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Trump risque une crise avec la Chine après un appel avec Taïwan

Donald Trump a rompu 40 ans de tradition diplomatique avec la Chine et Taïwan. KEYSTONE/AP/EVAN VUCCI sda-ats

(Keystone-ATS) Le président élu des Etats-Unis Donald Trump a pris le risque vendredi d’une crise majeure avec la Chine après avoir parlé au téléphone avec la présidente de Taïwan Tsai Ing-wen. La Maison-Blanche a immédiatement réagi en réaffirmant son soutien à la Chine unique.

La conversation entre M. Trump et Mme Tsai constitue une rupture spectaculaire avec 40 ans de tradition diplomatique avec Pékin et Taipei. Washington, quelles que soient les administrations, républicaines ou démocrates, soutient depuis les années 1970 la politique de la “Chine unique” ou “une seule Chine”, qui l’a vu reconnaître Pékin et rompre ses relations diplomatiques avec Taïwan à la fin des années 1970.

La Chine considère Taïwan comme une province rebelle. Les Etats-Unis sont le principal allié politique et le seul fournisseur d’armes de Taïwan malgré l’absence de relations diplomatiques officielles.

“Une basse manoeuvre de Taïwan”

Si cet appel entre Donald Trump et Mme Tsai était totalement absent des médias chinois samedi, Pékin n’a pas manqué de réagir, via son ministre des affaires étrangères, Wang Yi. Ce dernier a parlé d'”une basse manoeuvre manigancée par Taïwan”.

“Cela ne peut tout simplement pas modifier le cadre d’une seule Chine intégré par la communauté internationale (et) je ne pense pas que cela changera la politique adoptée depuis des années par les Etats-Unis”, a déclaré le ministre à la télévision hong-kongaise Phoenix TV.

Lors de leur appel, Donald Trump et Tsai Ing-wen “ont pris note des liens étroits en matière économique, politique et de sécurité entre Taïwan et les Etats-Unis”, selon un compte-rendu de l’équipe du prochain locataire de la Maison-Blanche.

La présidente taïwanaise, élue en mai, et le président américain élu le 8 novembre et qui prêtera serment le 20 janvier, se sont mutuellement “félicités”, a ajouté le communiqué.

Face aux critiques soulevées par cet entretien, M. Trump a affirmé sur Twitter que la présidente taïwanaise avait pris l’initiative de cet appel. Un porte-parole de Tsai Ing-wen a pour sa part déclaré: “Bien sûr, les deux parties se sont entendues au préalable avant de prendre contact.”

Relations tendues entre Taipei et Pékin

La Maison-Blanche, occupée jusqu’au 20 janvier par le président démocrate Barack Obama, a cru bon peu après de réaffirmer son soutien à la politique de “la Chine unique”. “Il n’y a aucun changement dans notre politique de longue date”, a indiqué Emily Horne, porte-parole du conseil de sécurité nationale (NSC).

Taïwan est de facto séparée de la Chine depuis la fin de la guerre civile en 1949, lorsque l’armée nationaliste du Kuomintang s’était réfugiée dans l’île après sa défaite face aux communistes. Pékin considère toujours Taïwan comme faisant partie de la Chine.

Les relations avec l’île se sont détériorées depuis l’arrivée au pouvoir en mai de la présidente Tsai Ing-wen, membre du Parti démocratique progressiste (PDP), hostile à Pékin. Mme Tsai a remporté la victoire contre le KMT, artisan depuis 2008 d’un rapprochement avec la Chine continentale.

La “bonne méthode” philippine

Tsai Ing-wen refuse de reconnaître un consensus conclu en 1992 entre Pékin et Taipei, selon lequel il n’y a “qu’une seule Chine”, formulation empêchant de facto toute déclaration d’indépendance de l’île. En conséquence, Pékin a coupé les communications officielles avec le gouvernement taïwanais.

Donald Trump multiplie les prises de contact avec les dirigeants étrangers depuis sa victoire à l’élection présidentielle américaine le 8 novembre, pratique qui rompt aussi avec les règles du protocole durant la transition du pouvoir à Washington. Ainsi, il s’est aussi entretenu vendredi avec le président philippin Rodrigo Duterte, le président afghan Ashraf Ghani et le premier ministre de Singapour, Lee Hsien Loong.

Selon le président philippin, M. Trump l’a encouragé dans sa guerre controversée contre la drogue en lui disant qu’il appliquait “la bonne méthode”. Depuis l’entrée en fonction du président philippin en juin, la politique de répression controversée qu’il mène dans son pays a fait 4800 morts, soit une trentaine de morts par jour.

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