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Des médecines qui séduisent en douceur

L’acupuncture est reconnue par l'assurance maladie de base depuis 1981. Keystone

Plus d'un Suisse sur deux ferait appel aux thérapies douces. D'ailleurs, de plus en plus de médecins misent, eux aussi, sur la nature.

swissinfo ouvre le dossier, en marge de Mednat, le salon des médecines naturelles qui se tient actuellement à Lausanne.

Il y a seulement 15 ans, les médecines douces avaient mauvaise presse. Elles étaient même souvent associées à des pratiques proches du charlatanisme.

Depuis, elles ont réussi à gagner en crédibilité. Initialement jugées «alternatives», elles ont fini par acquérir le statut de thérapies «complémentaires».

Mieux, depuis 1999, cinq d’entre elles (la médecine chinoise, l’homéopathie, la thérapie neurale, la phytothérapie et la médecine anthroposophique) sont admises à titre provisoire au catalogue des prestations de l’assurance maladie de base.

Concrètement, ces approches thérapeutiques sont remboursées. Pour autant qu’elles soient prescrites ou pratiquées par un médecin.

Un précision, «l’acupuncture est reconnue depuis 1981 déjà, rappelle Brigitte Dumas, porte-parole de l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS). Et les autres thérapies sont en observation jusqu’en juin 2005.»

Des thérapies toujours en observation

L’OFAS a chargé une société de ‘consulting’ (spécialisée dans le domaine de la santé) d’évaluer si ce type de médecine douce doit être définitivement intégré aux prestations de l’assurance maladie de base.

Toutefois, après plus de trois ans d’essai, il est encore difficile d’estimer très concrètement l’efficacité et le coût de ces thérapies. Le seul chiffre disponible demeure l’évaluation réalisée avant l’entrée en vigueur de la nouvelle loi sur l’assurance maladie.

A l’époque, les prestataires de service et les assureurs maladies estimaient que le coût des traitements complémentaires tournait autour des 110 millions de francs par an.

Mais, aujourd’hui, la Fédération des médecins suisses (FMH) parle d’un coût deux fois, sinon trois fois, plus élevé. Sans, pour autant, être en mesure d’articuler un chiffre précis.

Une influence sur les coûts de la santé

Les assureurs n’en savent pas davantage. Ils affirment toutefois que la prise en charge des médecines douces coûte trop cher.

«Nous constatons que le patient ne choisit pas entre les thérapies complémentaires et la médecine officielle, affirme la porte-parole de santésuisse.

«Ils ont tendance à cumuler les deux approches, ajoute Nicole Buillard. Ce qui contribue à augmenter les coûts de la santé.»

De toute évidence, les arguments de santésuisse visent à éjecter les thérapies naturelles du catalogue des assurances de base.

Cela dit, ces mêmes thérapies sont l’enjeu d’une concurrence acharnée dans le domaine des assurances complémentaires.

«Les médecines douces rencontrent toujours plus de succès», confirme Nicole Buillard. Les assureurs ont donc tout intérêt à multiplier ce type d’offre dans leur catalogue de prestations complémentaires.»

A titre d’exemple, environ deux tiers des personnes assurées chez Helsana ont contracté une complémentaire pour élargir la palette des prestations naturelles remboursées.

Les médecins ont intérêt à s’y mettre aussi

Dans la foulée, le corps médical s’est lui aussi lancé dans les potions naturelles. De plus en plus de généralistes pratiquent désormais l’une ou l’autre de ces thérapies douces.

La Fédération des médecins suisses (FMH) délivre même un certificat d’aptitude aux médecins qui pratiquent ce genre de thérapie.

En clair, ces ‘spécialisations subsidiaires’ sont reconnues par l’organe faîtier des médecins suisses. Les cours, eux, sont assurés par les centres de formation des thérapies concernées.

Mais, là encore, impossible de mesurer exactement l’ampleur du phénomène.

A titre d’exemple, on estime que 10% des généralistes suisses sont au bénéfice d’un certificat d’aptitude en homéopathie.

«Mais, précise le porte-parole de la FMH Reto Steiner, tous les médecins qui pratiquent l’homéopathie n’ont pas nécessairement ce certificat.»

Une chose est certaine, après avoir décrié les thérapies douces, les médecins sont toujours plus nombreux à se mettre, eux aussi, au diapason de la nature.

«Une partie du corps médical estime qu’il faut donner au peuple la médecine qu’il souhaite», dit Max Giger, membre du comité central de la FMH.

Et de conclure: «Les gens veulent de la médecine douce. S’ils ne veulent pas perdre leurs clients, les généralistes doivent donc s’adapter.»

Des médecins complémentaires

«La médecine officielle et les thérapies naturelles ne sont pas concurrentes, dit Alain Coutaz, président de Mednat. Bien au contraire, elles sont complémentaires.»

Selon les théories désormais communément admises par les naturopraticiens, la médecine allopathique traite avant tout le symptôme. Alors que les thérapies naturelles, elles, visent à soigner les causes de la maladie.

Pour y arriver, ajoutent les naturopraticiens, elles tiennent compte de l’être humain dans sa globalité. Et elles accordent une place prépondérante à l’écoute du patient.

Professeur à la Faculté de médecine de Lausanne, Jacques Diezi réfute: «L’époque où on accusait la médecine officielle d’être trop technique est révolue».

«Le corps médical sait aujourd’hui que la relation patient-soignant est un élément essentiel du traitement, poursuit-il. Le dialogue est désormais au centre de nos préoccupations.»

Et Jacques Diezi de conclure: «les médecines douces ont avant tout le mérite de rappeler aux praticiens que la médecine est d’abord une science sociale».

swissinfo, Vanda Janka

– Le plus important programme mondial d’évaluation scientifique des médecines naturelles a été lancé en 1993 aux Etats-Unis.

– Il est mené par les Instituts nationaux de santé.

– Les premiers résultats seront connus dans quelques années seulement.

Thérapies remboursées par la LAMal, pour autant qu’elles soient exercées par un médecin FMH:
Médecine chinoise (acupuncture)
Homéopathie
Thérapie neurale
Phytothérapie
Médecine anthroposophique

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