’humour cynique et un rien désabusé. Chroniqueur du quotidien, Mickey 3D souligne nos grandeurs et nos bassesses avec une réelle justesse de ton.

«Tu vas pas mourir de rire?» Avec des mots simples, le groupe fustige tour à tour les va-t’en guerre qui font saigner l’Irak, la télévision, Jacques Chirac et les fans de foot.

Mickey 3D peut aussi se faire furieusement rock, pour nous rappeler au passage que c’est lui qui a «Demandé à la lune» pour la renaissance d’Indochine (encore).

Alors finalement, c’était peut-être quand même un pique-nique… Avec des voisins dotés du formidable talent de nous parler fort à propos de tout, de rien et de nous. Sans détours.

swissinfo, Marc-André Miserez au Paléo

Aujourd’hui samedi au Paléo:
Bernard Lavilliers, Calogero, Faithless, The Servant, Blues Explosion, Sigur Ròs, Mando Diao, Malkit Singh, le Suisse K et quelques autres.
Les concerts sont sold out depuis longtemps, mais pour tenter de couper court au marché noir, Paléo met chaque jour les 500 dernières places en vente dès 9 heures du matin. On peut les obtenir en ligne sur paleo.ch et dans tous les points de vente Ticketcorner.
Par contre, aucun billet n’est vendu aux caisses d’entrée.

En conformité avec les normes du JTI

Plus: SWI swissinfo.ch certifiée par la Journalism Trust Initiative

Vous pouvez trouver un aperçu des conversations en cours avec nos journalistes ici. Rejoignez-nous !

Si vous souhaitez entamer une conversation sur un sujet abordé dans cet article ou si vous voulez signaler des erreurs factuelles, envoyez-nous un courriel à french@swissinfo.ch.

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision