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Caetano Veloso, ambassadeur du métissage

Caetano Veloso. www.montreuxjazz.com

Le Brésil, l'Afrique et l'Occident avaient rendez-vous au Montreux Jazz Festival. Caetano Veloso a joué les traits d'union entre les continents.

19 heures 30: malgré la douceur de l’air et le bleu du lac Léman, l’auditorium Stravinsky est déjà comble. Une foule bigarrée, sans origine et sans âge, s’y est donnée rendez-vous pour applaudir l’une ou l’autre de ses stars.

Une foule aux multiples visages, à l’image de la programmation concoctée pour la traditionnelle fête finale du Montreux Jazz Festival. Au menu, le Brésilien Caetano Veloso, le Sénégalais Youssou N’Dour, la Béninoise Angélique Kidjo, et Joe Cocker, le vétéran britannique du rock.

Un show déconcertant

Phénix du rock tropical, Caetano Veloso donne le coup d’envoi des festivités. Sobre, félin, tout de noir vêtu, il a entamé son voyage vers l’Afrique avec Noites do Norte, titre de son dernier album et de son nouveau spectacle.

Déconcertant. Un orage électronique où se mêlent les percussions africaines et les soyeuses intonations d’une voix à nulle autre pareille.

Avec Noites do Norte, Caetano Veloso marie les splendeurs baroques de Salvador de Bahia, sa ville d’origine, les schémas mathématiques de la poésie concrète brésilienne, les rythmes du rock et les balancements de la bossa-nova.

Un hommage à l’Afrique

Le concert est un hymne avant-gardiste au métissage des musiques, des cultures et des styles. Une ode à la négritude. Un discours sur l’esclavage qui rend d’ailleurs hommage à Joaquim Nabuco, homme politique et abolitionniste de la fin du XIXe siècle.

«L’esclavage restera longtemps l’identité du Brésil» scande Caetano Veloso. Et chanson après chanson, le musicien entraîne le public, toujours plus loin, vers des sonorités étranges qui oscillent entre les profondeurs africaines et le métal de l’occident.

«Angola … Congo …Benguela …», la voix de Caetano Veloso devient congas et se fond dans le rythme de pagayeurs sur les grands fleuves africains.

Et les sons électriques déferlent à nouveaux. Stridents, inhumains, telle la rumeur d’une jungle urbaine.

Le temps des reprises

La foule est perplexe. Partagée entre surprise et le désir de se couler dans les rythmes envoûtants. Alors, Caetano Veloso lui offre une plage de douceur. Seul sur scène avec sa guitare, il entame quelques vieux succès. Des références aux mille douceurs pour les adeptes de la bossa-nova.

Dernière concession au public, à son retour sur scène après un premier rappel, le dandy de la musique brésilienne enfile un tee-shirt jaune et vert aux couleurs de l’équipe brésilienne de football. Le numéro 9, celui de Ronaldo.

Il entame alors «Giulietta Masima», un classique des années 70. Mais même cette dernière référence à la période du tropicalisme, ne fera pas totalement oublier au public de l’auditorium Stravinsky, que Caetano Veloso s’est quelque peu perdu dans une démarche musicale par trop intellectuelle.

Kidjo ou la transcendance

Angélique Kidjo, elle, fait danser la salle. La chanteuse africaine, évoque aussi l’esclavagisme. Mais c’est au Brésil, à Bahia plus précisément, qu’elle va puiser l’inspiration.

«Les esclaves nous ont donné une image de réconciliation, parce qu’ils ont su conserver leur identité culturelle», lance cette enfant du Bénin.

C’est qu’elle sait parler au public, la chanteuse au crâne rasé. Elle sait aussi bouger sur scène et transmettre à la salle son énergie débordante.

Un duo tendresse

Kidjo, c’est l’internationale vaudoue: tambours, jazz, soul, New York, Haïti, Cuba, Salvador de Bahia et même une chanson de Serge Gainsbourg, «Les Petits Riens», qu’elle interprète avec mille bonheurs.

Mais le point d’orge du spectacle est bel et bien son duo avec Caetano Veloso. Douce complicité. Emotion partagée. La voix grave et profonde d’Angélique Kidjo se joint à celle, cristalline et fragile, du Brésilien pour susurrer des mots d’amours. Et le public exulte.

swissinfo/Vanda Janka à Montreux

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