Les dossiers à suivre de la session parlementaire d’hiver
Lors de cette session d’hiver (du 1er au 19 décembre), les parlementaires se pencheront sur un financement destiné à moderniser l’organisation et les systèmes informatiques permettant le versement des rentes à l’étranger. De quoi piquer l’intérêt de la Cinquième Suisse. Cinq initiatives populaires sont également au menu.
Le nombre de pensions suisses payées à des assurés établis à l’étranger a dépassé le million. Chaque mois, la Centrale de compensation fédérale (CdC) verse 8,3 milliards de francs dans 153 pays.
De quoi parle-t-on? Des pensions de vieillesse (AVS) et d’invalidité (AI). S’il y a lieu, Suisses du dehors comme travailleurs étrangers rentrés au pays en sont les bénéficiaires. Mais le système de gestion de ces rentes vieillit. Pire, il atteint ses limites.
Partant, le Conseil fédéral demande au Parlement 66 millions de francs pour moderniser intégralement l’organisation, les processus et les systèmes informatiques qui gèrent ces rentes et versements. Selon le message du gouvernementLien externe, plus de quarante applications différentes sont aujourd’hui utilisées, dont certaines ont plus de trente ans.
La Commission recommande le oui
«Une forte croissance démographique, marquée par l’augmentation du nombre de bénéficiaires de rentes et par la hausse de la mobilité internationale, se traduit par une augmentation des volumes de dossiers à traiter», écrit l’exécutif.
La Commission des finances du Conseil national fait le calcul: outre le crédit fédéral, ce projet nécessite des ressources internes d’environ 57,2 millions de francs. «Le coût total du programme de transformation s’élève ainsi à 123,3 millions de francs», indique la Commission des finances. À l’unanimité, elle recommande à la Chambre du peuple d’approuver la facture.
Économiser sur l’offre internationale de la SSR?
Durant cette session d’hiver, le Conseil des États, première chambre à plancher sur le dossier, débattra du paquet d’économies de la Confédération. Ce dernier concerne de nombreux Suisses de l’étranger. Dans le cadre du «programme d’allègements budgétaire 2027», le gouvernement prévoit en effet de nombreuses mesures destinées à équilibrer le budget fédéral.
Parmi ces mesures, le projet de réduire la contribution fédérale à l’offre internationale de la SSR. Soit 19 millions de francs pour les plateformes swissinfo.ch et tvsvizzera.it, ainsi que pour les partenariats avec des diffuseurs internationaux comme TV5 Monde et 3sat.
Swissinfo est la principale composante de l’offre pour l’étranger. «Une telle décision mettrait en péril l’existence même d’une information indépendante sur la Suisse et en provenance de Suisse à l’échelle internationale», estime l’Organisation des Suisses de l’étranger (OSE) face au plan d’économies.
Une pétition pour sauver Swissinfo et le mandat pour l’étrangerLien externe demande au Parlement de rejeter la suppression prévue de la contribution. La Commission des transports et des télécommunications du Conseil des États et celle de politique extérieure ont toutes deux recommandé, dans des corapports à la Commission des finances compétente, le maintien de la contribution pour l’étranger.
La Commission des finances du Conseil des États a toutefois décidé vendredi, avant le début de la session, par 7 voix contre 6, de suivre le Conseil fédéral et de réduire de 19 millions les crédits alloués aux services de la SSR destinés à l’étranger.
Le programme d’allègement du gouvernement comprend aussi une coupe de 0,4 million de francs dans le budget consacré aux relations avec les Suisses de l’étranger, ce qui touche matériellement l’OSE. Des réductions sont également prévues pour les écoles suisses à l’étranger. La Commission de la culture du Conseil des États recommande de maintenir les contributions de Berne dans ce domaine.
Retraites et immigration
Parmi les initiatives populaires au menu des Chambres fédérales, deux revêtent une importance toute particulière. L’initiative «Pas d’une Suisse à 10 millions!Lien externe» de l’UDC d’abord. Elle vise à limiter la population résidant en Suisse à moins de dix millions d’habitants d’ici 2050. Au besoin, en dénonçant l’accord sur la libre circulation des personnes avec l’UE. Le texte a motivé un nombre record d’interventions au Conseil national à l’automne. Le voici devant le Conseil des États.
