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Mieux reconnaître le traumatisme dans la procédure d’asile

La vraisemblance du récit exigée dans la procédure d'asile suisse est un critère particulièrement sévère pour des personnes ayant subi de graves persécutions (photo d'illustration). KEYSTONE/GAETAN BALLY sda-ats

(Keystone-ATS) Les exigences imposées aux requérants d’asile sont trop sévères, selon l’Observatoire suisse du droit d’asile et des étrangers. Les demandes sont évaluées à l’aune de la vraisemblance des persécutions subies, un critère impossible à remplir pour des traumatisés.

Mehret est persécutée pour son appartenance à une communauté religieuse interdite. Plusieurs fois violée et incarcérée, elle fuit en Suisse. Le Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM) relève des contradictions lors de son audition. Elle explique qu’elle a des problèmes de mémoire. Malgré ses problèmes psychiques manifestes, elle se voit refuser l’asile. Un recours au Tribunal administatif fédéral n’y a rien fait.

Pour l’Observatoire du droit d’asile et des étrangers (ODAE), ce cas parmi d’autres illustre les difficultés pour les personnes traumatisées de raconter le plus précisément possible leur expérience de vie et les motifs qui les poussent à demander l’asile en Suisse.

La vraisemblance du récit peut en effet être influencée par les graves traumatismes subis, le niveau de formation voire d’autres raisons. Beaucoup nourrissent par exemple une grande méfiance envers les autorités car elles ont été aux prises avec un Etat arbitraire dans leur pays d’origine, indique mercredi l’ODAE dans un communiqué.

Traumatisés sur la touche

Fondamentalement, la procédure d’asile suisse doit protéger les personnes menacées, dans leur pays d’origine, de persécution, de travail forcé, de torture ou de traitements inhumains. Mais les personnes traumatisées sont rarement en mesure de livrer un récit crédible de bout en bout.

Des études montrent qu’environ la moitié des personnes en fuite qui demandent l’asile souffre de maladies psychiques. Pour l’ODAE, il faut impérativement améliorer la procédure d’asile pour la rendre plus humaine, équitable et digne pour ces groupes vulnérables. Le traumatisme devrait être reconnu non pas comme une exception mais comme la règle.

Pratique plus généreuse

Comme il reste très difficile d’établir des faits conformes à la réalité, il faudrait appliquer le principe que “le doute profite aux requérants”, une posture que le SEM a inscrite dans ses manuels. Mais des cas documentés montrent que des renvois sont quand même ordonnés, critique l’ODAE.

La nouvelle procédure accélérée qui entrera en vigueur le 1er mars 2019 attribue une représentation juridique à chaque requérant. L’ODAE veut croire que ces personnes ainsi que celles qui mèneront la procédure auront des compétences élargies afin de reconnaître les indices de traumatismes dont sont victimes les requérants.

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