
Le parti de Rajoy au centre d’un procès pour corruption en Espagne

(Keystone-ATS) Le « procès de l’année » en Espagne s’est ouvert mardi près de Madrid. D’anciens hauts responsables du parti conservateur au pouvoir devront s’expliquer sur un système sophistiqué de pots-de-vins et fausses factures, illustrant la galopante corruption dans le pays.
Deux anciens trésoriers du Parti populaire (PP) du chef du gouvernement Mariano Rajoy figurent parmi les prévenus vedettes de ce procès, sept ans après les premières arrestations ordonnées dans cette « affaire Gürtel ». « Voleurs », « chorizos », criaient mardi des manifestants à leur arrivée à l’Audience nationale, le haut tribunal chargé de juger les affaires politico-financières, dans la banlieue de Madrid.
Trente-sept personnes au total sont soupçonnées d’avoir participé à un vaste réseau de détournements de fonds publics portant sur des dizaines de millions d’euros entre 1999 et 2005. Parmi eux, une douzaine d’élus et responsables du PP.
Dans le hall du tribunal, Luis Barcenas restait le plus entouré par ses pairs: ancien trésorier du PP de 1988 à 2009, il est notamment accusé d’avoir dissimulé plusieurs dizaines de millions d’euros à l’étranger. La justice espagnole avait découvert que M. Barcenas avait détenu jusqu’à 47 millions d’euros sur deux comptes en Suisse.
Enrichissement illicite
Quant au chef présumé du réseau, l’homme d’affaires Francisco Correa, il paraissait plus isolé. Lui qui se faisait autrefois surnommer « don Vito » – comme le mafieux du film « Le parrain » – a prévenu peu avant le procès qu’il allait raconter « tout ce qu’il savait »…
Connu pour avoir été proche de l’ex-chef de gouvernement conservateur (1996-2004) José Maria Aznar, M. Correa est accusé d’avoir dirigé le réseau « destiné à s’enrichir illictement sur fonds publics ». Entre 1999 et 2005, il avait arrosé de pots-de-vin et couvert de cadeaux des élus du PP. En échange, ses entreprises ou celles de ses amis se voyaient attribuer des contrats de travaux publics ou l’organisation d’événements, telle la visite en 2006 du pape Benoît XVI à Valence.
Le journal d’investigation eldiario.es avait publié en 2015 une « confession » de M. Correa: il y assurait que des chefs d’entreprises lui versaient « une commission de 2 à 3% » sur le montant des contrats publics attribués, qu’il remettait « en liquide » à M. Barcenas après avoir prélevé sa part. Le bras droit de M. Correa était un ancien dirigeant du PP en Galice.
Le parti lui-même, présidé depuis 2004 par M. Rajoy, est mis en cause pour sa responsabilité civile en tant que « bénéficiaire » de fonds obtenus illégalement par des maires PP. Mais il n’est pas jugé pénalement car le délit de financement illégal de parti n’existe que depuis 2015.