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La police bernoise a évacué les militants écologistes.

Aujourd’hui en Suisse

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En cette dernière semaine d’une session parlementaire d’automne quelque peu chahutée par les manifestants écologistes, les élus suisses réunis à Berne n’ont pas chômé.

Les deux Chambres fédérales ont bouclé la loi Covid-19, qui vise principalement à prolonger des aides financières jusqu’à la fin de l’année. Elles ont aussi -enfin- réussi à s’entendre sur la substance de la future loi sur le CO2, l’outil par lequel la Suisse espère atteindre ses objectifs climatiques.

Les juges fédéraux ont été réélus, malgré une controverse sur leur indépendance politique. Et un procureur extraordinaire a reçu la confiance du Parlement pour instruire l’enquête sur Michael Lauber, l’ancien procureur général de la Confédération.

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La future loi sur le CO2 vise à permettre à la Suisse de réduire ses émissions de gaz à effet de serre.
La future loi sur le CO2 vise à permettre à la Suisse de réduire ses émissions de gaz à effet de serre. Keystone / Steffen Schmidt

Les Chambres fédérales ont finalisé la nouvelle loi sur le CO2, après un long feuilleton parlementaire. La réforme introduit plusieurs mesures qui doivent permettre à la Suisse de tenir son engagement de réduire, d’ici 2030, ses émissions de CO2 de moitié par rapport à 1990, avec l’espoir de contenir le réchauffement climatique à 1,5 degré.


Cette réforme prévoit une taxe sur les billets d’avion de ligne. Le montant variera entre 30 et 120 francs, selon la distance et la classe de transport. Les vols en jets privés seront également taxés. Le mazout coûtera lui aussi plus cher, puisque le plafond de la taxe sur les combustibles fossiles passera de 120 à 210 francs par tonne de CO2.

Le prix de l’essence sera majoré -jusqu’à 10 centimes par litre dans un premier temps, puis jusqu’à 12 centimes dès 2025. Des mesures ont aussi été prévues pour favoriser la conversion écologique des transports publics. Dans le domaine des bâtiments, les émissions des nouvelles installations de chauffage devront être drastiquement réduites.

La loi prévoit encore la création d’un Fonds pour le climat. Son but sera d’encourager les mesures en faveur de la lutte contre le changement climatique. Le peuple devrait avoir le dernier mot sur cette réforme de la loi CO2, l’Union démocratique du centre (UDC, droite conservatrice) ayant déjà annoncé son intention de soutenir un éventuel référendum lancé par les organisations économiques touchées.

La police bernoise a évacué les militants écologistes.
La police bernoise a évacué les militants écologistes qui campaient depuis lundi devant le Palais fédéral. Keystone / Anthony Anex

Les manifestants pour le climat, qui occupaient depuis lundi la Place fédérale à Berne, ont été évacués quelques heures avant la reprise des débats. La ville de Berne leur avait proposé à plusieurs reprises de déplacer leur camp sur une base volontaire, ce qu’ils ont refusé. Après un dernier ultimatum ignoré mardi soir, la municipalité a demandé à la police d’intervenir.


Les activistes ont opté pour la résistance passive. Sans s’opposer mais en jouant les poids morts, ils ont attendu que les agents les portent pour les déloger. Certaines personnes enchaînées à des objets ont dû être détachées au sécateur. La police a également démonté leurs installations et interpellé plusieurs manifestants.

Cette action a pimenté la session parlementaire, qui prendra fin vendredi, et fortement divisé les élus. Le camp bourgeois, comme les présidences des Chambres fédérales, insistaient sur l’illégalité de ce campement, les manifestations étant interdites devant le Palais fédéral pendant les sessions parlementaires. La gauche y voyait surtout un combat légitime face à l’urgence climatique.

