Le vin suisse parle d’une même voix pour séduire
A partir de l’an prochain, la Confédération va soutenir financièrement les efforts de promotion des vins suisses sur le marché intérieur.
Du coup, la branche viti-vinicole, qui s’est battue pour cette idée, s’unit afin de se rapprocher des consommateurs.
Le secteur viti-vinicole appelait cela «l’exception négative». Jusqu’ici, la Confédération appuyait la promotion des produits agricoles helvétiques à l’exception de celle des vins, du moins sur le marché indigène.
Mais dans le cadre de sa politique agricole PA 2007, Berne a revu sa position. Dès 2004, les vins suisses auront droit à un coup de main sur leur marché naturel.
Ce changement d’orientation est en partie le résultat du lobbying de la branche viti-vinicole. Il découle aussi d’un double constat.
D’abord, les marchés étrangers ne suffisent pas au salut de la viticulture suisse. Les ventes peinent à progresser. Plus grave, la libéralisation fait perdre des parts au vin suisse sur le marché intérieur.
Enveloppe stable
L’enveloppe fédérale actuellement réservée à la viti-viniculture atteint 5 millions de francs, sur un budget global de 65 millions dédié à la promotion des produits agricoles.
Cette somme n’enflera pas malgré la disparition de l’exception négative, indique Frédéric Rothen, responsable à l’Office fédéral de l’agriculture.
Cela étant, la fin de l’exception a produit son effet. Viticulteurs et encaveurs, qui peinaient jusqu’ici à se mettre d’accord, sont parvenus à s’unir autour d’une vision commune.
Désormais, comme il le souhaitait, l’Office fédéral de l’agriculture dispose d’un interlocuteur unique renforcé – l’Interprofession suisse du vin (ISV)- qui lui a soumis une demande de soutien financier. Il y répondra d’ici novembre.
«Cette unanimité est une petite révolution, note Philippe Varone, président de l’ISV. Nous avons compris que l’ennemi, ce n’est pas les producteurs du canton voisin, mais ceux de l’étranger».
Structures renforcées
D’ici à janvier prochain, plusieurs entités professionnelles viendront se fondre dans l’ISV. Trois axes de travail sont prévus: la promotion, la connaissance du marché et la défense professionnelle.
Le renforcement des structures de l’ISV passe notamment par la création d’une société dédiée à la promotion des vins indigènes en Suisse et à l’étranger. Son nom: Swiss Wine Communication.
Pour assumer son ambition, l’ISV prévoit un budget de 10 millions de francs, qui comprend les 5 millions attendus de Berne.
«Nous continuerons à travailler les marchés d’exportation, indique Philippe Varone. Mais de manière plus ciblée. L’accent sera porté sur le marché suisse. Nous chercherons à nous rapprocher du consommateur suisse».
Du coup, cet effort de promotion des vins pourrait susciter quelques remous. L’Institut suisse de prévention de l’alcoolisme et autres toxicomanies (ISPA) par exemple ne cache pas son inquiétude.
«La communication devra s’attacher à promouvoir le produit lui-même et pas à vanter la consommation d’alcool, avertit Janine Messerli, responsable médias à l’ISPA. Il faudra tout faire pour éviter de stimuler la consommation globale».
L’ISPA se dit d’autant plus anxieuse que la Confédération prévoit dans son paquet d’économies de réduire drastiquement son soutien à la prévention contre l’alcoolisme.
Buvez suisse
En face, l’Interprofession suisse de vin comme l’OFAG assurent être conscients des enjeux de santé publique liés à la consommation de vin.
L’ISV axera sa promotion sur la qualité, le terroir, l’image, avec pour but de tailler des croupières aux vins étrangers. Son message: buvez suisse!
Pour Philippe Varone, «il y a deux manières de mépriser le vin. Ne pas en boire ou trop en boire. Nous devrons aussi trouver ce juste milieu en terme de communication».
A l’OFAG, Frédéric Rothen souligne que la Confédération soutiendra la promotion des ventes à condition qu’elle ne mène pas à une hausse de la consommation d’alcool.
«Mais je ne me fais aucun soucis, précise Frédéric Rothen. La promotion ne fera que modifier les parts de marché entre vins étrangers et suisses».
swissinfo, Pierre-François Besson
– Le vignoble suisse s’étend sur 15’014 hectares – 8049 en cépages rouges, 6965 en blancs. Cette surface a diminué de 72 hectares en 2002/2003.
– Sur le marché suisse, les vins suisses détiennent 40% de parts de marché, contre 60% pour leurs homologues étrangers.
– En 2002/2003, la consommation globale des rouges et blancs suisses a plongé de 7,3 millions de litres alors que celle du vin en général ne baissait que de 3,8 millions de litres.
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