La nouvelle loi contre le blanchiment s’attaque au parabancaire
Après des années de laxisme, le secteur non bancaire est soumis à une loi très stricte qui va poser des problèmes d’application à de nombreuses sociétés.
Après des années de laxisme, le secteur non bancaire est soumis à une loi très stricte qui va poser des problèmes d’application à de nombreuses sociétés.
La Suisse possède désormais un arsenal législatif de lutte contre l’argent sale qui figure parmi les plus complets du monde. La loi sur le blanchiment (LBA) entrée en vigueur en avril 1998, laissait deux ans au secteur parabancaire pour se conformer aux nouvelles dispositions. Dès le 1er avril, elle s’applique donc pleinement.
La LBA oblige les intermédiaires financiers à dénoncer les clients douteux à un Bureau de communication et à bloquer les valeurs concernées pendant 5 jours. Ce Bureau, rattaché à l’Office fédéral de la police, examine les cas et communique ceux qui lui semblent fondés aux autorités pénales.
Le système de surveillance de la LBA est fondé sur l’autocontrôle. Les intermédiaires financiers non bancaires doivent soit s’affilier à un organisme d’autorégulation reconnu par Berne, soit obtenir une autorisation d’exercer directement auprès de l’Autorité de contrôle fédérale. A défaut, ils devront cesser leur activité. Ce sont quelque 5000 sociétés financières, un millier de gestionnaires de fortunes indépendants et environ 500 avocats et notaires spécialisés qui ont dû s’adapter. Jusqu’à présent ils étaient libres de tout contrôle.
Le problème c’est que le texte de la LBA ratisse large. Sont réputés intermédiaires financiers, «les personnes qui, à titre professionnel, acceptent, gardent en dépôt ou aident à placer ou à transférer des valeurs patrimoniales appartenant à des tiers». Le simple fait de recevoir de l’argent d’un tiers pour effectuer une transaction transforme n’importe quelle société en un intermédiaire financier.
Des courtiers immobiliers, les sociétés de leasing ou des hôteliers qui effectuent des opérations de change tombent, par exemple, dans cette catégorie. Pour les opérations de change, le seuil de contrôle est fixé à 5000 francs suisses. C’est donc une véritable révolution qui s’abat sur le secteur parabancaire helvétique. Les sanctions pourront atteindre 200 000 francs suisses d’amende.
Des dispositions qui risquent d’engendrer des situations inextricables. Des milliers d’entreprises, qui souvent l’ignorent encore, vont devoir appliquer en matière de blanchiment les mêmes règles d’autodiscipline que les banques. Elles devront s’assurer de l’identité de leurs clients, connaître l’ayant droit économique des fonds, établir et conserver des documents sur les transactions, etc. «C’est un monde de formalisme», s’emporte un expert-comptable. Il est vrai que cette structure coûteuse risque de mettre à mal les finances de petites entreprises, sans oublier le risque d’effrayer les clients en quête de discrétion.
Luigino Canal
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