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Un ancien garde d’Auschwitz face à la justice en Allemagne

(Keystone-ATS) Reinhold Hanning, ancien garde d’Auschwitz jugé en Allemagne à 94 ans, a écouté jeudi en silence le récit d’un rescapé du camp au premier jour de son procès,. Il ne s’est pas exprimé sur son propre rôle dans la Shoah.

« Nous avons presque le même âge. Nous ferons bientôt face à nos derniers juges », lui a lancé Leon Schwarzbaum, 95 ans, l’exhortant à expliquer pourquoi 35 membres de sa famille « et des millions de Juifs, de Roms et d’autres » ont été exterminés par les nazis.

Jugé pour « complicité » dans le meurtre de 170’000 personnes entre janvier 1943 et juin 1944, l’accusé est entré à petits pas dans une vaste salle de Detmold (ouest), où le procès a été délocalisé en raison de l’affluence médiatique et de la présence d’une quarantaine de parties civiles venues des Etats-Unis, du Canada ou d’Israël.

Scruté par plus de 200 personnes, M. Hanning a laissé ses deux avocats décliner son état civil – veuf depuis 2004, cet ancien ouvrier dans une usine de vélos est devenu laitier-fromager après guerre -, et n’a pas dévié le regard de la table installée devant lui. Il compte « écouter les témoins » avant de décider s’il prend la parole, a expliqué sa défense.

Risque théorique

L’une des figures de proue du négationnisme allemand, Ursula Haverbeck, 87 ans, a tenté d’assister au procès. Prise à partie par plusieurs membres du public, elle a été éloignée par la police.

Reinhold Hanning, dont l’état de santé ne permet que deux heures d’audience par jour, encourt 3 à 15 ans de prison, un risque essentiellement théorique vu son âge. Parquet et parties civiles attendent surtout une condamnation de principe, martelant qu’il faut poursuivre « jusqu’au bout » les criminels nazis.

Il est le troisième accusé d’une vague de procédures entamées avec la condamnation en 2011 de John Demjanjuk, ex-gardien de Sobibor, puis celle l’an dernier d’Oskar Gröning, ex-comptable d’Auschwitz. Deux autres anciens SS seront jugés fin février à Neubrandenburg (nord-est) puis mi-avril à Hanau (ouest).

Comme pour Demjanjuk et Gröning, le parquet ne reproche à Reinhold Hanning aucun geste criminel précis, mais l’accuse d’avoir été l’un des « rouages » de l’extermination.

Dernières occasions

Jeune ouvrier engagé à 18 ans dans les Waffen SS, parti combattre dans les Balkans puis sur le front russe, Hanning a été transféré début 1942 à Auschwitz. Membre de l’unité SS Totenkopf (tête de mort), il était affecté au camp de base Auschwitz-I tout en surveillant à l’occasion la rampe d’arrivée de Birkenau (Auschwitz-II).

C’est aussi, pour les survivants de la Shoah, l’une des dernières occasions « de parler devant un tribunal allemand », a insisté jeudi matin la présidente Anke Grudda, avant de donner la parole à M. Schwarzbaum. Deux autres rescapés suivront vendredi matin, avant que ne s’exprime Angela Orosz, 71 ans, qui fut l’un des deux seuls bébés à survivre à Auschwitz.

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