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Trois soirées très club à Paléo

Sonja Moonear aux platines sous le Club tent. Pascal Bernheim

Présente depuis bientôt dix ans au Paléo Festival de Nyon, la musique électronique est entrée en scène jeudi. Après moult essais pour l’imposer, l’orientation «club» a été retenue.

Dans un festival aussi populaire, il est difficile de lui trouver une place et encore plus de proposer un programme cohérent.

Le Paléo a ouvert sa série de soirées électro avec trois filles dj’s. Miss Kittin, Water Lilly et Sonja Moonear ont ouvert les feux sous les projections flamboyantes de Amata…

Réminiscence de l’inauguration en 1999 du Palais des glaces, la scène dévolue à la techno, féminine également. Mais cette fois, devant une foule de clubbers, mi-curieux, mi-acquis à la cause techno.

Loin d’être un argument marketing, – les filles c’est plus joli – ce choix s’articule plutôt autours de la scène genevoise, selon Vincent Sager, consultant pour l’électro au festival.

Les plateaux «filles» ont d’ailleurs le chic pour agacer Miss Kittin, la star de la soirée. Elle n’hésite pas à refuser de jouer dans ce type de soirées. Mais là, il faut bien reconnaître que l’argument genevois (le label Mental Groove qui les réunit notamment) fait mouche.

Grenobloise d’origine, Miss Kittin a passé cinq ans au bout du Lac Léman, avant de s’installer à Berlin, voilà plus d’un an. Alors que les deux autres s’y activent toujours.

Autre point commun, elles gravitent toutes autours d’un label munichois, International dj Gigolo. Une référence dans le petit monde de la musique électronique pointue.

Méconnaissance de l’électronica

Bien que ravie de jouer sous le Club Tent, Sonja Moonear, regrette que la programmation ne soit pas plus cohérente. «Mon style est beaucoup plus proche de celui de Luciano, le Suisso-chilien qui joue samedi, que de Water Lilly par exemple».

En effet, les différences étaient perceptibles entre les trois divas des platines, même si elles tapaient fort autant l’une que l’autre. Au grand ravissement des clubbers.

Sonja Moonear n’est pas la seule à déplorer, qu’après bientôt dix ans d’électronica à Paléo, l’amateurisme règne toujours. Et que cette musique soit si mal connue et peu reconnue.

«On sent que les festivals populaires doivent s’assurer une respectabilité auprès des jeunes qui écoutent de plus en plus de techno, lance pour sa part Miss Kittin. Mais les budgets sont dérisoires et le son pas toujours adapté».

Vincent Sager, qui s’est occupé de la scène électronique dès son apparition à Paléo en 1995 confirme. «Nous avons de tout petits budgets, comme ceux attribués au théâtre, par exemple».

Mais qu’on se rassure: après quelques petits problèmes techniques mercredi, la techno étant plus exigeante sur les basses que le rock, le son fût définitivement à la hauteur.

Alchimie difficile à créer

Et il est clair que le Paléo a toujours été plutôt orienté vers les musiques du monde, que son public est large et d’âges très divers. La musique électronique n’y est donc pas accueillie avec le même enthousiasme que dans les festivals rock.

Comme cela peut être le cas en Espagne, à Benicàssim, exemple cité par Miss Kittin. Ou dans le nord de l’Europe où la musique électronique se situe, par ordre de priorité, tout de suite après le rock.

«Là-bas, le public, plus jeune, passe sans sourciller des distorsions des guitares aux sons de rave», constate Vincent Sager. Une alchimie qui peine à se produire à Paléo.

Mais ce n’est pas faute d’avoir essayé. «Le problème, c’est que quand on programme des groupes trop pointus, comme l’an dernier Straight Ahead, un label zurichois d’obédience jazz, on fait un flop».

En effet, le public s’attend à du «boum boum» quand on parle d’électro. Et bien, la première soirée l’aura servi!

Quant aux aficionados d’électronica, ils ne se déplaceront pas forcément à Paléo pour voir leurs dj’s préférés. Les conditions n’étant pas celles d’un vrai club.

D’où les louvoiements des dix dernières années qui ont mené au concept actuel: trois soirées orientées clairement vers le clubbing, à partir du jeudi.

«Avec des dj’s qui sont reconnus dans leur milieu, en évitant les grosses stars, pour des raisons de coûts». Il s’agit donc, selon Vincent Sager, de donner une ouverture sur le genre, sans être exhaustif.

Du live si possible

Avec un peu de recul, les recettes qui ont le mieux fonctionné à Paléo étaient les groupes qui alliaient l’électronique à d’autres styles, de la fusion, comme on nomme ce style dans le jargon. Asian Dub Foundation ou Loop Guru en étaient les exemples parfaits.

Sinon du live, si possible. Plus spectaculaire et également plus dans l’esprit Paléo qui se veut un réceptacle d’influences croisées.

Rhinocérose, les Parisiens de Kojak, le Lausannois exilé à Londres Rollercone ou Miss Kittin et le Hacker ou même Golden Boy, un Zurichois, ont occupé le devant des différentes scènes attribuées à l’électro, avec plus ou moins de bonheur d’ailleurs.

Cette année, Rubin Steiner, et Luomo (vendredi 25) vont se produire en live. Le premier, accompagné de musiciens, oscille entre house et jazz. Et son show ludique devrait plaire. Quant à la house chatoyante de Luomo, elle aussi devrait passer la rampe.

Mais à n’en pas douter, si les dj’s assurent lors des deux autres soirées une telle qualité de mixe, la techno va convertir plus d’un folkeux.

Même si, qu’on ne rêve pas, la techno, musique si longtemps décriée comme étant une non-musique, ne sera jamais la priorité de Paléo. Mais elle y occupe une niche indispensable.

swissinfo, Anne Rubin à Nyon

– 1995: première apparition de la techno à Paléo: la soirée organisée par Weetamix (GE) avec Carl Craig et Derrick May, deux pères de la techno, ainsi que Robert Leiner. Une catastrophe, le son était totalement inadapté.

– 1996: de la fusion avec Asian Dub Foundation et Loop Guru.

– 1997: Mandrax et Alex Attias en dj’s, l’un house, l’autre rare groove.

– 1998: Eric Borgo (dj), Prodigy et Pills, dans des styles fusion-breakbeat.

– 1999: une réelle scène électronique est créée, le Palais des glaces, un ancien cirque en bois. Mais la salle ne pouvant contenir que quelques centaines de personnes, le public râle car frustré de ne pouvoir entrer.

– 2000: le Studio, plus grand, propose de l’électro tous les soirs. Mais l’ambiant, trop calme et les dj’s à 18h avaient du mal à passer.

– 2001: l’électro est rapatriée au Club Tent. Trois soirées dj’s sont programmées, dans un nuage de poussière du aux piétinements des danseurs.

– 2002: les dj’s, toujours sous le Club Tent, n’apparaissent qu’en fin de soirée. Le tournant «club» est définitivement pris, avec toujours des live.

– 2003: trois soirées dj’s. Jeudi, Water Lilly (CH), Sonja Moonear (CH) et Miss Kittin (F). Vendredi, Dj Steve Bug (D) et les live de Rubin Steiner (F) et Luomo. Samedi, Luke Slater (GB) et les live de Luciano (CH) et Buscemi (B)

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