
Loi sur l’énergie: les chauffages électriques échauffent les débats

Les esprits se sont échauffés mardi au Grand Conseil vaudois, qui a continué de se pencher sur la grande réforme de la loi sur l'énergie. Les chauffages électriques ont fait leur grand retour en débat, suscitant l'exaspération de la gauche de l'hémicycle, plus globalement irritée aussi par le détricotage par la droite du projet de loi, fruit d'un laborieux mais équilibré compromis en commission.
(Keystone-ATS) Il s’agissait de la troisième séance consacrée à cette révision de la loi sur l’énergie (LVLEne), ses 80 articles et les plus de 90 amendements proposés après les 21 séances de la Commission de l’environnement et de l’énergie (CENEN). Les discussions ont repris à l’article 39 le matin pour ne se terminer qu’à l’article 43 (même pas voté) en fin d’après-midi, toujours en première lecture du texte.
Et il n’aura pas fallu très longtemps pour que les esprits s’échauffent, en raison des sous-amendements s’accumulant depuis le début de ce premier débat afin de glisser des dérogations, notamment pour les propriétaires de bâtiments.
C’est au sujet des chauffages et chauffe-eau électriques que la tension est montée d’un cran, alors que les députés avaient voté fin 2022 la fin de ce type d’installations d’ici 2033, non sans quelques exceptions, après trois longs débats avec leur lot de surprises et de suspense. Cet assainissement a été fixé dans un décret du Conseil d’Etat entré en vigueur le 1er janvier dernier.
«Affaiblissement de la loi»
Sans surprise, c’est le député-électricien Guy Gaudard (PLR) qui a remis l’ouvrage sur le métier, soumettant au plénum un amendement fixant une exception à l’assainissement des chauffages électriques si un bâtiment était couvert à 70% par de l’énergie solaire.
«Il faut arrêter d’ajouter des dérogations, des exceptions et des exonérations, ça vient affaiblir et complexifier cette loi (…) On va arriver à une loi trop peu ambitieuse (…) C’est tout le compromis trouvé en commission qui est en train de voler en éclat», s’est fâché l’élu écologiste Alberto Mocchi.
Plus excédée encore, la députée de la gauche radicale Mathilde Marendaz s’est dite «offusquée de ce détricotage de la loi». «Le PLR veut vider la loi de sa consistance, c’est une stratégie globale de détricotage sous couvert de détails techniques revus et corrigés». Elle a estimé que le compromis n’existait plus, mais que son parti (EP) allait continuer de «défendre la science face au lobby de l’immobilisme climatique».
D’autres élus de gauche se sont plaints de «retours en arrière», de «loi affaiblie», «de vote de posture à droite» ou ont regretté de devoir refaire le travail déjà effectué en commission. «On a encore le droit de défendre nos opinions en plénum, c’est notre droit et devoir de parlementaire», a répondu le PLR François Cardinaux.
Le ministre de l’environnement Vassilis Venizelos lui-même a parlé d’un «affaiblissement du dispositif cantonal déjà existant». «Nous avons le dispositif le plus agile et le plus souple de Suisse», a-t-il martelé. Après de longs échanges, l’amendement de M. Gaudard a été refusé par 71 non, 62 oui et 8 abstentions.
La voiture électrique divise
L’électrification du parc automobile a aussi suscité de très longues discussions, l’après-midi. Plus précisément sur la question des infrastructures de recharge pour les véhicules électriques.
Elles ont commencé sur le pourcentage de places de stationnement nécessaires pour les bâtiments d’entreprises (au moins 25% pour l’électrique) pour glisser vers un débat sur la politique publique de mobilité, le transport modal, le pour ou contre les voitures électriques, un plaidoyer pour les véhicules plus légers, les trams et même le nucléaire.
La députée socialiste et scientifique Aude Billard a carrément suggéré de supprimer tout l’article sur ce thème, plusieurs tableaux et chiffres à l’appui. Ce n’est pas écologique de transiter vers la voiture électrique, a-t-elle dit en substance, évoquant notamment la lourdeur des voitures électriques, leurs batteries et composants ou encore les émissions grises. Elle a plaidé pour la décroissance du parc automobile en général.
Au final, après recentrage du débat, l’article a été largement maintenu, mais modifié par le PLR. Le nouvel amendement, voté par 71 oui et 61 non, supprime en effet les objectifs fixés par la commission en termes de pourcentage et de délais pour cette électrification des places de stationnement existantes destinées aux employés. Il privilégie une solution plus progressive en fonction de l’évolution du marché et du parc automobile.
Loin d’être fini
Les députés ont ensuite à peine eu le temps de commencer l’examen de la réglementation en matière d’éclairage des bâtiments non résidentiels – vitrines de commerces par exemple – et de l’espace public. Ils devaient se prononcer sur une extinction imposée de 23h00 à 06h00 pour les commerces (sauf en cas d’activité).
Les débats reprendront à cet article 43 de la loi après les vacances scolaires d’automne, soit le 28 octobre. Il y aura aussi de toute manière un deuxième débat.