Existe-t-il alors un moyen de préserver le climat qui mettrait tout le monde d’accord? Katrin Schregenberger, rédactrice en chef de la revue scientifique higgs.ch, lance une piste: l’instauration d’une «semaine nationale d’expérimentation climatique». Cette option permettrait, selon elle, de «tester de nouvelles stratégies», d’en «identifier concrètement les avantages et les inconvénients» et «recueillerait certainement une plus large adhésion» en étant «plus économique et efficace».

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Modéré par: Pauline Turuban

Que pensez-vous de la désobéissance civile prônée par certains militants pour le climat? La fin justifie-t-elle les moyens?

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Les juges fédéraux sont élus par le Parlement.
Les juges fédéraux sont élus par l’Assemblée fédérale, c’est à dire les deux chambres du Parlement réunies. Keystone / Peter Klaunzer

Les 38 juges au Tribunal fédéral, la plus haute instance judiciaire suisse, ont été réélus par l’Assemblée fédérale. Y compris le magistrat Yves Donzallaz, qui faisait l’objet d’une attaque inédite de la part de son parti, l’UDC.


Ces dernières années, Yves Donzallaz a rendu à plusieurs reprises des verdicts allant à l’encontre de la politique de l’UDC – raison pour laquelle le parti de droite conservatrice appelait à ne pas le réélire (le Valaisan de 58 ans avait pourtant été nommé à ce poste en 2008 par le patriarche de l’UDC, Christoph Blocher).

Défendant la séparation des pouvoirs, tous les autres groupes ont rejeté la proposition de l’UDC. Il y a quelques jours, le spécialiste du sujet Lorenz Langer expliquait à swissinfo.ch qu’on n’avait encore jamais vu de parti politique tenter de destituer un juge fédéral.

L’article rappelait aussi que le mode d’élection des juges de la cour suprême suisse est critiqué à l’étranger. En 2018, le Conseil de l’Europe l’a qualifié d’«incompatible avec les principes d’une démocratie moderne». Il juge particulièrement critiquable le fait que les juges élus doivent donner chaque année une partie de leur salaire à leur formation politique et y voit une forme de financement indirect des partis. Une initiative populaire a d’ailleurs abouti l’an dernier pour demander que l’élection des juges du Tribunal fédéral se fasse par tirage au sort.

L’ancien procureur général de la Confédération, Michael Lauber.
L’ancien procureur général de la Confédération, Michael Lauber. © Keystone / Anthony Anex

Le Parlement a aussi accordé sa confiance à Stefan Keller, élu procureur général extraordinaire de la Confédération. Il sera chargé d’instruire l’enquête sur les rencontres secrètes entre l’ancien procureur général de la Confédération, Michael Lauber, et le président de la FIFA, Gianni Infantino.


Cette élection va-t-elle représenter un tournant dans l’affaire? Ma collègue Marie Vuilleumier s’est entretenue avec Rémi Dupré, journaliste pour le quotidien français Le Monde et spécialiste des affaires judiciaires liées à la FIFA. Pour le journaliste, l’élection de Stefan Keller devrait, en principe, accélérer l’enquête pénale qu’il a lui-même ouverte fin juillet.

Les rencontres secrètes «ont eu un fort impact à la fois médiatique et politique», analyse Rémi Dupré. «Elles ont terni l’image du Ministère public de la Confédération (MPC), soupçonné de collusion avec la FIFA dirigée par M. Infantino, elle-même partie civile et plaignante.» Par voie de conséquence, elles ont aussi porté atteinte à l’image de la Suisse à l’étranger, selon le journaliste.

Les procédures judiciaires en cours en Suisse auront «inévitablement (…) un impact sur l’image de la FIFA», affirme-t-il encore dans l’interview. «Cette nouvelle affaire met en exergue (…) l’aspect systémique des scandales à la FIFA. (…) Les réformes mises en place en 2016 (limite des mandats du président, transparence concernant les salaires) avant l’arrivée au pouvoir de M. Infantino semblent n’avoir pas suffi à changer la donne.»

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