Multiple Carole Laure

L'actrice canadienne est présente à Genève dans le cadre du festival «Cinéma tout écran».
A double titre: comme membre du jury, et en tant que réalisatrice d’un long métrage: «Les fils de Marie». Rencontre.
Carole Laure… chanteuse, comédienne, réalisatrice depuis peu et membre du jury de la compétition officielle, qui regroupe quatorze téléfilms. Jurée, un statut qui lui convient? «Quand c’est un festival intéressant, à chaque fois que je peux, j’accepte.»
Et de préciser sa démarche: «Je trouve archi-intéressant de prendre quelques jours et de découvrir beaucoup de films que je n’aurais pas nécessairement la chance de voir ailleurs. Parce que c’est mon métier. Par contre, pour ce qui est de juger, je fonctionne comme une spectatrice ordinaire».
Avec une bonne trentaine de films à son actif en tant que comédienne, on doute tout de même un peu de son statut de spectatrice lambda. D’autant plus qu’elle vient de passer de l’autre côté de la caméra avec «Les fils de Marie», un film – de cinéma, celui-ci – tourné en 2001, et qui a été présenté à Cannes dans le cadre de la «Semaine de la Critique».
Mère cherche fils…
Les petites annonces peuvent servir à tout. Et, fondamentalement, à combler un manque, quel que soit ce manque. Ainsi, Marie Hamel (interprétée par Carole Laure elle-même) publie celle-ci: «Mère ayant perdu fils cherche fils ayant perdu mère». Il faut dire qu’une année auparavant, son mari et leur enfant sont morts lors d’un accident de la circulation.
Son message rencontrera un écho. Ou plutôt des échos. Voici donc Marie entourée de quatre nouveaux ‘enfants’, d’âges, de caractères et de milieux divers. S’ils ne sont pas nécessairement orphelins, tous soufrent de carences affectives. «C’est une histoire de cordon ombilical coupé dans les deux sens», constate Carole Laure, qui a écrit le scénario en compagnie de Pascal Arnold.
Marie peut enfin offrir son trop-plein d’amour, se muer en mère-poule, tenter de panser les plaies des autres et les siennes en même temps. Jusqu’à la limite de la folie. «Oui, il y a une fêlure. Elle n’est que là-dedans, elle ne voit même pas le danger, par exemple le rôle que l’un des ‘enfants’, joué par Jean-Marc Barr, tente de lui faire jouer».
«Un sujet qui me fascine»
La démarche de Marie ne sera pas aisée, car ses nouveaux enfants sont effectivement tous plus ou moins des cas sociaux. «C’est-à-dire qu’ils reflètent bien notre société», corrige Carole Laure. Laquelle, ne l’oublions pas, vit sur le continent américain…
Et surtout, la démarche de cette femme, par la force des choses, repose sur un mensonge. L’amour n’existe pas en soi, et on ne remplace pas un être aimé par d’autres êtres, quels que soient les liens qu’on tisse avec eux.
Au-delà du cas personnel de Marie, c’est la place de la mère qui est évoquée dans le premier film de Carole Laure. La mère, qui se donne corps et âme à ses enfants, pour se retrouver, tôt ou tard, délaissée.
Qu’est-ce que Carole Laure a projeté d’elle-même dans le personnage de Marie? «Comme j’ai co-écrit le scénario, je suis dans tous les personnages. Mais pour le personnage que j’interprète, ce qui m’intéressait, c’était d’exprimer les choses le plus sincèrement possible, physiquement, et avec finalement peu de mots. Ce n’est pas un film racoleur. De toute évidence, c’est un sujet qui me fascine».
Changement d’image
Carole Laure, bouche pulpeuse et crinière sombre, hante l’imaginaire masculin depuis le milieu des années 70, grâce notamment à plusieurs rôles à la sensualité affichée… «Les fils de Marie» peut donc surprendre.
«Ce personnage, c’est aussi moi. Je ne me suis pas mise dans un rôle de séductrice, et c’est vrai, les gens ne m’attendaient pas dans un rôle de mère. Par contre, si je me remets un jour en scène, ce sera nécessairement autre chose… Mais j’avais besoin de faire ça», relève l’actrice-réalisatrice.
Pour l’heure, Carole Laure s’apprête à replonger dans un tournage, prévu en juin prochain. Un film qui lui permettra de renouer avec deux de ses passions: «Il aura à faire avec la danse et la musique. La musique est une chose qui est toujours présente dans ma vie».
Mais auparavant, il y aura la sortie de ces étonnants «Fils de Marie», sortie prévue en mars 2003.
swissinfo/Bernard Léchot
La 8e édition de «Cinéma tout écran» se tient à Genève jusqu’au 27 octobre.
Un festival précurseur qui, dès son origine, s’est consacré au cinéma de fiction produit par et pour la télévision.
Invité d’honneur de ce millésime: les télévisions canadiennes CBC et Radio Canada, qui fêtent leurs 50 ans d’existence.
Outre la Compétition officielle, ‘Cinéma tout écran’ propose plusieurs sections: Nouveautés, Séries et Collections, Courts-métrages, téléfilms suisses.
Une rétrospective de l’œuvre du réalisateur canadien Atom Egoyan est également à l’affiche.

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