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Renvois forcés: les méthodes de la police sur la sellette

Le bâtiment du Centre d'application de la loi sur les mesures de contraintes, à Granges, où est mort Samson Chukwu. Keystone Archive

Le rapport d'autopsie du requérant d'asile nigérian mort dans une prison valaisanne en mai dernier a été rendu public jeudi. Il conclut que l'origine la plus probable du décès est l'asphyxie. Ce qui met une nouvelle fois en cause les renvois forcés et les méthodes de contraintes utilisées.

C’est à l’initiative du juge d’instruction chargé de l’affaire que les conclusions du rapport d’autopsie ont été publiées. Selon Jacques de Lavallaz, ce rapport ne permet pas de lancer une enquête formelle et donc d’inculper ou de disculper les policiers impliqués dans la mort de Samson Chukwu.

Ventre à terre, mains dans le dos

Ce requérant d’asile nigérian dont la demande d’asile avait été rejetée par l’Office fédéral des réfugiés, avait fait l’objet d’une mesure d’expulsion. C’est en cherchant à le conduire à l’aéroport que les policiers, au vu de sa résistance, l’avaient plaqué au sol, ventre à terre, pour lui menotter les mains dans le dos.

«Il a dû supporter une partie du poids du corps d’un policier placé sur lui et notamment sur son thorax, ce qui a constitué une entrave aux mouvements respiratoires», détaille le rapport d’autopsie.

Suite à l’emploi de cette méthode d’immobilisation et vu l’effort physique fourni par la victime pour se débattre, le rapport conclut : «Le décès de Samson Chukwu peut être attribué à une asphyxie».

Une méthode dangereuse, selon Amnesty

«Une chose est claire, la méthode utilisée est extrêmement dangereuse», estime Neyris Lee, qui suit cette affaire pour Amnesty international et qui a lu l’intégralité du rapport d’autopsie.

Le juge valaisan, lui, est beaucoup moins catégorique. «Toutes les polices du monde utilisent cette position. A ma connaissance, c’est la première fois qu’une telle méthode entraîne des problèmes», précise à swissinfo Jacques de Lavallaz.

Pour déterminer l’éventuelle culpabilité des policiers, le juge va donc se pencher sur les instructions données aux policiers valaisans et voir si des mises en garde y figurent.

De son coté, Neyris Lee regrette que les autorités valaisannes et la police cantonale ne lui aient pas communiqué ces instructions, comme elle le demandait. Mais, par avance, elle recommande la suppression de cette méthode.

Nécessité de règles claires

A l’instar de plusieurs associations suisses telles l’OSAR et l’association Augenauf, Amnesty international insiste en tout cas sur la mise en place de règles claires concernant les mesures de contrainte utilisées pour les renvois forcés de requérants d’asile.

Des méthodes déjà contestées suite à la mort d’un Palestinien, en 1999, à l’aéroport de Kloten, lors de son expulsion. Un médecin, impliqué dans cette affaire, avait été condamné au début de ce mois par un tribunal zurichois.

Coïncidence: le Haut Commissaire de l’ONU aux réfugiés Ruud Lubbers a dénoncé jeudi les refoulements de plus en plus fréquents de demandeurs d’asile dans le monde, à l’occasion du 50ème anniversaire de la Convention de l’ONU sur les réfugiés.

Frédéric Burnand

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