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La presse salue un vote «clair et net»

La presse suisse a salué le oui à l'extension de la libre circulation des personnes. swissinfo.ch

Les journaux de lundi se réjouissent de l'acceptation de l'extension de la libre circulation des personnes. Pour eux, le pragmatisme l'a emporté sur la peur.

Mais les analystes sont unanimes: le vote de dimanche ne règle pas la question européenne. Il faudra trouver de nouvelles solutions pour un dossier en constante évolution.

Tous les éditorialistes saluent le vote du peuple. Les adjectifs ne manquent d’ailleurs pas pour qualifier ces Suisses qui ont su faire le bon choix à leurs yeux: «matures», «lucides», «de bon sens», «raisonnables», «assurés», «perspicaces».

La presse est d’autant plus ravie du résultat que rien ne laissait prévoir un résultat aussi clair. Et La Liberté de Fribourg d’ironiser sur les prévisions des sondeurs: «Le pragmatisme helvétique n’est apparemment pas encore décelable dans le marc de café.»

Pragmatisme avant tout

Les éditorialistes n’en déduisent cependant pas que l’Union européenne (UE) a soudainement la cote auprès d’une majorité du peuple suisse. Pour eux, le vote de dimanche est avant tout le triomphe du pragmatisme. Les Suisses savaient où était leur intérêt et ne s’y sont pas trompés.

Le Tages Anzeiger de Zurich résume assez bien l’opinion générale en parlant d’un «pragmatisme sans grande émotion». Pour le Bund de Berne, l’acceptation de la libre circulation des personnes représente «un vote pas enthousiaste, mais réaliste».

C’est exactement le même son de cloche du côté de la presse romande. «Cette majorité fait ainsi preuve d’un réalisme de bon aloi. Elle rappelle que le peuple helvétique sait faire preuve de discernement quand ses intérêts sont en jeu», écrit par exemple la Tribune de Genève.

Un pays à nouveau uni

Plusieurs analystes – en Suisse romande surtout – saluent le fait que le vote de dimanche n’a pas débouché sur un clivage entre romands et alémanique. Le Röstigraben né un certain 6 décembre 1992 a disparu. La Tribune de Genève titre d’ailleurs: «L’EEE a creusé le Röstigraben. Les bilatérales l’ont refermé.»

Et le quotidien du bout du lac de préciser: «avec une Suisse allemande moins europhobe et une Romandie moins europhile, l’unité nationale s’est largement recréée dans le dossier européen.»

Reste le cas du Tessin qui, au fil des scrutins, continue à voter contre tout rapprochement avec l’UE. «L’explication pourrait venir du fait que le Tessin paye déjà un tribut plus élevé que les autres cantons aux bilatérales, surtout en raison du trafic de transit et de la libre circulation», avance le Corriere del Ticino.

Défaite des «faiseurs de peur»

Pour le Blick, le vote de dimanche marque «la victoire du courage et la défaite des faiseurs de peurs».

Pour les éditorialistes, l’Union démocratique du centre (UDC / droite dure) figure au premier rang de ces «faiseurs de peur». Or le vote de dimanche marque pour elle une nouvelle défaite sur un dossier européen, après l’acceptation de l’accord bilatéral de Schengen/Dublin.

«La netteté du scrutin est un avertissement à l’UDC qui a cru pouvoir surfer sur le sentiment d’insécurité d’une partie de la population et sur une certaine forme de xénophobie», écrit par exemple Le Nouvelliste.

Mais pour le quotidien valaisan, il convient cependant de ne pas enterrer trop vite le parti de la droite dure. «A moyen terme, ce verdict lui facilite les choses en lui permettant de rester dans l’opposition. C’est plus confortable que d’avoir à assumer la responsabilité d’une crise politique avec l’Union européenne», écrit-il.

Pas d’adhésion en vue

Les analystes de tout le pays sont unis sur un point; le vote de dimanche ne constitue en aucun cas un feu vert pour une adhésion de la Suisse à l’UE. Du moins pas dans un avenir proche.

«Pour autant, et malgré sa clarté, ce vote ne change guère les perspectives européennes du pays, écrit Le Temps. Il n’exprime en rien une subite foi en l’UE qui relancerait un processus d’intégration.»

«Le Conseil fédéral doit laisser la demande d’adhésion là où elle est: dans les tiroirs», écrit le commentateur de la Berner Zeitung. Pour la Neue Zürcher Zeitung, il n’y a pas lieu de se précipiter: «le débat doit avoir lieu au sein du Conseil fédéral et des partis».

L’adhésion n’est donc pas pour demain. «Dans l’immédiat, il est urgent d’attendre! Sans retirer notre demande d’adhésion (inutile insulte à tous nos voisins) ni l’activer (absurde dans les circonstances intérieures actuelles)», écrit le grand quotidien vaudois 24 heures.

Mais les analystes sont bien conscients que les débats ne pourront pas être remis éternellement, d’autant que les relations avec l’UE évoluent constamment. «Au Conseil fédéral de mettre sur la table tous les dossiers et de décider du rythme de notre marche vers l’Europe. Que rien n’arrêtera», conclut Le Matin.

La presse étrangère satisfaite

La presse internationale a également salué le vote du peuple suisse. Ce vote a permis d’éviter une «confrontation» entre l’UE et l’un de «ses non-membres les plus célèbres» estime le Financial Times.

En France et en Belgique, la presse constate que les Suisses soutiennent pleinement le système d’une «Europe à la carte» choisi par le gouvernement depuis 1999, «la Confédération restant obstinément à l’écart du club des 25» selon Libération. Mais la voie bilatérale deviendra de plus en plus difficile à poursuivre avec 25 partenaires relève le Figaro.

En Autriche, le Standard estime qu’après la votation, la Suisse reste toujours aussi «proche et à la fois éloignée de l’Europe». L’idée d’une adhésion, même à moyen terme n’entre pas en ligne de compte.

En Allemagne, la Süddeutsche Zeitung se demande si le Conseil fédéral a même un but à long terme sur l’Europe. Selon le quotidien, le gouvernement hésite à donner une réponse claire, alors que «les Européens ont le droit de savoir où ils en sont avec la Suisse». Mais le résultat pourrait être décevant, conclut le commentateur.

En Italie, la plupart des grands journaux relatent également le scrutin suisse. La Repubblica parle notamment d’une Suisse «un peu moins eurosceptique et un peu plus eurocompatible».

swissinfo

Oui: 1’457’807 voix (56%).
Non: 1’146’784 (44%).
L’extension de la libre circulation a été acceptés par 16 cantons et 3 demi-cantons.
Elle a été rejetée par 4 cantons et 3 demi-cantons.
La participation a atteint 54%.

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