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De copieux plats de politique étrangère au menu de la session d’automne

Palais fédéral à Berne
La session d'automne du Parlement se tient du 8 au 26 septembre à Berne. Keysstone

La session d'automne qui s’annonce promet de grands débats de politique extérieure et de géopolitique. Avec trois initiatives populaires et une session spéciale sur l’asile, l’UDC va également marquer de son empreinte l’agenda des chambres fédérales.

En premier lieu, nous évoquons les thèmes particulièrement pertinents pour les Suisses de l’étranger.

Les thèmes liés aux Suisses de l’étranger

Une nouvelle initiative vise à permettre aux ressortissants suisses résidant à l’étranger d’accéder sans discrimination à un compte bancaire suisse. Une motionLien externe déposée par le conseiller aux États genevois Mauro Pioggia demande au Conseil fédéral d’imposer cette obligation à Postfinance. Le Conseil des États se prononcera à ce sujet le 25 septembre.

Une convention de sécurité socialeLien externe entre la Suisse et l’Argentine doit être approuvée par le Conseil des Etats. Elle apporte une sécurité juridique aux bénéficiaires suisses de rentes établis en Argentine.

La 13e rente AVS devrait également intéresser tous les retraités suisses installés à l’étranger. Elle arrivera en décembre 2026, mais on ne sait toujours pas comment elle sera financée. Pour le Conseil fédéral, le financement doit passer par une augmentation de la TVA.

Après le Conseil des Etats, qui a décidé d’y ajouter une augmentation des cotisations salariales, c’est au tour du Conseil national de se pencher sur la question. L’idée est de trouver, par le biais d’un scénario de transtion, le meilleur compromis qui permettra de couvrir des besoins estimés entre 4 à 5 milliards de francs.

Peut-être des Suisses de l’étranger détiennent-ils une partie de leur patrimoine en cryptomonnaies, qu’ils dissimulent en Suisse au fisc de leur pays de résidence. Qu’ils sachent que désormais, le Conseil fédéral veut là aussi la transparence, comme pour les comptes bancaires ordinaires. Largement approuvé par la commission, le projet d’échange automatique de renseignements relatifs aux crypto-actifsLien externe a de bonnes chances d’obtenir l’approbation du Conseil des États.

La thématique des mercenaires suisses engagés dans des armées étrangères – ce qui est interdit – paraît marginale, mais elle suscite l’intérêt, puisqu’elle sera abordée et par la gauche et par la droite. La fin justifiant les moyens, les deux camps réclament la clémence. Le conseiller national UDC Lukas Reinmann souhaite réhabiliter les Suisses ayant combattu l’Etat islamiqueLien externe, tandis que le conseiller national socialiste Jon Pult demande l’amnistie pour les combattants suisses en UkraineLien externe. (Lire ici notre sujet sur l’un de ces mercenaires).

Votations: trois initiatives de l’UDC au programme

Les sujets de futures votations se bousculent lors de cette session. La moitié des six initiatives à l’ordre du jour émanent de l’UDC, et ce sont toutes des poids lourds.

Le Conseil national doit se pencher sur l’initiative sur la neutralitéLien externe, qui veut ancrer une interprétation stricte de la neutralité dans la Constitution. Mais il y a un hic, ont dû constater les initiants: l’industrie suisse de l’armement subit les conséquences de la politique suisse de neutralité telle qu’elle est définie et mise en œuvre. La Suisse interdisant de livrer des armes suisses à l’Ukraine, les États partenaires évitent en effet de les acheter.

Conseil national
Les initiatives populaires occuperont une bonne partie des débats au Conseil national. Keystone / Peter Klaunzer

L’initiative devrait aggraver une situation déjà compliquée pour les fabricants helvétiques. Elle n’est donc pas soutenue par les cercles proches de l’armée. Pour pouvoir espérer un sauf-conduit, l’UDC aura besoin d’un assouplissement de la loi sur le matériel de guerre. L’opération s’annonce compliquée.

Le National doit également se pencher sur l’initiative «Pas de Suisse à 10 millions!Lien externe» de l’UDC, qui vise à forcer le Conseil fédéral à limiter l’immigration. Retrouvez ici notre débat sur cette thématique.

C’est au Conseil des Etats que sera débattue l’initiative sur la SSR «200 francs, ça suffit!Lien externe», avec laquelle l’UDC veut réduire la redevance de la SSR, maison-mère de Swissinfo.

Il est peu probable que ces trois initiatives soient soutenues par l’une ou l’autre des chambres fédérales. Elles n’en promettent pas moins de grosses campagnes chargées en émotion.

Autre initiative au programme, l’initiative sur les crèchesLien externe vient elle du PS. Elle demande que les parents soient financièrement soutenus pour les services de garde externes. La Commission de l’éducation du Conseil national s’est prononcée en faveur d’un contre-projet indirect. Le Conseil national prendra une première décision.

C’est le Conseil des Etats qui se penchera d’abord sur l’initiative pour un fonds climatLien externe. Le texte demande que la Suisse investisse entre 5 et 10 milliards de francs par an dans la protection du climat.

Le contre-projet direct du Conseil fédéral à l’initiative «l’argent liquide, c’est la libertéLien externe» a été approuvé par les deux chambres. Restent de mini-divergences sur lesquelles doit se pencher le Conseil national.

