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Dragnea, l’homme fort du pouvoir en Roumanie, incarcéré après à sa condamnation

Liviu Dragnea a été empêché de briguer le poste de Premier ministre en raison d'une condamnation avec sursis dans un autre dossier judiciaire, portant sur des fraudes électorales. Ses détracteurs l'accusent de chercher à assouplir le code pénal afin d'échapper aux différentes procédures le visant. KEYSTONE/EPA/ROBERT GHEMENT sda-ats

(Keystone-ATS) L' »homme fort » de la Roumanie, le patron de la gauche Liviu Dragnea, a été incarcéré lundi. Son entrée en prison est intervenue peu après sa condamnation à trois ans et demi de prison ferme dans son procès en appel pour détournement de fonds.

M. Dragnea, 56 ans, a été conduit à la prison de Rahova, dans la banlieue sud de Bucarest, à bord d’une voiture de la police, selon des images retransmises en direct par les télévisions locales. Chef du Parti social-démocrate (PSD) au pouvoir, il a vu la Haute Cour de Cassation de Roumanie confirmer le verdict prononcé en juin dernier à son encontre.

Cette sentence risque de plomber à long terme les ambitions politiques de cet élu controversé qui avait mené les sociaux-démocrates à une large victoire aux législatives de décembre 2016.

Liviu Dragnea a été empêché de briguer le poste de Premier ministre en raison d’une condamnation avec sursis dans un autre dossier judiciaire, portant sur des fraudes électorales. Ses détracteurs l’accusent de chercher à assouplir le code pénal afin d’échapper aux différentes procédures le visant.

Référendum antigouvernemental

Régulièrement pris à partie par la Commission européenne et par le président de centre droit Klaus Iohannis, qui lui reprochent de saper l’Etat de droit, le dirigeant a également subi un revers dans les urnes dimanche. Il a encaissé dans la soirée le recul de quelque 13 points de son parti aux européennes, à moins de 25% des suffrages, selon les résultats partiels. Il a qualifié de « tempête de haine » les critiques dont il fait l’objet.

Le scrutin était couplé à un référendum antigouvernemental organisé par M. Iohannis contre les réformes judiciaires de la gauche. La consultation ayant atteint le quorum requis pour être validé, fixé à 30%, les analystes pronostiquent là encore une défaite de la majorité. Les résultats de la consultation sont attendus lundi.

Pressions « inimaginables »

Balayant les critiques concernant ses tentatives d’assouplir la législation anti-corruption, M. Dragnea assure régulièrement que ces mesures sont destinées à combattre des abus de pouvoir de certains magistrats, qu’il accuse d’être instrumentalisés pour lui nuire. « Si les juges résistent aux pressions, qui sont inimaginables, je serai acquitté car je suis innocent », avait-il affirmé dimanche soir.

En première instance, il avait été reconnu coupable d’avoir fait pression pour que deux employées locales du PSD soient fictivement embauchées par les services de la protection de l’enfance dans son fief de Teleorman (sud).

Outre son appel, M. Dragnea a introduit plusieurs recours devant la Cour constitutionnelle, espérant invalider la procédure. La Cour doit rendre une première décision le 5 juin, trop tard toutefois pour le sauver en cas de condamnation, estiment des analystes.

Le chef du PSD a également créé la surprise dimanche en annonçant qu’il ne se présenterait pas contre M. Iohannis à l’élection présidentielle prévue fin 2019, contrairement à ce qu’il laissait entendre depuis des mois.

Rappel à l’ordre

La réforme judiciaire engagée par le dirigeant a valu début mai à Bucarest un rappel à l’ordre de la Commission européenne. Celle-ci a prévenu que la Roumanie s’exposait à des sanctions « imminentes » si elle persistait dans cette voie.

M. Dragnea, qui a multiplié les discours souverainistes ces derniers mois, a rejeté ces critiques, accusant Bruxelles d’utiliser « deux poids deux mesures » à l’égard de son pays. Selon les analystes, cette offensive contre le monde judiciaire et ce tournant eurosceptique expliquent le recul du PSD dans les urnes.

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