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La Suisse devrait se doter d’objectifs climatiques concrets

Le National a dû s'y prendre à deux fois pour boucler ses débats sur le contre-projet indirect à l'initiative pour les glaciers. KEYSTONE/PETER SCHNEIDER sda-ats

(Keystone-ATS) La Suisse devrait se munir d’objectifs climatiques concrets pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Le National a adopté mercredi par 134 voix contre 56 un contre-projet indirect à l’initiative pour les glaciers, au grand dam de l’UDC.

Initiative et contre-projet ont le même objectif. Tous deux veulent réduire à zéro les émissions nettes de gaz à effet de serre d’ici 2050. Les chemins pour y parvenir diffèrent toutefois. Les initiants exigent une interdiction des carburants et des combustibles fossiles, comme l’huile, le gaz, l’essence ou le diesel.

Objectifs intermédiaires

Pour le National, c’est trop extrême. En mars, il a rejeté de justesse l’initiative au profit du contre-projet direct du Conseil fédéral, offrant ainsi suffisamment de temps à sa commission compétente pour élaborer son propre contre-projet. Indirect, il a l’avantage de fixer des objectifs concrets directement dans la loi et ainsi d’accélérer le processus législatif.

D’ici 2050, les secteurs du bâtiment et des transports ne devront plus émettre de CO2, et celui de l’industrie devra réduire ses émissions de 90%, selon le texte. Les émissions restantes devront être compensées. Un objectif intermédiaire est aussi fixé: la Suisse devra réduire ses émissions de 75% par rapport à 1990 d’ici 2040. Plusieurs instruments d’encouragement sont envisagés.

C’est sur ce contre-projet que les députés ont planché dès mardi. Faute de temps, ils ont dû interrompre leurs débats juste avant les derniers votes sur une série de propositions de la gauche et de l’UDC. Le camp rose-vert plaide pour des objectifs plus ambitieux, alors que le parti conservateur veut les réduire au maximum.

L’UDC a notamment voulu exclure tout objectif pour la finance de la loi. A l’inverse, la gauche a exigé des mesures de protection du climat complémentaires ou plus contraignantes dans les secteurs de la finance, du bâtiment et des transports. Les émissions du trafic aérien doivent également être prises en compte dans les objectifs intermédiaires, selon elle. Aucune proposition n’a eu gain de cause.

Programmes d’aide critiqués

Le parti conservateur s’oppose aussi au programme d’aide pour l’industrie et à celui pour le remplacement des chauffages. Le premier, doté de 200 millions de francs par an pendant six ans, vise à encourager les entreprises à recourir à de nouvelles technologies et processus de réduction de gaz à effet de serre.

L’autre s’étend sur une décennie, à raison de 200 millions par an. Il entend pousser chacun et chacune à mettre au rebut ses vieilles installations polluantes. Entreprises et citoyens travaillent déjà dans ce sens, a pointé le parti conservateur. Ils changent par exemple leurs installations fossiles pour des pompes à chaleur. Mais les stocks ne sont pas suffisants et la main-d’oeuvre manque.

Les cantons disposent en outre déjà d’instruments de soutien très efficaces. Il faut leur laisser la main, juge-t-il. Les programmes proposés sont disproportionnés.

Incitation financière attractive

“Les chauffages électriques doivent être remplacés le plus rapidement possible. Un programme de soutien est sensé. Il doit être mis en place le plus vite possible”, leur a opposé mercredi la ministre de l’environnement Simonetta Sommaruga.

“Remplacer un chauffage n’est pas simple”, a complété le rapporteur de commission Roger Nordmann (PS/VD). “Une fois sur deux un chauffage fossile est donc remplacé par un chauffage fossile”. Et il ne sera pas changé avant vingt ou vingt-cinq ans. Soutenir les propriétaires dans l’assainissement de leurs installations permettra d’accélérer la part d’installations renouvelables.

“La population ne veut pas de taxes supplémentaires”, a rappelé quant à elle Susanne Vincenz-Stauffacher (PLR/SG) également pour la commission. Le rejet de la loi sur le CO2 l’a démontré. Les programmes d’aide créent une incitation financière attractive.

Le programme pour l’industrie a facilement passé la rampe. L’aide pour le remplacement des chauffages a eu un peu plus de mal à séduire. L’instrument a été accepté par 119 voix contre 74. Une partie du camp bourgeois s’est rallié à l’UDC.

Retrait de l’initiative en jeu

Au final, le National a suivi sa commission sur toute la ligne. Il pourrait en être différemment au Conseil des Etats, qui doit désormais empoigner le dossier.

Les initiants se montrent toutefois plutôt satisfaits du contre-projet indirect dans sa mouture actuelle. Ils pourraient même retirer leur initiative s’il est adopté tel quel. Le Conseil fédéral s’y rallierait également. Les sénateurs pourraient bien prendre ces éléments en compte lors de leurs délibérations.

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