Politique étrangère: réactions à l’administration américaine

La session d’automne promet également de refléter les événements qui agitent le monde, en premier lieu la guerre dans la bande de Gaza. Le conseiller aux États Carlo Sommaruga (PS) souhaite que la Suisse condamne les «crimes israéliensLien externe», et une initiative cantonale genevoise demande la reconnaissance de la PalestineLien externe

La nouvelle politique américaine préoccupe elle aussi, comme le montrent différentes interpellations. La plus importante émane de la Commission de sécurité du Conseil national. La motion, qui s’appuie sur l’expérience vécue à la suite de la commande des F-35 américains, demande au Conseil fédéral de mener des discussions en vue d’un accord avec l’UE en matière de sécurité et de défenseLien externe.

De son côté, la conseillère aux Etats bâloise Eva Herzog (PS) plaide pour «renforcer la position de la Suisse en tant que pôle pharmaceutique». Sa motion est évidemment une réaction au coup de massue des tarifs douaniers de Donald Trump. Lesquels préoccupent également son collègue de parti Baptiste Hurni: «Quelles place et prospérité pour la Suisse avec l’administration TrumpLien externe?», demande son postulat.

Dans une autre motion, Eva Herzog prend à nouveau position face à la politique américaine, en l’occurrence au retrait mondial de l’Agence pour le développement international (USAID), privée de la quasi-totalité de ses fonds par l’administration américaine. Au titre de la coopération internationale, «il est temps que la Suisse se conforme à l’objectif mondial de 0,7 pour cent du RNB», demande-t-elle.

Deux modifications de lois liées à la reprise et à la mise en œuvre de règlements européens devraient donner lieu à de grands débats sur la Suisse et l’UE. Il sera question du pacte européen sur la migration et l’asileLien externe et du des modifications du code frontières SchengenLien externe, plus précisément de la réintroduction des contrôles aux frontières intérieures.

Économie extérieure: des centaines de millions de garanties pour l’Afrique

Le Conseil des États va par ailleurs se pencher sur une demande plus éloignée: le Conseil fédéral souhaite que la Suisse participe à l’augmentation du capital appelable de la Banque africaine de développement (BafD). Il demande au Parlement d’approuver à cet effetLien externe un crédit d’engagement d’un montant de 1,56 milliard de francs. La BafD est en difficulté en raison des arriérés accumulés par le Zimbabwe, pays membre.

Banque africaine de développement
Un accord à plus d’un milliard de franc: rencontre entre la direction de la Banque africaine de développement et la délégation suisse en juin 2024. African Development Bank

Dans le même temps, selon un article du site AllfricaLien externe, la Suisse chercherait à permettre à l’économie privée suisse de faire des affaires en Afrique. «La Suisse consoliderait ainsi son influence au sein de la BAfD», écrit le Conseil fédéral. Lequel précise que le capital appelable constitue un engagement conditionnel et ne peut être sollicité que dans des circonstances exceptionnelles, ce qui n’est encore jamais arrivé.

Par ailleurs, le Conseil national devrait valider l’actualisation de l’accord de libre-échange avec le ChiliLien externe. La Suisse pourra ainsi exporter davantage de chocolat vers le Chili, et le Chili livrer plus de vin en Suisse.

Toujours dans le cadre des accords de libre-échange (ALE), la Commission de politique étrangère du Conseil national demande à ce que l’approvisionnement en «matières premières stratégiquement importantesLien externe» qui manquent à la Suisse fasse systématiquement partie des futurs accords de libre-échange.

Attaque contre l’aide fédérale pour la Genève internationale

En juin dernier, le Conseil fédéral a décidé de renforcer la Genève internationale en tant que siège d’organisations internationales et a souhaité lui allouer 269 millions de francs pour la période 2026-2029. Genève joue un rôle central dans la politique étrangère suisse.

La commission des finances du Conseil national ne l’entend pas de cette oreille. Elle souhaite geler le plafond de dépenses et le réduire de 18,8 millions de francs par rapport au projet du Conseil fédéral. Le Conseil national va devoir se prononcer sur cet objetLien externe.

Politique intérieure: avion de chasse, frein à l’endettement et asile

En matière de politique intérieure, les coûts supplémentaires liés à l’achat des F-35 sont à l’ordre du jour. Une motion de la gauche demande à ce que tout crédit additionnel éventuel soit soumis à «l’approbation démocratique» du Parlement et du peuple. En clair: que le peuple puisse voter une nouvelle fois sur le coût des avions de combat.

C’est également le PS qui a déposé deux motions, l’une aux EtatsLien externe, l’autre au NationalLien externe, sur le frein à l’endettement. Toutes deux visent à assouplir les règles de l’équilibre budgétaire, de manière à ce que les excédents ne soient plus obligatoirement affectés à la réduction de la dette mais servent à alimenter le budget.

Enfin, les deux chambres sont appelées à se pencher sur une série de propositions venues de la droite, en l’occurrence de l’UDC, visant à durcir le système d’asile. Dans le cadre d’une session spéciale, le parti souhaite notamment introduire des cartes prépayéesLien externe pour les requérants d’asile, limiter l’aide juridiqueLien externe et restreindre le choix du lieu de résidenceLien externe.

La session d’automne des Chambres fédérales se tient du 8 au 26 septembre.

L’article a été complété avec la motion de Mauro Poggia le 9 septembre.

Texte relu et vérifié par Samuel Jaberg, traduit de l’allemand par Albertine Bourget/sj

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