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La musique continue à vibrer à Londres

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Alors que la crise balaie la planète, swissinfo recueille en cette fin d'année les témoignages - constats, analyse et espoirs - de Suisses expatriés sur les cinq continents. Aujourd'hui, Cédric Pytel, musicien à Londres.

swissinfo: Votre cadre de vie en quelques mots…

Cédric Pytel: J’habite à Maida Vale, un quartier résidentiel qui a l’avantage d’être près du centre de Londres tout en étant calme. Il y a peu de magasins, quelques bars et restaurants. C’est tout près de Little Venice, connu pour ses canaux et ses bateaux, fréquenté par les touristes l’été.

J’ai acheté un appartement il y a deux ans, dans lequel j’ai installé mon studio de musique. Le bâtiment, vieux de 150 ans, date de l’époque victorienne. Même si le prix de l’immobilier a baissé dernièrement, je pense que c’est un bon investissement sur le long terme. A Londres, il vaut mieux payer une hypothèque qu’un loyer, souvent très cher.

Je suis un passionné de jazz. Je produis de la musique, je joue aussi de la batterie et de la guitare; je voyage assez souvent à l’étranger, car j’organise des événements musicaux à l’extérieur. J’aimerais consacrer tout mon temps à la musique, mais c’est insuffisant pour vivre à Londres, les entrées d’argent sont trop irrégulières. Je complète en donnant des cours de français à des compagnies internationales et à des particuliers.

swissinfo: La crise fait la une des journaux depuis des mois. Pouvez-vous en observer les effets concrets dans la région où vous habitez?

C.P.: Oui, cela m’a affecté assez directement. Ma fiancée était sur le point de lancer un projet artistique en lien avec la Chine, et il a été remis en cause en raison de cette période économique difficile. Le projet est désormais retardé.

Il y a aussi eu un effet positif: beaucoup de biens de consommation sont désormais bradés. J’ai pu par exemple remplacer ma cuisine pour un prix très avantageux!

swissinfo: Vous partagez votre temps entre la musique et l’enseignement… Qu’est-ce qui a changé dans votre environnement professionnel au cours de l’année 200?

C.P.: En ce qui concerne l’enseignement, j’ai eu plus de difficultés à trouver des élèves de français en début d’année. Les grands établissements pour lesquels j’enseigne ont décidé de restreindre leur budget.

Maintenant, curieusement, alors qu’on est en plein dans la crise, les choses ont l’air d’avoir repris un petit peu; sans doute parce que mes clients actuels ne sont pas forcément affectés par la crise. Pour un prince d’Arabie Saoudite ou un président d’une grande compagnie pétrolière, quelques livres de plus ou de moins ne font pas une grande différence.

En ce qui concerne la musique, il n’y a pas eu beaucoup de changement; les gens continuent à sortir beaucoup, il n’y a pas moins de monde dans les salles de concert, les pubs, les bars; même si peut-être ils consomment moins.

swissinfo: «Il paraît que la crise rend les riches plus riches et les pauvres plus pauvres. Je ne vois pas en quoi c’est une crise. Depuis que je suis petit, c’est comme ça» disait Coluche dans le sketch «Le chômeur». Votre réaction?

C.P.: La crise a débuté dans le milieu bancaire et Londres, qui représente une très grande place financière, a été directement touchée. Beaucoup de gens – qui avaient des revenus assez élevés – ont perdu leur travail. La crise affecte donc tout le monde, les riches et les pauvres, même si bien entendu c’est plus difficile pour les pauvres.

swissinfo: Etes-vous plutôt du genre à penser que le monde s’enfonce dans le gouffre ou qu’une crise n’est qu’un mauvais moment à passer?

C.P.: Je pense que la crise est temporaire; il y aura en tout cas encore un an de période difficile et après les choses vont reprendre, il y aura plus d’opportunités.

swissinfo: Croyez-vous au fait que de cette crise pourrait émerger un monde plus sain? Et en quoi le serait-il?

C.P.: Oui je pense que le visage du monde de la finance va pas mal changer, qu’il va y avoir un plus grand contrôle sur les systèmes boursiers. Les gens qui ne vivent que pour la spéculation ne pourront plus prendre des risques incalculables, sans se soucier des conséquences que cela peut avoir sur le reste de la société. Cette période-là est terminée.

swissinfo: Le monde politico-économique vit depuis longtemps dans la théorie et le culte de la «croissance». Réalisme, idéalisme ou mensonge selon vous?

C.P.: Je ne pense pas que le modèle capitaliste, fondé sur la croissance, va disparaître. Je pense que c’est un bon modèle, même s’il faut davantage de contrôles pour éviter les excès de certaines personnes peu scrupuleuses, mais le modèle en soi est bon.

swissinfo: Pour conclure… de quoi le pays où vous vivez a-t-il le plus besoin, selon vous, pour sortir de ses difficultés actuelles?

C.P.: Je ne pense pas qu’il existe une réponse spécifique à un pays, étant donné que cette crise est généralisée. Je dirais que le pays a surtout besoin de retrouver de la confiance. Et il faudrait aussi modifier la culture du crédit. Les gens ici ont l’habitude de dépenser et de payer plus tard. Mais ce n’est pas un comportement qui se corrige facilement.

swissinfo, Catherine Ilic à Londres

Cédric Pytel, 37 ans, vit à Londres depuis 11 ans.

Après avoir terminé une licence en lettres à l’Université de Genève en 1997, il est parti s’installer en Grande-Bretagne pour vivre pleinement sa passion, la musique.

Il a fréquenté durant sa première année le London College of Music, où il a passé un diplôme de batterie. Il se produit désormais dans plusieurs formations musicales. Il compose aussi de la musique pour des documentaires et crée des arrangements pour des orchestres philharmoniques.

Il est sur le point de se marier avec sa fiancée chinoise, rencontrée à Londres.

Londres, capitale du Royaume-Uni, est une ville horizontale et tentaculaire d’environ 7,5 millions d’habitants. Sa population grouillante et métissée parle plus de 300 langues différentes.

Londres compte 32 communes qui, unis à la City of London ( le centre financier), s’étendent sur 1579 km². Les Londoniens aiment faire la distinction entre le Nord et le Sud de la Tamise, le fleuve qui sépare la ville en deux.

Boris Johnson, ancien journaliste et membre du parti conservateur, a été élu maire de Londres aux élections municipales de mai 2008. Il a battu le maire sortant travailliste Ken Livingstone, célèbre pour avoir introduit le péage urbain. Boris Johnson a hérité de la difficile mission de préparer les jeux olympiques d’été 2012.

28’288 Suisses sont établis en Grande-Bretagne (chiffres 2007).

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