Christiane Taubira s’ajoute dans une gauche divisée
(Keystone-ATS) « Je suis candidate à la présidence de la République »: emmitouflée dans une parka sur les hauteurs de Lyon, l’ex-garde des Sceaux Christiane Taubira a bousculé la campagne à gauche samedi matin en jetant une pierre dans la mare de la socialiste Anne Hidalgo.
L’annonce de l’ancienne députée de Guyane intervient lors d’un week-end où les candidats déclarés enchaînent les déplacements tous azimuts, alors que la majorité s’est félicitée de l’adoption sans heurt du pass vaccinal en deuxième lecture à l’Assemblée dans la nuit de vendredi à samedi.
« Nous voulons un gouvernement qui sache mobiliser nos capacités au lieu de nous infantiliser, qui sache dialoguer au lieu de moraliser, de caporaliser », a lancé devant ses troupes celle qui fut déjà candidate à la présidentielle de 2002 (2,32%) et qui s’en est prise à « la verticalité du pouvoir » et « l’absence de dialogue social ».
Christiane Taubira a promis de se soumettre à l’initiative citoyenne de la primaire populaire, une « investiture » par un vote prévu à la fin du mois par des électeurs de gauche – 120’000 inscrits pour voter.
Une pré-consultation a établi une liste de sept candidats, officialisée samedi par les organisateurs: y figurent, outre Mme Taubira, Anne Hidalgo, Yannick Jadot, Jean-Luc Mélenchon, Pierre Larrouturou et les militantes Anna Porterie et Charlotte Marchandise.
Même si les soutiens de l’ex-garde des Sceaux font mine de croire que rien n’est gagné, elle part favorite de cette consultation, d’autant que seuls les trois derniers ont accepté de s’y soumettre, et non Mme Hidalgo.
« Chacun est libre de faire ce qu’il entend, et maintenant, projet contre projet », a tranché la candidate socialiste en déplacement samedi à Villeurbanne, non loin de Chistiane Taubira.
Zemmour et les handicapés
A moins de trois mois du premier tour, les candidats de tous bords continuent de sillonner le pays, voire au-delà des frontières.
Valérie Pécresse (LR) a terminé une visite de deux jours en Grèce en visitant le centre fermé de migrants de Samos, encadrée d’Eric Ciotti et de Michel Barnier.
« On ne peut pas avoir une Europe passoire », a affirmé Valérie Pécresse, soutenant l’idée de « frontières physiques » de l’Union européenne, « y compris avec des barbelés » en cas de « chantage migratoire », en allusion au Bélarus. « On a mis la poussière sous le tapis » concernant l’immigration, a-t-elle affirmé.
Le candidat d’extrême droite Eric Zemmour, qui a plaidé vendredi pour le retour d’une école « du passé », « de l’autorité » et de la « discipline de fer » lors d’un déplacement à Saint-Quentin (Aisne), doit pour sa part affronter une nouvelle polémique après avoir suggéré d’accueillir les enfants en situation de handicap dans des « établissements spécialisés » plutôt que dans les classes avec les autres élèves, en déplorant « l’obsession de l’inclusion ».
Le chef de file des députés LR Damien Abad a qualifié sur Twitter ces propos de « scandaleux », évoquant « ségrégation », rejoint par la secrétaire d’Etat chargée des personnes handicapées Sophie Cluzel qui a jugé la sortie de l’ancien polémiste « pitoyable », à l’unisson de l’ensemble de la classe politique – Marine Le Pen compris – et des associations.
« Quelques jours de retard » pour le pass
Mais la polémique a également rattrapé la candidate du Rassemblement national, pour avoir mis en ligne à la mi-journée un clip de campagne tourné au Louvre, là où Emmanuel Macron avait fêté sa victoire contre elle en 2017, avec l’espoir de raviver son duel face au président sortant « pour fermer définitivement la parenthèse ouverte il y a cinq ans du macronisme toxique pour le pays ».
Problème: l’institution culturelle s’est émue d’un film tourné sans « autorisation préalable », ce dont s’est indigné le président du parti par interim Jordan Bardella.
Dans la majorité, l’heure n’est pas encore à la candidature du président, mais au soulagement après le vote en deuxième lecture de la loi sur le pass vaccinal à l’Assemblée nationale, bien que des manifestations d’opposants soient encore prévues cet après-midi.
« En cette période de crise, beaucoup de gens voudraient nous diviser, nous séparer, mettre de l’huile sur le feu, tirer profit de nos difficultés qui sont réelles, qu’il ne s’agit pas de nier, pour mettre encore d’avantage de désordre. C’est le contraire que nous devons faire », a déclaré samedi le Premier ministre Jean Castex en déplacement à Toulon.
Le Sénat doit achever l’examen du texte ce week-end et, « selon qu’il y aura ou non saisine du Conseil constitutionnel », l’entrée en vigueur se fera avec « quelques jours de retard » sur le calendrier prévu, soit d’ici une semaine à dix jours, a commenté vendredi soir M. Castex dans un entretien à Nice-Matin.