Autre texte de poids, l’initiative du Centre «Oui à des rentes AVS équitables pour les couples mariésLien externe». Elle doit permettre de supprimer la «discrimination du mariage» touchant les couples mariés arrivés à l’âge de la retraite, ceux-ci ne percevant pas aujourd’hui deux rentes AVS complètes, mais une rente et demie maximum.
Après la votation sur la treizième rente AVS, c’est-là un nouveau projet visant à augmenter les rentes. Un contre-projet indirect émane du Conseil national. Son homologue des États se penche à son tour sur le dossier.
Durant cette session, l’initiative sur l’alimentationLien externe passera l’examen des deux Chambres du Parlement. Elle demande que soit promue une agriculture plus tournée vers les produits végétaux et moins vers les aliments d’origine animale. Initiatrice du texte, Franziska Herren avait échoué dans les urnes en 2021 avec l’initiative pour une eau potable propre. Une minorité rouge-verte du Conseil national propose un article constitutionnel alternatif plus mesuré à son nouvel envoi.
Contre les feux d’artifice et la souffrance animale
Le comité responsable de l’initiative «Pour une limitation des feux d’artificeLien externe», qui demande leur interdiction, peut se réjouir. Un sondage auprès de la population suisse indique que deux personnes sur trois appuient l’idée d’une interdiction. Le Parlement prépare un contre-projet qui reprend les revendications de l’initiative et prévoit d’interdire les pétards au minimum.
Les préoccupations liées à l’initiative sur la fourrureLien externe sont, elles aussi, largement partagées. Le texte veut empêcher l’importation en Suisse de produits de fourrure provenant d’animaux maltraités. Le Conseil national a débattu de la question durant la session d’automne et voté en faveur d’un contre-projet du Conseil fédéral. Une attestation obligatoire doit permettre d’éviter que la Suisse n’importe de facto la souffrance animale. Au tour du Conseil des États de passer au crible initiative et contre-projet.
Lex China, Trump et son ombre
Politique étrangère maintenant, la loi sur l’examen des investissements étrangers, de son petit nom Lex China, est importante, mais plus tout à fait de première jeunesse. À l’origine, la question était de savoir si la Suisse doit interdire aux investisseurs étrangers proches de leur État d’acquérir des infrastructures critiques.
Le débat est proche d’aboutir, mais l’arrangement douanierLien externe conclu entre la Suisse et le président américain Trump pourrait jouer les grains de sable. Berne a en effet promis de coopérer avec les États-Unis en matière d’investissements étrangers. Dans quelle mesure ce deal doit-il être pris en compte dans le cadre de la Lex China? C’est sur quoi ne manqueront pas de s’interroger l’un ou l’autre élu.
Obligation de servir pour les doubles nationaux
Au Parlement, plusieurs interpellations portent sur la guerre à Gaza. L’une d’elles est nouvelle et concerne les «combattants suisses en IsraëlLien externe». Plus concrètement les binationaux israélo-suisses. «De quelles informations dispose la Confédération et quelles mesures compte prendre le Conseil fédéral?», demande le sénateur Mauro Poggia au sujet des Suisses possiblement au service de l’armée israélienne. Le Conseil fédéral répond qu’il n’a pas connaissance de cas concret et ne voit pas de nécessité d’agir.
Mais la question va plus loin. Lors de la session d’automne, le même Mauro Poggia a déposé une motion visant les binationaux franco-suisses. Ces derniers peuvent facilement échapper à l’obligation de servir en Suisse au moyen d’une simple journée d’orientation suivie en France. La commission compétente du Conseil national est désormais sensibilisée à la question et veut compliquer le contournement des obligations militaires. Ladite commission souhaite étendre la motion Poggia pour qu’elle s’applique à tous les conscrits possédant deux passeports.
Faciliter les exportations d’armes?
Au chapitre des questions nationales, la loi sur le matériel de guerre promet de belles empoignades. Selon la volonté du Conseil des États, le gouvernement pourrait obtenir la compétence d’autoriser les exportations d’armes. Et ce, dans l’intérêt de l’industrie suisse de l’armement, toujours plus isolée au niveau international après que la Suisse a interdit à d’autres États de transférer des produits helvétiques à l’Ukraine.
Le projet passe maintenant dans les mains du Conseil national. Sa commission compétente propose que quinze pays occidentaux puissent être approvisionnés depuis la Suisse même s’ils sont impliqués dans un conflit.
Texte relu et vérifié par Samuel Jaberg, traduit de l’allemand par Pierre-François Besson/op
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