L’élection des juges fédéraux ne devrait pas être revue
(Keystone-ATS) L’élection des juges fédéraux ne devrait pas être revue. Le National ne veut ni de l’initiative sur la justice, ni d’un contre-projet.
Déposée par l’entrepreneur Adrian Gasser, l’initiative « Désignation des juges fédéraux par tirage au sort » entend rendre les juges plus indépendants. Les candidats doivent pouvoir accéder à ces hautes fonctions grâce à leurs seules qualifications, même s’ils n’ont pas de réseau politique, selon le texte.
Sélectionnés par une commission d’experts, les juges seraient ensuite tirés au sort de façon à ce que les langues officielles soient équitablement représentées. Et ils pourraient exercer cinq ans au-delà de l’âge ordinaire de la retraite.
Etre humain politique
Le texte n’a récolté aucun soutien après un débat sur deux jours. Tous les partis s’y sont opposés. « Un tirage au sort n’est pas approprié », a critiqué mardi Gabriela Suter (PS/AG). D’autant plus qu’il est effectué parmi un nombre restreint de candidats. Lilian Studer (PEV/AG) a elle pointé que ce seront les plus chanceux, et non les plus talentueux, qui seront élus.
La commission de sélection ne sera en outre aucunement apolitique, a complété Vincent Maître (Centre/GE) pour la commission. « Les conventions politiques sont inhérentes à chaque être humain, et non aux structures étatiques. » Andreas Glarner (UDC/AG) a lui souligné qu’aucun juge n’avait pas été réelu pour des raisons politiques.
« L’initiative contredit notre tradition politique. Aucun canton n’élit sa justice au tirage au sort », a quant à elle argumenté la ministre de la justice Karin Keller-Sutter. Un tirage au sort affaiblirait la légitimité démocratique des juges et l’acceptation de la population de leurs décisions.
« L’initiative soulève davantage de questions qu’elle n’en résout », a-t-elle encore ajouté. Des améliorations peuvent en outre être apportées dans le droit actuel.
Adaptations ponctuelles nécessaires
D’aucuns ont reconnu que l’initiative pointe des problèmes importants du système actuel. Ils estiment qu’un contre-projet direct ou indirect devrait être élaboré. « Des adaptations ponctuelles sont nécessaires. La démocratie doit être renforcée », a jugé Lilian Studer.
Les députés ont toutefois refusé, par 99 voix contre 81 une proposition de renvoi en commission, afin qu’elle élabore un contre-projet indirect. Deux contre-projets directs, présentés par la gauche et les Vert’libéraux, ont subi le même sort par 102 voix contre 79.
Mandat unique et révocation
Le premier se concentrait sur la révocation des juges fédéraux. Deux raisons auraient pu y aboutir: une violation grave des devoirs de fonction de manière intentionnelle ou par négligence grave, ou une perte de capacité durable d’exercer la fonction.
Le second texte prévoyait les mêmes mesures et imposait un mandat unique de douze ans. Les élus auraient en outre pu travailler au plus tard jusqu’à 68 ans. Les juges en fonction le resteraient pour une période unique de douze ans. Les deux textes ont été largement balayés.
Les propositions n’ont aucun lien avec l’idée principale de l’initiative, à savoir l’indépendance des juges, a estimé Vincent Maître. De plus, la révocation est déjà possible en cas d »incapacité durable à remplir sa charge.
Quant au mandat unique, « il comporte un risque de sclérose de renouvellement des forces du tribunal fédéral », a ajouté le Genevois. Une durée trop longue pourrait décourager certains jeunes d’accéder à cette fonction. Toute perspective après le mandat de juge fédéral serait freinée.
Le dossier passe au Conseil des Etats.